Jérôme Jean Hauswirth

L'enfant prodigue ou la merveille de l'Amour gratuit et inconditonnel!

Saint Pierre Chrysologue écrivait parlant du fils cadet: «J’ai perdu ma qualité de fils; mais lui n’a pas perdu celle de père… ses entrailles paternelles le pressent à engendrer de nouveau son fils par le pardon». 4e dimanche Carême C (Lc 15, 1-3.15 -32)

 

« Un homme avait deux fils ». C’est par ces mots tout simples que commence peut-être la parabole la plus fameuse du Nouveau Testament. Guy Gilbert, qui sera ce dimanche à Sion, dit qu’elle est sa préférée.

Nous sommes souvent tentés, à l’écoute de cette parabole, de la réduire à une simple leçon de morale: le cadet est l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire, mais le père est si bon qu’il pardonne les égarements de son fils.

Le but de l’Evangile n’est toutefois pas d’abord de nous dire ce qu’il nous faut faire ou ne pas faire. Le but de l’Evangile est de nous révéler ce que Dieu fait pour nous en Jésus-Christ. Comme disait le pape Benoît XVI, il faut remonter au Jésus de l’Evangile, et s’en faire un ami.

Ainsi, cette page d’évangile veut nous dire que Dieu nous aime d’un amour inconditionnel, i.e. un amour sans condition, un amour gratuit.

C’est assez étonnant, mais le PERSONNAGE PRINCIPAL de la parabole n’est pas le fils cadet, ni bien sûr l’aîné, mais bien le PERE qui révèle ce qu’est l’Amour divin.

Jésus adresse cette parabole en deux tableaux à l’attention des pharisiens. I.e. à l’attention d’hommes qui étaient scandalisés par le fait que Jésus reçoit à sa table des pécheurs.

Le premier tableau de la parabole met en avant le personnage du fils cadet. Il est le type même de tout ce que les pharisiens détestaient : un fils indigne qui ne fait pas son devoir, qui mène une vie scandaleuse, qui travaille pour des païens et finit par se retrouver gardien de cochons, i.e. en contact avec l’impur par excellence. Ce fils cadet est la caricature de ce que le pharisien déteste le plus.

Et les pharisiens n’ont pas tout tort, ce fils cadet est vraiment un misérable, et d’ailleurs, même son retour est misérable! Ce n’est un retour modèle, un modèle de conversion, car le retour à la maison paternelle n’est pas causé par le remord d’avoir peiné son père, mais tout simplement par un froid calcul. Le retour au père permettra de se remplir le ventre, d’avoir quelquechose à manger! C’est la faim, le ventre vide, qui pousse à revenir, pas la contrition!

La belle phrase bien préparée «Père j’ai péché contre le ciel et contre toi…» ne semble pas être autre chose qu’un habile stratagème par lequel il tente de sortir de sa misère. Disons-le avec force, L’ENFANT PRODIGUE N’EST PAS UN MODELE DE CONVERSION. La nécessité le poussant à revenir sur ses pas, le récit ne nous présente donc pas ce fils comme un modèle de conversion. Saint Pierre Chrysologue écrivait parlant du fils cadet: «J’ai perdu ma qualité de fils; mais lui n’a pas perdu celle de père… ses entrailles paternelles le pressent à engendrer de nouveau son fils par le pardon».

 

Voici donc le sens du récit, CE QUE JESUS VEUT NOUS ENSEIGNER DE NOUVEAU, C’EST QUE LE PERE AIME ET PARDONNE… GRATUITEMENT. La grande est merveilleuse nouveauté de cette parabole est la révélation de l’amour gratuit et inconditionnel par lequel nous sommes aimés! Vous avez entendu! Le père ne se soucie pas de savoir si le fils manifeste une vraie contrition. Le père n’éprouve pas le fils sur ses motivations, preuve étant que le père ne laisse même pas parler son fils. Il donne tout de suite des ordres pour que son fils soit honoré. Le retour du fils est la seule chose semblant compter pour le père! Un fils là, présent, à la maison, voilà ce qui est la joie du Père. «A son rôle de juge, il préfère celui de père. Il transforme tout de suite la sentence en pardon, lui qui désire le retour de son fils, et non sa perte. Il se jeta à son cou et l’embrassa. Voilà comment le père juge et comment il corrige: il donne un baiser au lieu d’un châtiment.»

Thérèse de Lisieux écrit dans le même sens. «Je voudrais essayer de vous faire comprendre par une comparaison bien simple combien Jésus aime les âmes même imparfaites qui se confient en Lui: Je suppose qu’un père ait deux enfants espiègles et désobéissants, et que venant pour les punir il en voit un qui tremble et s’éloigne de lui avec terreur, ayant pourtant au fond du cœur le sentiment qu’il mérite d’être puni; et que son frère, au contraire, se jette dans les bras du Père en disant qu’il regrette de lui avoir fait de la peine, qu’il l’aime et que, pour le prouver, il sera sage désormais, puis si cet enfant demande à son Père de le punir par un baiser, je ne crois pas que le coeur de l’heureux père puisse résister à la confiance filiale de son enfant dont il connaît la sincérité et l’amour. Il n’ignore pas cependant que plus d’une fois son fils retombera dans les mêmes fautes mais il est disposé à lui pardonner toujours, si toujours son fils le prend par le coeur…»

Jésus, dans sa parabole, met en avant de façon extraordinaire L’AMOUR GRATUIT PAR LEQUEL LE PERE ETERNEL NOUS AIME. Dieu n’attend pas de grandes paroles, de profondes excuses, mais bien un simple geste de retour à Lui. Selon les mots de Thérèse, il faut le prendre par le cœur. Ainsi se convertir, à lumière de cet évangile, c’est entrer dans la joie du Père, c’est accepter d’être aimé par un amour qui aime sans condition. Dieu ne nous aime pas pour ce que nous rêvons de devenir, il nous aime au contraire pour ce que nous sommes. DIEU N’AIME PAS NOTRE IDEAL, MAIS IL AIME NOTRE REALITE : TEL QUE NOUS SOMMES ET LA OU NOUS EN SOMMES! Ici et maintenant, dans notre présent, il nous aime. Et la bonne nouvelle est qu’il nous aime aussi avec nos faiblesses. Ce n’est pas notre puissance qu’il aime, ce que nous avons de meilleur, mais bien tout ce que nous sommes!

Disons-le clairement, cette joie du Père est vraiment extraordinaire, parce que le motif de cette joie est notre simple volonté de choisir la Vie, notre volonté droite de rejeter la mort et le péché.

Entrer dans la joie du Père, voilà ce que n’a pas fait le fils aîné dans le second volet. Il est à l’image des pharisiens qui mènent une vie juste, au service de Dieu et en respectant les commandements. De leur point de vue, à quoi bon être fidèle si le premier gredin venu se voit traité avec pareils honneurs? Pour les pharisiens, il s’agit là d’une injustice totale. Il faut prendre conscience à quel point, Jésus, par cette parabole, ébranle tout leur système de pensée. Les pharisiens n’ont pas compris, que LE PERE N’ENLEVE RIEN AU FILS AINE!
La joie du père se trouve dans la présence de ses enfants à la maison. CE QUE LE PERE VEUT DONNER AUSSI A SON FILS AINE, PLUS ENCORE QUE L’HERITAGE, C’EST CETTE MEME JOIE. Pour le dire fortement! le Père veut que sa joie soit la joie des fils. Et cette joie, nous enseigne l’évangile, n’est possible que dans l’amour gratuit. Dans l’amour gratuit et inconditionnel nous expérimentons la vraie joie!

 

Seigneur, nous sommes tes enfants.
Nous voulons être filiales et fraternels.

Aide-nous à nous convertir, à retrouver le chemin de la maison.

Aujourd’hui puissions-nous entendre l’Esprit par les Paroles de l’apôtre Paul
entendu en deuxième lecture:
«Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec le Père».

Voilà, nous sommes invités à communier à l’amour
tout gratuit et miséricordieux du Père.

Voilà, le seul Amour capable de faire de nous des fils et des frères.

Amen.

 

Père Jérôme Jean

8 mars 2013 | 14:29
par Jérôme Jean Hauswirth
Temps de lecture: env. 5 min.
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