Un «bon administrateur» au service de la pastorale
Soleure: Markus Thürig, nouveau vicaire général du diocèse de Bâle
Soleure, 23 mars 2010 (Apic) Markus Thürig fait la moue. Il préférerait plutôt être pris en photo au milieu des immeubles et des arbres que devant le palais épiscopal. «Nous devons aller à la rencontre du monde moderne», affirme-t-il. Le 20 janvier dernier, ce prêtre est devenu vicaire général du diocèse de Bâle et de ce fait adjoint du nouvel évêque Felix Gmür.
Un homme aimable et discret, qui se voit plutôt en arrière-plan: c’est ainsi qu’il voit la fonction de vicaire général, qui peut cependant être accomplie de façons très différentes. Son prédécesseur, le dominicain Roland-Bernhard Trauffer, était très présent dans le domaine public alors que d’autres ont passé presque inaperçus. Pour sa part, Markus Thürig souhaite devenir simplement un bon administrateur. Une façon de concevoir cette fonction que l’apôtre Pierre recommandait d’ailleurs (1 P 4,10): «Mettez-vous, chacun selon le don qu’il a reçu, au service les uns des autres, comme de bons administrateurs de la grâce de Dieu, variée en ses effets». Pour le vicaire général Thürig, cela signifie soutenir la pastorale, dans les paroisses, les missions et services d’aumônerie.
«J’ai eu du plaisir à œuvrer en pastorale paroissiale», affirme celui qui a été actif plus de deux décennies dans ce domaine. Une activité qu’il juge exigeante: «Les gens veulent de plus en plus être accompagnés de façon individuelle». Le baptême ou l’enterrement ne doivent plus se trouver dans les livres rituels, mais s’adapter aux besoins des personnes. Mais tout ça a des limites. Non seulement à cause du supplément de travail: «Nous voulons proposer de former une communauté ecclésiale et non un accompagnement rituel libre».
La mise en place des unités pastorales constitue une charge supplémentaire, mais signifie «une jolie part d’incertitude». «Nous ne pouvons pas prévoir ce que deviendra dans 20 ans la vie sociale dans une telle unité pastorale», souligne Markus Thürig. Mais cela ne l’effraie pas. Cette situation lui rappelle l’exode dans la Bible, ou encore le chemin vers Emmaüs, au terme duquel les deux disciples vont rebrousser chemin. «Peut-être devrons nous aussi revenir en arrière», lance-t-il. «Revenir vers la certitude que Jésus est vivant. Finalement, le côté administratif ne doit pas demeurer au centre».
L’organisation pastorale, qui a perduré durant un siècle depuis 1850, est de toute façon du passé. «Nous ne bâtissons pas pour l’éternité, même si nous mettons notre espérance sur elle!», affirme-t-il. C’est comme dans l’éducation: «Les parents doivent savoir en toutes circonstances que les enfants ne leur appartiennent pas.» Le vicaire général Thürig est un adepte du langage imagé. Il est visiblement habitué à expliquer avec clarté ce qui semble difficile à comprendre.
Ne pas se laisser bercer par un sentiment de sécurité
Tout changement engendre bien entendu des conflits. Mais les disputes vides de sens ne lui disent rien. Lorsque la dimension psychologique prend le devant de la scène, c’est au détriment du sujet de discussion. «Je fais plutôt partie des silencieux, de ceux qui préfèrent écouter.» Il lui arrive souvent de réfléchir avant de répondre. Et c’est le cas lorsque l’on aborde la question du manque de prêtres. Il est clair que l’on peut voir le problème avec «les lunettes de la pénurie» durant ces 10 ou 20 prochaines années. «Mais la pastorale serait-elle meilleure, dans le sens de ’plus actuelle’, si nous avions encore un curé pour chaque paroisse? N’y aurait-il pas un danger de nous laisser bercer par un sentiment de sécurité, alors que la société dans laquelle vit notre Eglise est en pleine mutation?», se demande le vicaire général de Bâle.
Le «changement vers la société actuelle» constitue pour lui la plus grande tâche de son diocèse. Former des unités pastorales ne suffit pas. Il faut également du contenu. «Si chacune des 5 paroisses prépare sa propre soupe, on ne peut pas simplement les rassembler dans la même casserole. Cela devient imbuvable.» Il vaut mieux apprêter une autre soupe. Les paroisses doivent adopter ensemble des priorités. Il est vrai qu’à l’avenir, on aura toujours une paroisse chez soi. Mais elle ne pourra pas tout proposer. Chez comme pour les achats du ménage. On trouve certaines marchandises au magasin du village, mais pour le reste il faut se rendre dans un centre commercial.
«Quelle organisation en Suisse rassemble chaque dimanche autant de personnes?», lance Markus Thürig en faisant référence à sa propre expérience avec les paroisses dans lesquelles il donne un coup de main. «Ces personnes ne veulent pas se divertir, mais se confrontent avec elles-mêmes, avec les autres et avec un message vieux de plus de 2000 ans». «Il est vrai qu’il n’y a pas beaucoup de jeunes, mais il y en a quand même», souligne-t-il. Quelques éléments de tradition vont certainement encore se détacher, selon lui. «Mais lorsqu’on dit à quelqu’un que l’on a perdu de vue depuis 20 ans qu’il est resté le même qu’avant, ce n’est franchement pas un compliment!»
Encadré:
Le système dual de l’Eglise en Suisse
«Je le vit plutôt bien», affirme Markus Thürig au sujet de son expérience avec le système d’organisation duale de l’Eglise, qui fait l’objet de certaines remises en question. A côté de la hiérarchie catholique, qui est de droit ecclésial, des autorités de droit ecclésiastiques sont élues démocratiquement pour gérer les questions administratives. «J’ai toujours eu affaire avec des personnes qui considèrent leur activité comme un service pour la pastorale». Ces personnes investissent beaucoup de temps et prennent à cœur la vie de l’Eglise. Au-delà des différences de point de vue, nous sommes toujours parvenus à nous mettre d’accord.
Une évolution de ce système pourrait peut-être consister à le «baptiser», «afin qu’il devienne clairement un signe pour nos convictions chrétiennes». Car la solidarité horizontale entre les communautés ecclésiales et verticale vers le haut pourrait être encore améliorée. Il est rare que l’on verse une contribution aux paroisses voisines les plus pauvres, si ce n’est pour une rénovation urgente. Pour les régions du diocèse et pour l’évêque, il est souvent difficile d’obtenir des moyens financiers suffisants. On se comporte comme dans une confrérie bourgeoisiale, alors qu’en tant qu’Eglise il faudrait donner le bon exemple.
Encadré:
Docteur en psychologie
Markus Thürig est né en 1958 à Lucerne. Il a étudié la philosophie, la théologie et la psychologie à Lucerne, Rome et Paris, et a été ordonné prêtre en 1984. Depuis 1987, il a travaillé durant deux décennies en pastorale paroissiale. Il a obtenu un doctorat en psychologie, il est psychothérapeute et a longtemps mené un service de conseils psychologiques à temps partiel. En août 2010, il est nommé responsable du vicariat épiscopal du diocèse de Bâle pour la pastorale. En octobre dernier, il est élu chanoine résident à Lucerne. Le 20 janvier 2011, le nouvel évêque de Bâle, Mgr Felix Gmür, le nomme vicaire général du diocèse, poste devenu vacant depuis la démission du Père Roland Trauffer. Il vit durant la semaine à l’évêché à Soleure et en fin de semaine à Münchenstein (Bâle Campagne) où il réside à la cure avec la famille de l’assistante pastorale avec laquelle il a œuvré en paroisse durant 10 ans.
Encadré:
Vicaire général et modérateur de la curie diocésaine
Le vicaire général est le représentant de l’évêque dans le domaine administratif. Il est également chargé par lui de diriger les quelque 30 collaborateurs de la curie diocésaine. Markus Thürig a le titre de Moderator curiae, ce qui fait de lui le coordinateur du travail à la curie diocésaine à Soleure.
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