Homélie du 07 décembre 2014
Prédicateur : Chanoine Jean-Claude Crivelli
Date : 07 décembre 2014
Lieu : Abbaye de Saint-Maurice
Type : radio
Le 24 octobre, l’ouragan Gonzalo causait des dégâts pour plus de 200 millions de dollars aux Bermudes. En mai un million de personnes étaient touchées par les inondations en Bosnie et en Serbie. En 2013 les inondations, les tempêtes, les séismes ont déraciné 22 millions de personnes Le 11 mars 2011, un séisme historique atteignait le Japon, entraînant un tsunami d’une violence inouïe. La catastrophe a radicalement changé le visage du pays. Les catastrophes naturelles – climatiques (cyclones, tempêtes, inondations, grandes chaleurs, sécheresses) et telluriques (séismes, tsunamis, éruptions volcaniques, glissements de terrain) – sont malheureusement de plus en plus nombreuses. En moyenne, par an, près de 300 millions de personnes sont victimes des catastrophes naturelles et environ 78 000 y trouvent la mort.
Pourtant les catastrophes naturelles sont de tous les âges dans l’histoire de l’humanité. La Bible en témoigne. Son récit en est ponctué : depuis le Déluge, en passant par les Plaies d’Égypte, la sécheresse au temps du prophète Elie, jusqu’aux séismes, famines, dévastations, relatées par les évangiles, à cette grande détresse et aux douleurs de l’enfantement désignées par Jésus lui-même et relayées par la 2ème lecture de ce dimanche. Aux disciples que nous sommes le Christ enjoint d’interpréter les signes, de ne pas nous laisser égarer par les faux prophètes, et surtout de ne pas oublier l’essentiel.
Et qu’est-ce donc que l’essentiel ? En termes chrétiens, c’est la venue du Règne dont la prière du Notre Père nous fait demander la venue. Le règne ou le royaume des cieux, qu’est-ce à dire ? Cette expression biblique désigne ce qu’est Dieu dans son rapport au monde et à l’humanité. Ce que Dieu est depuis toute éternité, il veut le devenir pour chacun de nous. « Quand est-ce que Dieu ne règne pas ? – explique saint Cyprien dans son beau commentaire de la Prière du Seigneur – Et quand donc a commencé ce qui en lui a toujours existé, et ne cessera jamais ? » Quand donc cela a-t-il commencé en moi et pour moi ? Quand donc Dieu est-il né en moi ? Quand donc a-t-il pris chair de ma chair ? Quand donc ma vie a-t-elle pris un sens nouveau parce que Dieu, en Jésus et par son Esprit – son règne – est né dans ma vie, mes jours, mes projets, mes relations, mes soucis ? Quand est-ce que mon chemin est devenu « le chemin du Seigneur » – pour reprendre la figure qui traverse les lectures de ce dimanche ?
Depuis les jours de Jean le Précurseur, qui préludaient à la venue du Fils dans la chair de ce monde, Dieu est pour nous « celui qui vient ». Dimanche dernier déjà, nous évoquions ce beau nom de notre Dieu. Celui-ci ne se révèle pas à nous du fond du passé, mais il vient de l’avenir où nous marchons. C’est là que je suis attendu. Nous avons à marcher à sa rencontre, comme la prière nous le rappelait tout à l’heure : « ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton Fils ». Non pas que nous ayons à les délaisser, mais bien à discerner comment notre vita activa (par ex. la profession que j’exerce) rejoint le projet de Dieu sur le monde. Cette « volonté » dont nous demandons qu’elle « soit faite ». Ce que Dieu veut pour moi et pour mes frères et mes sœurs en humanité. Volonté que l’Évangile nous révèle.
Depuis ce que l’on appelle le Big Bang, l’univers est en perpétuelle expansion comme si son espace gonflait. Mouvement qui date de 14 milliards d’années. Il semble que nous allions vers un univers de plus en plus froid et de plus en plus vide – selon certains scientifiques. Alors que d’autres pensent qu’au contraire, à la faveur d’une température et d’une densité extrêmes, nous allons vers le Big Crunch, l’effondrement de l’univers. L’univers n’est pas statique, contrairement à ce que pensait Einstein. Il bouge sans cesse et ce mouvement perpétuel annonce du nouveau quand bien même les soubresauts de notre terre sont dramatiques pour beaucoup d’êtres humains.
La 2ème Lettre de Pierre (3, 10-13), évoquée tout à l’heure, est significative :
Alors les cieux disparaîtront avec fracas, les éléments embrasés seront dissous, la terre, avec tout ce qu’on a fait ici-bas, ne pourra y échapper. 11 Ainsi, puisque tout cela est en voie de dissolution, vous voyez quels hommes vous devez être, en vivant dans la sainteté et la piété, 12 vous qui attendez, vous qui hâtez l’avènement du jour de Dieu, ce jour où les cieux enflammés seront dissous, où les éléments embrasés seront en fusion. 13 Car ce que nous attendons, selon la promesse du Seigneur, c’est un ciel nouveau et une terre nouvelle où résidera la justice.
Alors que toutes choses passent, que les joies de l’existence sont éphémères, que la violence, l’injustice ou la trahison gangrènent les rapports entre les êtres, que je sens mon propre corps investi par la maladie, etc. … la tentation nous guette de n’attendre plus rien, de céder à la déception, à l’amertume et à la désespérance. C’est sans doute dans cette tentation-là que nous demandons au Père de ne pas entrer – « ne nous soumets pas à la tentation ». Dieu n’est pas en retard, disait notre 2ème lecture, il agit avec patience – litt. « avec un cœur large », « grand ouvert ». Que l’Esprit de Celui qui vient dans le monde élargisse l’horizon de notre cœur : que nous soyons capables d’entrer dans les vues de Dieu sur l’humanité. Qu’il éveille en nous cette intelligence du cœur – que nous demandions dans la prière d’ouverture – et qu’il nous « éveille au vrai sens des choses de ce monde » – prière que nous dirons en fin de célébration – et à « l’amour des biens éternels », c’est-à-dire à ce qui demeure toujours et ne passera jamais.»
2e dimanche de l’Avent
Lectures bibliques : Isaïe 40, 1-5.9-11; psaume 84; 2 Pierre 3, 8-14; Marc 1, 1-8
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