Homélie du 10 juillet 2022 (Lc 10, 25-37)
Père Alain Dabire – Chapelle de la Pelouse, Bex
L’évangile nous met en face de quelqu’un avec deux préoccupations importantes. « Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? Chers frères et sœurs, cette préoccupation du docteur de la loi est celle de tous les chrétiens de tous les temps. Elle est aussi la nôtre. Jésus ne répond pas à la question, mais lui pose une question. « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Et comment lis-tu ? » L’autre répondit : « Aimer Dieu et son prochain. » Jésus lui dit : « Tu as répondu correctement. Fais ainsi et tu auras la vie ». La vie éternelle, le salut s’acquiert non seulement par la connaissance intellectuelle de la loi mais surtout par la pratique de cette loi d’amour de Dieu et du prochain. Mais encore faut-il savoir qui est mon prochain ? C’est la deuxième préoccupation du théologien qui est aussi la nôtre.
Les critères de définition du prochain sont multiples : l’appartenance à la même famille, au même statut social, à la même race, au même pays, à la même religion. Ils sont normaux, mais quand ils sont considérés comme des absolus, ces critères peuvent conduire à des comportements partisans, ainsi qu’à des réactions d’évitement, d’exclusion.
L’histoire d’une rencontre inattendue
Jésus ne répond toujours pas à la question, mais prend le détour d’une parabole comme il l’avait fait chez Simon, en présence de la pécheresse. Il raconte l’histoire d’une rencontre inattendue entre divers partenaires. Ils sont quatre : un homme blessé sur une route, un prêtre et un lévite fonctionnaire du culte, et un samaritain. On pourrait ajouter un âne silencieux bien que peut-être étonné !
Comme très souvent, Jésus commence sa parabole par l’expression « un homme », un être humain en situation tragique, de fragilité dont il ne dit rien du sexe, de l’âge, de la race, de la nation, de la religion. Ce faisant, il répond déjà indirectement à ce théologien juif et à chacun de nous que tout être humain rencontré en toutes circonstances peut être et doit être considéré d’abord par chacun comme un « prochain ». C’est ensuite qu’il parle de trois personnes humaines particulières : un prêtre, un lévite et un samaritain. Puis à la fin de son récit, il pose au docteur de la Loi une question inattendue : « Lequel des trois à ton avis a été le prochain de l’homme tombé entre les mains des bandits ». Ainsi formulée, la question demande une réponse évidente. Le prochain n’est plus le blessé sur la route, c’est celui qui s’est fait proche de lui, et donc le samaritain qui l’a secouru. Pas de compliment cette fois, mais de nouveau la même recommandation personnelle : « Va et toi aussi fais de même ». En redisant cette petite phrase, Jésus nous invite à nous situer sur le plan d’un engagement personnel face à des situations et des attitudes concrètes.
Un engagement total
La parabole oppose la pratique du prêtre et du lévite à celle du samaritain. Le contraste est saisissant entre la passivité des autres et le déploiement des gestes du samaritain qui se dérange dans son voyage. Son engagement pour gagner le frère est total et fait de lui le prochain du blessé.
Abba Jean Colobos, un père du désert nous propose une compréhension du prochain dans ces propos : « il est impossible de construire une maison de haut en bas, mais il faut partir du fondement pour aller au faîte. On lui : Que veut dire cette parole ? Il répondit : le fondement c’est le prochain à gagner, il doit être premier c’est à lui que sont suspendus tous les autres commandements du Christ. »
Cette page d’Évangile garde toute sa force aujourd’hui. Elle met en avant la priorité de la miséricorde à vivre en toute circonstance avec le prochain. L’Évangile nous montre que Jésus a eu le courage et pris la liberté de le faire. Les Pères de l’Église l’ont considéré comme le bon samaritain de la parabole, lui qui guérissait le jour du Sabbat, s’approchait des lépreux et se laissait approcher par des femmes jugées impures. Il s’est fait le prochain de l’humanité, a pansé ses plaies, a versé son sang pour elle…
Aurons-nous le courage d’être comme Jésus, prochain des fragilisés ?
Lectures bibliques :
Deutéronome 30, 10-14 ; Psaume 68 ; Colossiens 1, 15-20 ; Luc 10, 25-37
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