Sœur Anne-Sophie

Evangile de dimanche: promus cantonniers du Seigneur

Voilà une mise en route qui n’y va pas par quatre chemins! Dès le premier verset de son évangile, Marc énonce son but: la révélation de l’identité de Celui que l’apôtre Pierre ne reconnaîtra que huit chapitres plus loin et que les femmes au tombeau ne reconnaîtront même pas au terme du récit. Échec de la «bonne nouvelle»? Pas sûr… Ne ratons cependant pas le départ.

Nous sommes au commencement non seulement d’un récit mais d’une «bonne nouvelle». Ou plutôt d’une «heureuse annonce» car l’expression grecque désigne ici une action plus qu’un contenu. Cela n’est pas sans conséquence: l’Évangile est bien sûr un message à recevoir, mais surtout une annonce à communiquer. En un mot, ce qui commence, c’est l’Église. Elle est heureuse annonce de «Jésus, Christ, Fils de Dieu».

C’est à ce titre que Jean-Baptiste est vraiment précurseur. Il est le premier annonceur qui recrute des annonceurs. Il est une voix dans le désert qui recrute des voix – les nôtres – pour annoncer la Parole. Que dit cette voix qui se répercute jusqu’à nous en de multiples voix et nous convie?

D’abord, que l’heureuse annonce est un chemin à préparer (v.2-3). Nous voilà promus cantonniers du chantier du Seigneur: nos pelles, nos pioches et nos rouleaux compresseurs auront raison des bosses, ornières, et nids-de-poule de nos vies parfois cabossées ou mal emmanchées si notre ouvrage, pourtant nécessaire, est docilité à l’œuvre de la grâce en nous.

«Par notre baptême, nous sommes faits dignes de participer à l’abaissement du Seigneur pour participer ensuite à sa glorification.»

Ensuite qu’il est toujours possible d’emprunter le chemin de «l’heureuse annonce» malgré nos fausses routes. Le baptême de conversion (v.4) c’est cela: réorienter notre énergie, notre volonté, notre amour vers le bien perçu par notre conscience et par notre bout de foi, souvent enfoui sous les dunes de nos absences ou les gravats de nos soucis; et laisser Dieu venir à nous.

Aussi que le chemin n’est pas tant un tracé linéaire qu’un lieu de rencontre: tout le monde allait vers Jean-Baptiste (v.5). C’est la rencontre qui trace la route et fait l’Église. Le «tout le monde» de Marc est surement abusif, mais il signifie que c’est tout Israël qui est convoqué par la parole de Jean-Baptiste pour se laisser déplacer par elle. Cette voix du commencement convoque aussi l’Eglise et la «lance» en la rassemblant.

Enfin, que le chemin ainsi emprunté est une humilité, un effacement devant Celui que l’on annonce. Tel est le baptême dans l’Esprit (v.7). Car il nous faudra inclure dans notre itinéraire cette plongée dans le mystère de la passion et de la mort du Christ pour déboucher avec lui dans sa résurrection. Par notre baptême, nous sommes faits dignes de participer à l’abaissement du Seigneur pour participer ensuite à sa glorification. Et c’est là tout le chemin et toute l’annonce.

Ce commencement de l’évangile de Marc se révèle ainsi être un sommaire: sommaire de la vie de l’Église et sommaire de nos vies personnelles à la suite du Christ, en Église. Nous sommes en route avec Celui qui est le chemin, en route pour devenir nous-même chemin.

Sœur Anne-Sophie OP | Vendredi 8 décembre 2023


Marc 1, 1-8

Commencement de l’Évangile de Jésus,
Christ, Fils de Dieu.
Il est écrit dans Isaïe, le prophète :
Voici que j’envoie mon messager en avant de toi,
pour ouvrir ton chemin.
Voix de celui qui crie dans le désert :
Préparez le chemin du Seigneur,
rendez droits ses sentiers.

Alors Jean, celui qui baptisait,
parut dans le désert.
Il proclamait un baptême de conversion
pour le pardon des péchés.

Toute la Judée, tous les habitants de Jérusalem
se rendaient auprès de lui,
et ils étaient baptisés par lui dans le Jourdain,
en reconnaissant publiquement leurs péchés.
Jean était vêtu de poil de chameau,
avec une ceinture de cuir autour des reins ;
il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage.
Il proclamait :
« Voici venir derrière moi
celui qui est plus fort que moi ;
je ne suis pas digne de m’abaisser
pour défaire la courroie de ses sandales.
Moi, je vous ai baptisés avec de l’eau ;
lui vous baptisera dans l’Esprit Saint. »

«Voici venir derrière moi celui qui est plus fort que moi ; je ne suis pas digne de m’abaisser pour défaire la courroie de ses sandales.» | «Jean Le Bpatiste», détail, par Arcabas
8 décembre 2023 | 12:04
par Sœur Anne-Sophie
Temps de lecture: env. 3 min.
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