Jean-Jacques Friboulet

Le retour du centre

Les Français ont refusé de quitter l’Union européenne et ont mis à l’écart les partis traditionnels de droite et de gauche. Ce vote en faveur de M.E. Macron ouvre une nouvelle ère de la politique française. Un de ses aspects plus intéressants est le retour en force des courants centristes.

Ceux-ci avaient été mis au placard tant par M. Miterrand que par M. Chirac. Le premier, pour être élu en 1981 avait intégré les mouvements animés par J. Delors et M. Rocard dans le Parti socialiste. Il en avait retiré un grand bénéfice du point de vue de sa crédibilité économique mais les idées réformistes de ce qu’on appelait alors la deuxième gauche étaient passées à la trappe. De même M. Chirac  avaient cherché à faire disparaître le centre-droit en 2002 en créant l’UMP. Malgré la résistance de M. Bayrou, ce courant ne comptait plus et M. Fillon l’avait ignoré en construisant son programme.

L’élection de M. Macron est donc une revanche posthume pour M. Rocard et pour tous ceux qui avec lui défendait des idées réformistes. L’avenir dira si l’union du centre-droit et du centre-gauche permettra à la France de faire les réformes qui lui sont absolument nécessaires.

Ce retour du centre est intéressant à un triple titre. D’abord il va à contrecourant de l’évolution suisse où le parti démocrate-chrétien est en perte de vitesse. Favorisé pourtant par l’existence du scrutin proportionnel, celui-ci a du mal à se singulariser par rapport à ses deux puissants voisins le parti radical et le parti socialiste. Ce qui vient d’arriver en France montre que le déclin du centrisme n’est pas inévitable à condition d’avoir une vision adaptée à la société d’aujourd’hui et un leader qui parle aux générations montantes.

«L’enseignement social-chrétien n’est ni purement libéral ni purement socialiste»

Ensuite ce résultat montre qu’il ne sert à rien pour les démocrates-chrétiens de cacher leur drapeau sous un label libéral ou socialiste. En faisant cela ils y perdent leur âme et leur message devient inaudible. C’est ce qui est arrivé en France pour les émules de M. Rocard, de J. Delors et de R. Barre.

Le dernier enseignement  de cette élection concerne le rapport entre les chrétiens et la politique. L’enseignement social-chrétien n’est ni purement libéral ni purement socialiste, comme nous l’avons montré dans une chronique précédente. Il veut concilier les valeurs de liberté liées à l’économie de marché et les valeurs de justice associées au bien commun et à la destination universelle des biens. C’est en s’appuyant sur ces deux jambes que les chrétiens devraient faire leurs choix politiques. Les démocrates- chrétiens l’ont parfois oublié en mettant uniquement l’accent sur la priorité donnée à l’économie. On l’a vu par exemple lors de la votation sur RIE III. C’est en revenant aux sources et donc à cette dualité de valeurs qu’ils pourront de nouveau développer leur audience.

J’ai participé récemment à un weekend organisé par l’Action de Carême et Pain pour le prochain et ayant pour thème «la recherche de Dieu dans la Création». J’ai pu mesurer la grande audience de l’encyclique Laudato si du Pape François bien au-delà des cercles catholiques. La question écologique est centrale au bien commun. Voilà un thème que les démocrates-chrétiens pourraient privilégier dans une vision compatible avec l’économie de marché.

Jean-Jacques Friboulet | 18.05.2017

Le président français, Emmanuel Macron élu le 7 mai 2016 (photo wikipedia OFFICIAL LEWEB PHOTOS CC BY 2.0)
18 mai 2017 | 09:57
par Jean-Jacques Friboulet
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