Nicole Lechanteur

Évangile de Dimanche: un riche anonyme et indifférent

Le riche n’est pas nommé, ni qualifié de mauvais. Nous sommes sans doute invités à nous questionner : ne sommes-nous pas ce riche ? Son train de vie est celui d’un riche et ses brillants festins ne sont destinés qu’à des convives fortunés.

Il représente tous les riches qui, par l’abîme de leur aveuglement vis-à-vis des pauvres, vivent dans leur monde sans voir que d’autres existent et mènent une vie de misère à leurs côtés. Le pauvre, lui, n’est pas anonyme : il se nomme Lazare, c’est-à-dire : « Dieu aide » ou peut-être : « pour aider » et est là aux côtés du riche. Lazare gît, couvert d’ulcère, comme Job. Sa seule consolation ? Les chiens du voisinage qui lèchent ses plaies.

«Aucun blâme n’est porté par Jésus contre le riche, mais…»

Aucun blâme n’est porté par Jésus contre le riche, mais on perçoit qu’il y a un mur infranchissable entre le riche et Lazare : le mur de l’indifférence. Le riche ne voit pas Lazare… Les pharisiens voient-ils de qui parle Jésus ?
Lazare meurt – on le savait déjà malade. Mais sitôt après lui, nous surprenant, le riche meurt lui aussi.

Et là, il y a inversion de situation : Lazare est emporté immédiatement par les anges ; il accède directement au monde céleste et se retrouve dans l’intimité d’Abraham, alors que le riche se retrouve… aux enfers.
La suite de la parabole se passe entre le ciel et les enfers dans un dialogue improbable, puisqu’aux dires d’Abraham, un abîme infranchissable existe entre ces deux mondes.

«C’est dans les enfers que le riche ouvre les yeux et aperçoit Lazare pour la première fois»

Dans ce récit, Dieu se fait discret. Du monde céleste, les anges sont mentionnés, Lazare qui y est arrivé et surtout Abraham (6 fois). Abraham est le seul à être interpellé par le riche, le seul ayant autorité pour lui répondre, lui, notre père dans la foi. Le patriarche lui sert une leçon. Abraham renvoie le riche, et éventuellement ses frères à une autre autorité, celle des Écritures et en particulier, aux écrits de Moïse, c’est-à-dire le Pentateuque et les Prophètes : Qu’ils les écoutent !

C’est maintenant, alors qu’il est dans les enfers, que le riche ouvre les yeux et aperçoit Lazare pour la première fois. Il ne s’en était jamais préoccupé, et voilà que maintenant il connaît son nom : Lazare.
Le riche aimerait bénéficier d’une compassion de la part de Lazare, alors que lui-même, tout riche qu’il était, n’avait même pas donné une miette de son vivant à ce pauvre gisant devant sa porte. Désormais, c’est le riche qui mendie une goutte d’eau.

«Il est encore temps de ne pas laisser se creuser de tragiques abîmes»

Fatalité ? Non, mais plutôt avertissement et appel à la conversion. Aujourd’hui : c’est le jour ! Un jour, ce sera trop tard, … mais aujourd’hui, il est encore temps de ne pas laisser se creuser de tragiques abîmes !

Nicole Lechanteur | Vendredi 26 septembre 2025


Lc 16, 19-31

En ce temps-là,
Jésus disait aux pharisiens :
« Il y avait un homme riche,
vêtu de pourpre et de lin fin,
qui faisait chaque jour des festins somptueux.
Devant son portail gisait un pauvre nommé Lazare,
qui était couvert d’ulcères.
Il aurait bien voulu se rassasier
de ce qui tombait de la table du riche ;
mais les chiens, eux, venaient lécher ses ulcères.
Or le pauvre mourut,
et les anges l’emportèrent auprès d’Abraham.
Le riche mourut aussi,
et on l’enterra.
Au séjour des morts, il était en proie à la torture ;
levant les yeux, il vit Abraham de loin
et Lazare tout près de lui.
Alors il cria :
›Père Abraham, prends pitié de moi
et envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans l’eau
pour me rafraîchir la langue,
car je souffre terriblement dans cette fournaise.
– Mon enfant, répondit Abraham,
rappelle-toi :
tu as reçu le bonheur pendant ta vie,
et Lazare, le malheur pendant la sienne.
Maintenant, lui, il trouve ici la consolation,
et toi, la souffrance.
Et en plus de tout cela, un grand abîme
a été établi entre vous et nous,
pour que ceux qui voudraient passer vers vous
ne le puissent pas,
et que, de là-bas non plus, on ne traverse pas vers nous.’
Le riche répliqua :
›Eh bien ! père, je te prie d’envoyer Lazare
dans la maison de mon père.
En effet, j’ai cinq frères :
qu’il leur porte son témoignage,
de peur qu’eux aussi ne viennent
dans ce lieu de torture !’
Abraham lui dit :
›Ils ont Moïse et les Prophètes :
qu’ils les écoutent !
– Non, père Abraham, dit-il,
mais si quelqu’un de chez les morts vient les trouver,
ils se convertiront.’
Abraham répondit :
›S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes,
quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts :
ils ne seront pas convaincus.’ »

Lazare et le mauvais riche. Enluminure du Codex Aureus d'Echternach | Domaine public
26 septembre 2025 | 17:00
par Nicole Lechanteur
Temps de lecture : env. 3  min.
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