Homélie du 16 novembre 2025 (Lc 21, 5-19)
Abbé Joseph Demierre – Eglise Saint-Joseph, Lausanne
Fin du monde ou changement de perspective
Les lectures de cet avant dernier dimanche de l’année liturgique nous parlent de destructions, de guerres, de désordres, de cataclysmes, de phénomènes effrayants et de persécutions. Quel sombre tableau ! C’est aussi très actuel : avec les grands moyens de communications modernes, on est au courant de tout ce qui se passe dans le monde au jour le jour. Jésus évoque tout cela.
Mais pour dire quoi ? Quel est le message qu’il veut nous adresser ?
Des évènements qui font partie de l’histoire de ce monde
Une tendance commune, c’est de voir tout cela comme des punitions de Dieu, comme le laisse entendre, souvent, l’Ancien Testament : « Voici que vient le Jour du Seigneur… Il les consumera, il ne laissera ni racine, ni branche. »
Or si Jésus évoque tous ces phénomènes, ce n’est pas pour les présenter comme des châtiments de Dieu. Ce sont des évènements, des réalités qui font partie de l’histoire de ce monde. Et ce sont, de fait, des situations auxquelles nous sommes ou pouvons être tous confrontés, dans notre propre vie ou dans l’histoire de l’humanité.
Par exemple, ce qu’ont vécu beaucoup de Vietnamiens, en son temps, avec la guerre et les boot-people. Nos frères vietnamiens qui animent cette messe peuvent en témoigner. Et de nos jours encore, beaucoup de migrants le vivent en Méditerranée. On peut penser aussi à Gaza, complètement détruite.
Journée mondiale des pauvres
Aujourd’hui, c’est le Dimanche des pauvres : on peut penser à ceux qui ont tout perdu et qui fuient ou mendient dans nos rues, ou à ces millions de personnes qui vivent dans les bidonvilles. C’est aussi ce que vivent beaucoup de malades, qui nous écoutent peut-être en ce moment, et qui luttent contre un cancer ou victimes d’un accident. C’est aussi ce que vivent beaucoup de victimes des séismes ,des inondations ou des typhons qui détruisent tout sur leur passage, aux Philippines ou dans les Caraïbes. Oui, on peut le dire, ce ne sont pas des punitions de Dieu, mais bien des phénomènes qui peuvent nous toucher, même directement. Jésus évoque tout cela : « il faut que cela arrive », dit-il.
Et comment réagissons-nous alors ? Face à ces phénomènes ou dans ces situations de détresse, nous sommes dépités et nous avons peur. Nous nous sentons désorientés, perdus, impuissants, et nous risquons de sombrer dans la révolte ou le désespoir. Certains prophètes de malheur en profitent pour nous endoctriner. L’autre jour, j’entendait une personne qui me disait : Qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour mériter cela ? Comment faire pour continuer à croire en Dieu alors qu’il y a tant de souffrances et de misères dans le monde ?
Dieu se mobilise pour venir à notre secours
Alors que nous dit Jésus ? Que nous dit l’Évangile ?
.– Il nous dit d’abord que ce n’est pas Dieu qui envoie ces malheurs. Lui-même le premier, se mobilise pour venir à notre secours. Dieu, viens à mon aide ! Seigneur à notre secours ! Et Il a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour le sauver. Le sauver de l’anéantissement. Il est le Dieu créateur, le Dieu de la Vie, non pas le Dieu de la mort ou de la force destructrice.
.– Ensuite, il nous dit : face à ce qui peut vous arriver, n’ayez pas peur ! N’allez pas perdre la tête. « Prenez garde de ne pas vous laisser égarer », par des discours mensongers. Il y a en effet des extrémistes (ou des influenceurs) qui peuvent nous induire en erreur ou nous endoctriner.
Il s’agit donc de faire preuve de discernement. Et Dieu nous donne son Esprit de sagesse pour nous éclairer et nous réorienter : « Moi-même, je vous donnerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront ni résister, ni s’opposer. » C’est aussi le travail de l’accompagnement, matériel ou spirituel, auprès des personnes ou des familles éprouvées, comme par exemple les services d’aumôneries, dans les diverses institutions.
Nous sommes invités à la foi
.– Enfin Jésus nous dit aussi comment agit Dieu ; il nous invite à la foi. Il nous dit, comme à Jaïre : « Ne crains pas, crois seulement !». La Christ est là, avec nous, qui a vécu la même chose que nous, et qui porte nos souffrances comme il a porté lui-même la croix. Et aussi : Dieu est Amour. Et l’Amour de Dieu nous rend vainqueur du mal et de la mort. Son amour est force de transformation, de vie et de renouveau en nous, au cœur de l’adversité. C’est saint Paul qui le dit : « Qui pourra nous séparer le l’amour de Dieu ? Ni la vie, ni la maladie, ni la mort, ni aucune détresse, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est en Jésus-Christ. »
Ce n’est pas une foi magique dont il est question, qui supprimerait la maladie ou la mort, mais une foi qui les transfigure : « ta foi t’a sauvé(e) ». C’est l’amour de Dieu qui soigne l’âme, qui guérit le cœur et qui réoriente la personne. C’est à une conversion de notre être intérieur et de notre façon de voir la vie et le monde que nous sommes invités. Un changement de perspective, un peu comme le prisonnier qui arrive au bout de sa peine et qui entrevoit la liberté. Ou comme, après une maladie ou un accident grave, qui a remis en cause notre pronostic vital, et qui nous fait voir la vie d’une autre façon, et l’apprécier encore plus ou plus intensément.
Jésus ne cherche pas à nous faire peur, mais à nous encourager, pour faire face, avec lui, et en communauté, aux évènements, avec foi et courage. Et il conclut : « Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. C’est pas votre persévérance que vous serez sauvés »
Forts de notre foi en Dieu et en l’homme, sachons aller au-delà des apparences et de l’immédiat, sachons accueillir les évènements de la vie, joyeux ou douloureux, comme des invitations à réfléchir plus loin que le bout de notre nez. Des invitations à grandir en humanité, en intelligence, en générosité, et à approfondir notre solidarité les uns avec les autres. Amen
33e Dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Malachie 3, 19-20; Psaume 97; 2 Thessaloniciens 3, 7-12; Luc 21, 5-19
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