La croix surplombe le domaine skiable de Zinal | © Yves Cettaz
Homélie

Homélie du 14 septembre 2025 (Jn 3, 13-17)

Abbé Philippe Matthey – Eglise Saint-Bernard de Menthon, Plan-les-Ouates, GE

Il faudrait mettre un soleil sur toutes les croix ! S’il y a une parole qui m’a marqué pendant mon catéchisme, c’est celle-là. Le curé nous avait amenés dans l’église et, en nous désignant le grand crucifix, il nous avait demandé : que voyez-vous ? Cette question, c’est celle de notre foi, celle aussi qui conduit cette année encore neuve dans notre Unité pastorale : venez et vous verrez !

Nous avons donc cherché et chacun essayait de décrire la grande croix et le Christ plutôt mal en point qui lui était suspendu. Quand ce fut le tour du curé Georges il nous dit : moi, je vois une lumière plus brillante que le soleil. Notre étonnement fut grand et nous avons cherché à comprendre. Il voulait nous montrer que cette croix, symbole de supplice et de violence, était le lieu du don de la vie : Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. Autrement dit la vie qui vient de lui pour rayonner d’amour sur nous. Depuis, j’aime les croix et ce qu’elles nous donnent à voir.

Curiosité, recherche, étonnement… trois étapes de notre foi chrétienne

Curiosité, recherche, étonnement… ce sont trois étapes de notre foi chrétienne. Curiosité parce sans désir nous ne verrons rien. Recherche parce que Dieu se donne à trouver dans le mystère de nos vies. Etonnement parce la surprise nous rend encore plus curieux… et ça recommence…  La foi, ce n’est pas une évidence affirmée et déposée une fois pour toutes dans nos raisonnements, c’est une relation par laquelle l’amour se fraye un chemin en nous, comme en tout être humain.

Oui, la croix du Christ est le signe le plus radical de son amour pour toute l’humanité. Si nous fêtons la croix glorieuse aujourd’hui c’est bien parce que de la croix du Christ resplendit de l’amour de Dieu. Elle est ce point de repère qui donne à voir le chemin de la lumière de Dieu, le signe qui transfigure toute vie et même toute violence. S’il y a des croix dans nos maisons, à notre cou, sur nos routes et carrefours et sur nos sommets, c’est bien pour nous donner à voir par où passer et nous guider vers l’amour. Comme les yeux de notre corps sont attirés par la lumière du soleil, les yeux de notre cœur sont attirés par la splendeur de l’amour de Dieu.

Nous savons, par expérience que c’est bien beau de parler d’amour mais que, dans ce monde qui en a tant besoin, il est obscurci et même caché par trop de soucis, de peurs et de violence. Jésus n’est pas un mage qui transformerait le mal comme par enchantement. Il est descendu et s’est même anéanti comme nous le révèle l’apôtre Paul pour venir jusqu’au fond de nos existences et nous conduire à y voir la lumière de son amour. Et c’est cela qui a été élevé, pour que nous aussi en le contemplant nous soyons relevés.

En prenant notre condition humaine Jésus a assumé tout ce qui la maltraite

En prenant notre condition humaine Jésus a guidé notre recherche et assumé tout ce qui la maltraite. Plongé jusque dans la mort il a été relevé par l’amour de son Père. Voilà le mystère de notre foi, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas mais gagne la vie. C’est cela la gloire de Dieu que déjà chantaient les anges dans la nuit de Palestine… Cette même Palestine qui aujourd’hui met notre foi et notre espérance à rude épreuve. Saurons-nous y discerner une lumière d’amour qui défie toute forme de haine et de convoitise ?

C’était déjà l’expérience du peuple hébreu : désespéré et déçu par un Dieu qui semble absent et par la mémoire de leur libération de la terre d’esclavage qui semble n’être plus qu’une belle illusion. Et que fait Dieu par la voix de Moïse ? Il leur dit : regardez, levez les yeux et vous verrez le signe de votre liberté ! Signe si paradoxal, comme la croix du Christ, c’est un serpent qui leur est désigné.

Il nous faut oser voir le mal en face pour entreprendre un chemin de guérison

Ils connaissent bien leur histoire biblique : Symbole du mal par excellence, de la tentation des premiers humains d’échapper à leur humanité pour devenir des dieux, le serpent rôde autour de sa proie comme un dangereux prédateur. Alors pourquoi Dieu le leur donne-t’il à voir ? Ce serpent de bronze, c’est l’image de leur mal et de leurs peurs. Nous savons bien qu’il nous faut oser voir le mal en face pour entreprendre un chemin de guérison. Si nous cherchons à échapper à notre condition humaine en la niant nous ne pourrons pas l’affronter dans les moments difficiles. Celui qui se tournait vers ce signe était sauvé. Ne serait-ce qu’une histoire du passé ?

Je reviens à ma leçon de caté, ou plutôt à cette vraie révélation qui a marqué mon existence : nous avons besoin de voix actuelles de ces Moïses qui continuent à faire résonner en nous la voix de Dieu : levez les yeux et vous verrez le signe éblouissant d’un amour donné gratuitement et généreusement ! Se tourner vers le Christ crucifié aujourd’hui c’est ne pas fermer les yeux sur les horreurs du monde et sur toutes ces croix où des humains souffrent, mais c’est aussi chercher avec curiosité et étonnement celui qui nous apprend à devenir de vrais humains et à nous tourner vers le Fils de l’homme.
C’est là qu’il nous attend !

Fête de la Croix glorieuse
Lectures bibliques : Nombres 21, 4-9; Psaume 77; Philippiens 2, 6-11; Jean 3, 13-1

La croix surplombe le domaine skiable de Zinal | © Yves Cettaz
14 septembre 2025 | 09:36
Temps de lecture : env. 4  min.
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