Philippe Matthey

Au nom du Père

Ainsi commencent nos prières et peut-être aussi nos journées: par ce signe de croix qui relie le ciel et la terre, et qui symbolisent notre lien avec Dieu, nous prenons place dans la relation du Père, du Fils et de l’Esprit. Cependant nous avons toujours besoin d’apprendre à prier, comme les disciples qui ont perçu que le dialogue avec Dieu leur était nécessaire et que toutefois l’interlocuteur demeure parfois bien silencieux!!!

Ils s’en remettent donc au maître pour recevoir de lui les paroles qui mènent à Dieu. Et là, premier étonnement, Jésus leur rafraîchit la mémoire, comme pour leur faire mieux habiter leur foi en Dieu. Les quatre premières demandes du Notre Père reprennent des paroles de la liturgie juive qui célèbre le Dieu de la première alliance avec les noms qui lui sont donnés. La sainteté du nom de Dieu est comme le premier repère de la puissance de sa promesse.

Le deuxième enseignement de cette parole est que le lien de l’humanité avec Dieu passe par Jésus. Toute prière est comme concentrée dans le cœur du Christ pour monter vers le Père. Et là, Jésus endosse le rôle des justes grâce auxquels la ville de Sodome est sauvée. Si, dans l’histoire d’Abraham il est nécessaire de négocier avec Dieu pour qu’il ne détruise pas la ville du péché, avec Jésus il n’est plus question de négociation mais de la grâce du salut. Par le Fils, avec lui et en lui, la miséricorde du Père est donnée à toute l’humanité. L’amour a pris le relais de cette sorte de bras de fer avec Dieu pour obtenir justice.

«La prière du Notre Père n’a de sens que lorsqu’elle est ouverte sur les autres»

La troisième découverte de la prière avec Jésus est que Dieu est attentif aux besoins les plus immédiats de l’humanité: le pain et la paix. La deuxième partie de l’évangile de ce jour évoque ces liens très simples qui nous permettent de vivre le service à l’autre: frappez et l’on vous ouvrira, donnez et vous recevrez! Si les liens humains permettent cette attention au besoin de l’autre, combien plus notre lien avec Dieu est-il prometteur de vie. Comme le Dieu de la première alliance, le Dieu de Jésus-Christ voit la misère de son peuple et, par sa miséricorde, le délivre de tout mal.

En donnant à Dieu le nom de Père, nous apprenons à être fils et filles. Un père n’est père que par ses enfants, et des enfants ne sont fils et filles que par leurs parents. Prier Dieu comme notre Père revient à nous reconnaître comme ses enfants en qui sont engendrés la vie et l’amour. Notre dignité d’enfants de Dieu nous établit comme l’expression de sa présence en notre monde et en notre temps.

Enfin, nous observons avec bonheur que toute cette prière n’a de sens que lorsqu’elle est ouverte sur les autres. Aucun intérêt égoïste dans les demandes du Notre Père. Elles sont toutes formulées au pluriel. Dire «notre Père» revient à reconnaître qu’il est celui de toute l’humanité. Le «nous» de chaque demande nous établit collectivement comme les bénéficiaires de la sollicitude divine. Il n’y a pas de prière qui ne soit qu’individuelle, mais il y a une communion qui nous relie dans les mêmes aspirations et la même louange.

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit! C’est en Dieu, qui est relation d’amour, que s’originent les liens de la communauté humaine et l’intérêt commun que sa volonté soit faite sur terre comme au ciel !

Philippe Matthey | Vendredi 22 juillet 2022


Lc 11, 1-13

Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière.

Quand il eut terminé,

un de ses disciples lui demanda:

«Seigneur, apprends-nous à prier,

comme Jean le Baptiste, lui aussi, l’a appris à ses disciples.»

    Il leur répondit:

«Quand vous priez, dites:

›Père,

que ton nom soit sanctifié,

que ton règne vienne.

    Donne-nous le pain

dont nous avons besoin pour chaque jour

    Pardonne-nous nos péchés,

car nous-mêmes, nous pardonnons aussi

à tous ceux qui ont des torts envers nous.

Et ne nous laisse pas entrer en tentation.»

    Jésus leur dit encore:

«Imaginez que l’un de vous ait un ami

et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander:

›Mon ami, prête-moi trois pains,

    car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi,

et je n’ai rien à lui offrir.’

    Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond:

›Ne viens pas m’importuner!

La porte est déjà fermée;

mes enfants et moi, nous sommes couchés.

Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose’.

    Eh bien! je vous le dis:

même s’il ne se lève pas pour donner par amitié,

il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami,

et il lui donnera tout ce qu’il lui faut.

    Moi, je vous dis:

Demandez, on vous donnera;

cherchez, vous trouverez;

frappez, on vous ouvrira.

    En effet, quiconque demande reçoit;

qui cherche trouve;

à qui frappe, on ouvrira.

    Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson,

lui donnera un serpent au lieu du poisson?

    ou lui donnera un scorpion

quand il demande un œuf?

    Si donc vous, qui êtes mauvais,

vous savez donner de bonnes choses à vos enfants,

combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint

à ceux qui le lui demandent!»

La prière du Notre Père n'a de sens que quand elle est ouverte vers les autres | © Pixabay
22 juillet 2022 | 17:00
par Philippe Matthey
Temps de lecture : env. 4  min.
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