Jean-Jacques Friboulet

Heureux les pauvres?

Les pauvres ont été l’objet de la sollicitude du parti radical et du parti socialiste qui, au nom de leurs intérêts, ont refusé l’initiative du PDC pour la non-imposition des allocations familiales. Ils soutiennent que cette initiative favorise les riches à l’encontre des chiffres de la Confédération (qui figurent dans le document pour la votation) et des calculs de journaux comme l’Hebdo. «C’est donc clairement la classe moyenne et non les familles aisées qui sort gagnante de l’initiative», conclut cet hebdomadaire.

Ce débat est l’occasion pour les chrétiens de réfléchir à ce qu’est l’option préférentielle pour les pauvres rappelée à temps et à contretemps par le pape François. Celle-ci n’implique pas un combat entre les riches et les pauvres ou la lutte des classes. Elle signifie quatre choses.

En premier lieu les chrétiens doivent défendre et développer un système de solidarité sociale. Ils le font depuis la fin du 19e siècle à travers les assurances sociales. Celles-ci sont indispensables pour que les personnes, qui ont un revenu modeste, aient une vie digne. A ce niveau l’AVS, les allocations familiales, l’AI, les allocations-chômage et les subsides pour le paiement des primes dues aux caisses maladie sont les bases du pacte social. Il ne faut ni remettre en cause leur principe, ni leur financement. Mais on oublie trop souvent que ce dernier est, pour l’essentiel, l’œuvre de la classe moyenne. La solidarité de celle-ci doit être confortée. Elle ne doit pas avoir l’impression d’être toujours la vache à lait du système, d’où l’intérêt de l’initiative PDC qui veut redonner du pouvoir d’achat à cette catégorie sociale.

Plus généralement l’option préférentielle pour les pauvres doit avoir pour conséquence que les personnes aux revenus modestes ne disparaissent jamais du logiciel des décideurs politiques et économiques. Leurs intérêts doivent être pris en compte dans toutes les décisions de politique économique et sociale. Celles-ci peuvent concerner aussi bien l’implantation d’un centre de requérants, d’un hôpital que les conséquences de la hausse du franc. Le grand risque de notre société surmédiatisée est dans ce domaine l’indifférence vis-à-vis des pauvres.

L’option préférentielle pour les pauvres signifie en troisième lieu la mise en place d’une solidarité de proximité au niveau des quartiers, des communes et de la famille. L’Eglise a toujours prôné et soutenu l’action des chrétiens dans ce domaine comme les conférences St Vincent de Paul. Cette solidarité de proximité est en grand danger actuellement avec le développement d’une urbanisation effrénée et l’éclatement des familles. La tâche des chrétiens est de réguler fortement la première et de lutter contre le second. L’individualisme qui résulte de ces deux phénomènes est un poison mortel pour la solidarité de proximité.

Enfin l’option préférentielle pour les pauvres signifie que l’on se situe envers eux dans une attitude d’écoute et de dialogue. Nos maîtres dans ce domaine sont l’abbé Pierre, le père Wresinski (le fondateur d’ATD Quart-monde) et Jean Vanier (le fondateur de l’Arche). Il s’agit d’abord de les lire et de les écouter pour que nous comprenions mieux nos propres vulnérabilités et que nous entrions dans l’intelligence de la Béatitude Heureux les pauvres. Notre pauvreté fait partie de notre condition humaine. Nous recevons tout de Dieu et des autres et tout d’abord la vie. A nous de savoir la partager.

Jean-Jacques Friboulet

L'indifférence envers les pauvres indigne le pape François
2 mars 2015 | 10:29
par Jean-Jacques Friboulet
Temps de lecture: env. 2 min.
Partagez!