Philippe Matthey

Evangile de dimanche: le livre et les astres

Les uns connaissent l’histoire de l’alliance par leur lecture des Écritures et les autres découvrent un enfant par leur lecture du ciel. La fête de l’Epiphanie nous situe au croisement de l’espérance en «la promesse faite à nos pères en faveur d’Abraham et de sa race à jamais» avec la curiosité des chercheurs de la lumière. Les uns et les autres peuvent contribuer à ouvrir le chemin de Dieu en ce monde.

Contrairement à Luc qui raconte la nativité d’un enfant dans la nuit et l’anonymat, Matthieu, aujourd’hui, met en lumière jusqu’à Jérusalem ce même enfant objet de tous les désirs, des convoitises et déjà des jalousies. L’un et l’autre nous révèlent ainsi les nombreux paradoxes de la manifestation de Dieu dans notre monde. Celui qui est né dans la nuit mourra dans la nuit de la croix, le même qui est manifesté dans la lumière vivra dans la lumière de la Résurrection : nous le croyons!

Entre la crèche et la croix comme entre la mort et la résurrection il y a les juifs et les païens, les adeptes et les opposants, les grands et les petits, la violence et la paix, la mort et la vie… Dans toutes ces situations, Dieu est présent par son amour réconciliateur. Jésus n’a jamais voulu donner raison aux uns contre les autres, il nous a tous appelés à vivre dans la communion de notre humanité déjà réconciliée dans le cœur de Dieu.

C’est dans cet esprit que, comme le dit saint Paul aux chrétiens d’Ephèse, toutes les nations sont associées au même héritage, celui d’un Père qui en nous donnant son Fils nous donne un frère. Dieu n’appartient à personne en particulier et nous nous lui appartenons tous collectivement.

«Nous découvrons avec la fête de l’Epiphanie que c’est par le déplacement de ces étrangers qu’un nouveau chemin peut s’ouvrir.»

Le livre des juifs et la science des mages conduisent à faire la lumière sur celui qui vient de naître.

Mais ni l’un ni l’autre ne suffit sans l’intervention de l’ange qui invite à continuer par un autre chemin. Les mages sont saisis par la joie d’entrer dans la maison pour y découvrir l’enfant. Mais il faut encore que Dieu s’adresse à eux pour qu’ils en saisissent les sens. Nul n’atteint Dieu par l’excellence de sa connaissance et de sa position car c’est Dieu lui-même qui par cet enfant se donne non seulement à connaître, mais aussi et surtout à aimer!

Notre monde en quête de sens et en impatience de paix est trop souvent déchiré par les intérêts contradictoires de ceux qui veulent s’attribuer la vérité et, par elle, le pouvoir. Aujourd’hui, nous découvrons avec la fête de l’Epiphanie que c’est par le déplacement de ces étrangers qu’un nouveau chemin peut s’ouvrir. Ils nous apprennent que notre chemin vers Dieu passe à travers toutes les religions et toutes les cultures qui chacune apporte un rayon de vérité et de lumière comme nous le dit le Concile.

C’est par la complémentarité de toute recherche de bonne foi et de bonne volonté que les nations, religions et cultures peuvent être associées pour que la lumière soit faite sur notre commune humanité. L’Esprit de vérité nous vient de Dieu quel que soit le nom que nous lui donnons: saurons-nous l’accueillir pour proclamer chacun dans notre langue les merveilles de Dieu?

Philippe Matthey | Vendredi 6 janvier 2023


Mt 2, 1-12

Jésus était né à Bethléem en Judée,
au temps du roi Hérode le Grand.
Or, voici que des mages venus d’Orient
arrivèrent à Jérusalem
    et demandèrent :
« Où est le roi des Juifs qui vient de naître ?
Nous avons vu son étoile à l’orient
et nous sommes venus nous prosterner devant lui. »
    En apprenant cela, le roi Hérode fut bouleversé,
et tout Jérusalem avec lui.
    Il réunit tous les grands prêtres et les scribes du peuple,
pour leur demander où devait naître le Christ.
    Ils lui répondirent :
« À Bethléem en Judée,
car voici ce qui est écrit par le prophète :
    Et toi, Bethléem, terre de Juda,
tu n’es certes pas le dernier
parmi les chefs-lieux de Juda,
car de toi sortira un chef,
qui sera le berger de mon peuple Israël. »

    Alors Hérode convoqua les mages en secret
pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue ;
    puis il les envoya à Bethléem, en leur disant :
« Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant.
Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer
pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. »
    Après avoir entendu le roi, ils partirent.

Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient
les précédait,
jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit
où se trouvait l’enfant.
    Quand ils virent l’étoile,
ils se réjouirent d’une très grande joie.
    Ils entrèrent dans la maison,
ils virent l’enfant avec Marie sa mère ;
et, tombant à ses pieds,
ils se prosternèrent devant lui.
Ils ouvrirent leurs coffrets,
et lui offrirent leurs présents :
de l’or, de l’encens et de la myrrhe.

    Mais, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode,
ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.

Konrad Witz: «L'adoration des Mages» (détail), huile sur bois, vers 1444. MAH de Genève | DR
6 janvier 2023 | 17:00
par Philippe Matthey
Temps de lecture : env. 4  min.
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