Evangile de Dimanche – Non pas pour juger

Parmi ces quatre verbes, cherchez l’intrus: aimer, donner, juger, sauver. Les quatre sont contenus dans le verset central pour notre foi que nous offre l’évangile de la Croix glorieuse ce 14 septembre: «Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, (…) non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.»

Évidemment, l’intrus, c’est celui que notre verset énonce à la forme négative: juger; et les trois autres sont ceux qui qualifient l’agir de notre Dieu: aimer, donner, sauver. L’intrus, c’est le verbe qui établirait une distance entre Dieu et les hommes, une peur, un assujettissement des créatures vis-à-vis de leur Créateur.

«Qui peut assurer qu’il n’a pas au fond de lui-même une représentation d’un Dieu qui accuse…?»

Ce n’est pas pour cela que Dieu a donné son Fils. Mais qui peut assurer qu’il n’a pas au fond de lui-même, dans un petit coin de l’esprit ou de la conscience, une représentation d’un Dieu qui accuse, qui juge, qui condamne? La représentation est tenace, et on sait qu’elle vient de loin.

Elle a été insinuée au cœur de la femme et de l’homme par le serpent selon le récit de Genèse 3. Dans son orgueil, le serpent s’est fait l’accusateur de Dieu, lui prêtant ses propres intentions : se soumettre les hommes en les rendant rebelles à Dieu par la promesse d’un pouvoir à usurper au lieu d’une alliance à faire grandir.

«Un serpent pour guérir des serpents. Drôle d’idée. Guérit-on le mal par le mal?»

Or c’est justement l’image du serpent que nous offre l’évangile de ce jour. Jésus fait référence explicitement à l’épisode de l’Exode où Moïse éleva sur un mât un serpent de bronze pour qu’en le regardant, ceux qui sont mordus par les serpents brûlants soient guéris. Un serpent pour guérir des serpents. Drôle d’idée. Guérit-on le mal par le mal? Ce serpent de bronze préfigurait le Christ à son tour élevé sur un mât, la Croix, pour sauver les hommes de ce mal suprême qui consiste à se séparer de Dieu.

C’est d’ailleurs bien ce que les Hébreux ont fait en récriminant contre lui et en le soupçonnant de vouloir leur malheur plutôt que leur bonheur. L’histoire se répète inlassablement tout au long de la Bible comme tout au long de nos vies jusqu’à ce que ce mal du soupçon envers Dieu, ce mal de l’infidélité de l’homme envers le Dieu de l’Alliance soit endossé par Dieu lui-même en son Fils sur la Croix.

«Pour que la relation soit guérie, restaurée, il fallait un partenaire d’alliance…»

La guérison ne vient pas de l’extérieur. Elle ne le peut pas car il s’agit de guérir une relation. Pour que la relation soit guérie, restaurée, il fallait un partenaire d’alliance qui soit en parfaite santé. C’est en son Fils que Dieu l’a trouvé, lui «qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché, afin qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu» (2 Co 5,21).

Être juste, c’est être un partenaire ajusté à Dieu et à nos frères et sœurs. Être juste, c’est être en bonne santé relationnelle si l’on peut dire, en harmonie. On sait que les mots «santé» et «salut» ont la même racine. Et leur vraie racine, au-delà de l’étymologie, c’est l’amour de Dieu qui a donné son Fils. Cet amour a la forme d’une Croix et elle est notre seule gloire. En vivons-nous?

Sr Anne-Sophie, op | Vendredi 12 septembre 2025

Jn 3, 13-17

En ce temps-là,
Jésus disait à Nicodème :
    « Nul n’est monté au ciel
sinon celui qui est descendu du ciel,
le Fils de l’homme.
    De même que le serpent de bronze
fut élevé par Moïse dans le désert,
ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé,
    afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle.
    Car Dieu a tellement aimé le monde
qu’il a donné son Fils unique,
afin que quiconque croit en lui ne se perde pas,
mais obtienne la vie éternelle.
    Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde,
non pas pour juger le monde,
mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. »