Isabelle Vernet

«Tutti, Tutti, Tutti»

Au lendemain des funérailles du pape François, c’est l’occasion de mettre en valeur des moments uniques et de mesurer l’immense héritage qu’il nous laisse. Pour ma part, je voudrais revenir sur ma rencontre avec le pape François et l’objet de cette rencontre, qui se résumait en une question: que pouvons-nous faire pour les jeunes?

Le 7 octobre 2022, j’avais eu la chance inouïe de rencontrer le pape lors d’une audience privée au Vatican. Nous étions une délégation de dix aumôniers, cinq catholiques et cinq protestants. Nous étions venus parler au pape François des angoisses, des peurs, des espérances et des rêves des jeunes que nous accompagnons quotidiennement dans nos différentes institutions.

Le pape avait d’abord insisté en nous disant combien tout le monde devait être accueilli, inconditionnellement, dans notre Église. Je me souviens qu’il avait répété au moins dix fois le mot «Tutti». Cette insistance m’avait personnellement beaucoup touchée, car nous devons, nous aumôniers ou animateurs jeunesse, accueillir tous les jeunes, quelles que soient leurs convictions et leur choix de vie. De façon très impressionnante, il avait répété, martelé même, que tous et toutes étaient invités. Par dix fois, le pape avait répété le mot Tutti, Tutti, Tutti. Il avait d’ailleurs répété ce fameux «Todos» aux JMJ de Lisbonne l’été dernier.

Que signifie ce Todos? «Qu’il n’est que partiel quand nous amputons le corps du Christ de certains de ses membres». En donnant place non seulement à l’écoute mais aussi à la parole vraie, à l’échange et à la prière, nous comprenons que les cœurs des uns peuvent se laisser toucher par le cœur des autres.

Le pape François nous avait ensuite confortés dans notre rôle d’aumônier en nous comparant aux disciples d’Emmaüs. Nous sommes là pour les jeunes, nous disait-il, pour les accompagner et les écouter. Ce qui compte, ce n’est pas de leur apporter des solutions, mais d’être là pour eux, et d’être toujours disponibles dans une écoute bienveillante.

«Le pape François nous avait ensuite confortés dans notre rôle d’aumônier en nous comparant aux disciples d’Emmaüs.»

Il nous avait ensuite expliqué que l’anxiété que ressentent beaucoup de jeunes était peut-être la condition sine qua non pour trouver au plus profond d’eux-mêmes un sens à leur vie. Cet «ébranlement de l’âme» peut être une occasion de croissance, une prédisposition du cœur à mieux discerner, pour faire le bon choix et prendre une juste décision.

Il s’était ensuite insurgé contre toute forme de rigidité. Il avait répété trois fois que la rigidité est un poison, un péché. Rigidité spirituelle, rigidité morale, incapacité à se laisser déplacer, tous ces maux préoccupants qui poussent certains jeunes à se recroqueviller dans un entre-soi malsain et qui empêchent une relation de se nouer en vérité avec l’autre.

Notre responsabilité d’être au service de la jeunesse est immense et le pape nous avait renouvelé sa confiance dans notre accompagnement inlassable auprès des jeunes, épris de vérité, de justice et de rêves.

Isabelle Vernet

30 avril 2025

«Le 7 octobre 2022, j’avais eu la chance inouïe de rencontrer le pape lors d’une audience privée au Vatican» | © Vatican Media
30 avril 2025 | 08:00
par Isabelle Vernet
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