Sœur Anne-Sophie

Évangile de Dimanche: de «ces jours-là» à «ces jours-ci»

Dans notre lectionnaire, quasi tous les évangiles du dimanche, commencent par ces mots: «En ce temps-là»? Mais si vous regardez votre Bible, ces mots n’y sont pas ou très rarement. L’évangile de ce jour est une exception et il commence très précisément par «En ces jours-là». L’expression, dans l’Ancien Testament, est comme un panneau de signalisation: attention, il va se passer quelque chose.

L’histoire du salut va franchir un pas important, elle va rebondir pour un progrès dans la Révélation que Dieu fait de lui-même à son peuple. Le «en ces jours-là» de notre passage annonce un énorme rebondissement, le plus décisif peut-être. Et il correspond à l’entrée en scène de Jean-Baptiste: «En ces jours-là paraît Jean le Baptiste». Et voici son message: «Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche». C’est le rebondissement de l’imminence: le Royaume des cieux s’est approché au point de nous atteindre et de nous placer devant la possibilité ou la nécessité de nous convertir.

«La virulence avec laquelle Jean apostrophe les pharisiens et sadducéens manifeste bien que ce baptême dans l’eau n’est que préparatoire…»

En quoi consiste cette conversion? D’après le ministère de Jean, il semble revêtir une unique nécessité mais à deux facettes: le repentir et le fait de porter du fruit. Se repentir ne consiste pas d’abord à changer de mentalité, de façon d’agir mais à reconnaître son péché et à s’en détourner. Ce qui équivaut à se tourner vers Dieu, à faire retour à son Alliance, à renouer avec elle.

Cette volte-face par elle-même porte du fruit et ce fruit est une vie dans l’Alliance, en vérité. Ce qui n’est pas le cas – semble-t-il – des pharisiens et des sadducéens qui viennent se faire baptiser par Jean. La virulence avec laquelle ce dernier les apostrophe manifeste bien le propos de ce baptême dans l’eau: il n’est que préparatoire. Il entend vider l’homme de toute prétention religieuse, afin qu’il ne se prévale pas de son appartenance à Abraham, qu’il ne se donne pas bonne conscience par des pratiques extérieures qui tiennent Dieu à distance plus qu’elles ne l’en rapprochent.

«C’est le baptême de Jésus dans l’Esprit Saint qui donne de faire le saut dans la confiance, en s’appuyant uniquement sur Dieu et non sur les pratiques religieuses…»

Ces pratiques creuses engendrent des hommes sans fruit. En revanche, l’homme repentant est comme reconfiguré par son retour à Dieu. Sa vie peut en être radicalement transformée. Néanmoins, pour se livrer à Dieu sans réserve, le baptême de Jean ne suffit pas. C’est le baptême de Jésus dans l’Esprit Saint qui donne de faire le saut dans la confiance, en s’appuyant uniquement sur Dieu et non sur les pratiques religieuses et les efforts personnels. Ce baptême rend ceux qui le reçoivent pareils au Christ: entièrement remis au Père et entièrement reçus de lui.

Les jours de l’Avent sont «ces jours-là» où nous est donnée l’occasion de rebondir nous aussi en renouvelant intérieurement notre désir de vivre en vérité ce que le baptême nous a déjà donné: la vie d’enfants de Dieu à l’image de Jésus, ultime rebondissement de l’histoire qui la récapitule et l’accomplit. Et les «en ce temps-là» qui ponctuent nos évangiles tout au long de l’année, peuvent être entendus comme un rappel que cet accomplissement a lieu pour nous chaque jour, c’est-à-dire «en ces jours-ci».  

Sr Anne-Sophie Porret OP | Vendredi 5 décembre 2025


Mt 3, 1-12

En ces jours-là,
paraît Jean le Baptiste,
qui proclame dans le désert de Judée :
    « Convertissez-vous,
car le royaume des Cieux est tout proche. »
    Jean est celui que désignait la parole
prononcée par le prophète Isaïe :
Voix de celui qui crie dans le désert :
Préparez le chemin du Seigneur,
rendez droits ses sentiers.

    Lui, Jean, portait un vêtement de poils de chameau,
et une ceinture de cuir autour des reins ;
il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage.
    Alors Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain
se rendaient auprès de lui,
    et ils étaient baptisés par lui dans le Jourdain
en reconnaissant leurs péchés.
    Voyant beaucoup de pharisiens et de sadducéens
se présenter à son baptême,
il leur dit :
« Engeance de vipères !
Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ?
    Produisez donc un fruit digne de la conversion.
    N’allez pas dire en vous-mêmes :
›Nous avons Abraham pour père’ ;
car, je vous le dis :
des pierres que voici,
Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham.
    Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres :
tout arbre qui ne produit pas de bons fruits
va être coupé et jeté au feu.

    Moi, je vous baptise dans l’eau,
en vue de la conversion.
Mais celui qui vient derrière moi
est plus fort que moi,
et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales.
Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu.
Il tient dans sa main la pelle à vanner,
il va nettoyer son aire à battre le blé,
et il amassera son grain dans le grenier ;
quant à la paille,
il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas. »

«Engeance de vipères! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient? Produisez donc un fruit digne de la conversion.» | «Jean Le Baptiste» © Arcabas
5 décembre 2025 | 17:00
par Sœur Anne-Sophie
Temps de lecture : env. 4  min.
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