Homélie du 22 décembre 2013
Prédicateur : Abbé Marc Donzé
Date : 22 décembre 2013
Lieu : Basilique Notre-Dame, Lausanne
Type : radio
« Peut-être que j’ai faim de choses nouvelles », disait un écrivain aujourd’hui bien oublié qui s’appelait Valéry Larbaud. « Peut-être que j’ai faim de choses nouvelles ». C’est une faim que j’éprouve. N’est-ce pas aussi votre cas ?
Cette faim devient particulièrement forte au temps de l’Avent et à l’approche de Noël. Car Avent = avènement ; Avent = nouveauté. Noël aussi = nouveauté. Quoi de plus neuf que la naissance d’un enfant ! Et quel enfant !
Avec vous, j’ai rêvé d’un monde nouveau, où les épées deviennent des socs de charrue et je le vois apparaître, silencieusement, dans la force du Christ qui attire toutes choses à Lui, dans l’amour et la paix. Premier dimanche de l’Avent.
Avec vous, j’ai célébré Marie, la toute pure, la toute droite, la toute accordée à Dieu, parce qu’elle est la mère du Fils de Dieu ; elle nous montre déjà la beauté d’un monde nouveau. C’était le deuxième dimanche de l’Avent et la fête de l’Immaculée Conception.
Avec vous, et en compagnie de Jean le Baptiste, j’ai vu que le renouveau commence d’en bas, ô surprise : « les aveugles voient, les boiteux marchent… et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres ». Et j’ai compris que nous sommes appelés à nous retrousser les manches en bas. Troisième dimanche de l’Avent.
Et aujourd’hui ? Avec Joseph, nous apprenons comment réagir aux choses nouvelles qui arrivent dans nos vies. Pour ce faire, nous sommes confrontés à deux attitudes très différentes : celle du roi Achaz (longtemps avant Jésus-Christ, mais hélas toujours actuel) et celle de saint Joseph.
Le roi Achaz, en Israël , menait ses affaires à sa guise, nous l’avons entendu tout à l’heure. Il régnait, il percevait des impôts, il jouait de diplomatie avec ses voisins et il guerroyait. Rien de neuf sous le soleil. Mais la nouveauté arrive sous la forme d’une menace : les rois voisins, devenus plus puissants, se mettent en mouvement pour envahir Israël. Que fait Achaz ? Rien de neuf : il fait confiance à sa diplomatie et à ses maigres troupes. Que fait Dieu ? Eh bien, il se trouve que Dieu est toujours partie prenante, quand il y a de la nouveauté. Il apporte sa part ; et sa part est toujours dans la direction de la vie, de l’amour, de la lumière, de la liberté. En l’occurrence, Dieu propose à Achaz un signe. Et ce signe, c’est la naissance d’un enfant : « Voici que la jeune fille concevra et elle enfantera un fils… ». Ce signe donc, la naissance d’un enfant sûrement royal, c’est l’assurance d’une vie qui se continue, d’une vie qui se renouvelle ; le contraire exact des menaces de guerre, d’envahissement et de mort.
Et Achaz refuse le signe. Il est dans le déni des menaces de guerre. Il veut rester dans le connu de ses diplomaties. En d’autres termes, il ne veut pas voir la nouveauté des faits. Et du même coup, il ne veut rien savoir de Dieu, de ses propositions, de son engagement, pour que l’événement nouveau puisse se transformer en événement de vie et d’espérance. Achaz n’a pas faim de choses nouvelles ; il ne veut pas avoir faim ; il se bouche les yeux et les oreilles, en particulier devant Dieu. Comme ont pu dire des chansonniers : Notre Père qui êtes aux cieux, restez-y…. ne venez surtout pas mettre du dérangement dans nos petites vies.
Tout autre est l’attitude de Joseph. La nouveauté arrive dans sa vie d’une façon assez inouïe. Marie, sa fiancée, est devenue enceinte, avant qu’ils aient habité ensemble. Joseph a dû être plongé dans un abîme de questions, de perplexités ; on le serait à moins. Je peux présumer qu’en homme droit, juste et pieux, il a remis ses questions entre les mains de Dieu. « Seigneur, je n’y comprends rien ; éclaire-moi ». Et Dieu va y mettre du sien. Par l’ange messager, il indique à Joseph ce qu’il peut faire : N’aie pas peur ; ce qui est en Marie vient de moi (sous-entendu, ce n’est pas quelque chose de tordu ; c’est tout pur, c’est tout clair). Et Joseph, en toute discrétion, mais avec grandeur d’âme, accueille Marie chez lui. La nouveauté ne sera pas toujours facile : voyage à Bethléem, naissance de Jésus sur la paille, fuite en Egypte, retour à Nazareth. Mais quel chemin porté par la vie, par la promesse de vie, par le don de l’amour.
Dès lors se pose la question pour nous : comment accueillons-nous les choses nouvelles ? et, d’abord, avons-nous faim, peut-être, de choses nouvelles ? ce qui revient à dire : sommes-nous disponibles aux appels nouveaux que la vie, peut-être, nous fait ?
Quoi qu’il en soit, il est inévitable que des choses nouvelles arrivent dans nos vies. Cela fait partie du dynamisme et de la variété de la vie. Elles sont parfois bonnes : rencontres, naissances, succès, chances ; elles sont parfois difficiles : maladies, échecs, deuils, guerres, échecs. Dans ces choses nouvelles, Dieu est avec nous, toujours. Mais attention : il est toujours avec nous dans le sens de la vie, de l’amour, de la lumière, de la grandeur d’âme. Toujours. Sa voix, au milieu des choses nouvelles, met en perspective la possibilité d’amour et de vie. Comme pour le roi Achaz à qui Dieu propose un chemin de vie et de confiance à travers la naissance d’un enfant. Comme pour Joseph à qui Dieu suggère de prendre Marie chez lui et d’inventer un chemin hors de l’ordinaire.
L’enjeu pour nous est dans la réponse. Est-ce que j’accueille les choses nouvelles, en intégrant la part de vie que Dieu y met, la petite lanterne que Dieu y infiltre, quand c’est particulièrement difficile ? ou est-ce que je n’accueille pas, préférant rester dans mon quant-à-moi, même branlant ? est-ce que je vais ressembler au roi Achaz, ou à saint Joseph ? au roi Hérode ou aux bergers de Noël ?
Que le Seigneur nous donne de discerner et d’accueillir ses chemins créatifs et vivants, au milieu des nouveautés qui nous surviennent ! c’est mon vœu pour ce jour et pour Noël. Amen.»
4e dimanche de l’Avent
Lectures bibliques : Isaïe 7, 10-16, Psaume 23, 1-2.3-4ab.5-6; Romains 1, 1-7; Matthieu 1, 18-24
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