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Homélie

Homélie du 23 Juillet 2023 (Mt 13, 24-43)

Chanoine Jean-Michel Lonfat – Hospice du Grand-Saint-Bernard

Frères et sœurs, chers auditeurs, oui rendons grâce pour cet homme de la parabole : le semeur.
Son travail, sa mission est de semer et de semer du bon grain dans son champ. Le chapitre 13 de l’évangile selon saint Matthieu développe cette thématique de la semence, plus précisément de la croissance de la semence et de la plante, mais aussi nous pouvons  deviner en arrière-plan, celle de l’homme, celle de l’humanité qui avance au cours de l’histoire vers sa destinée. Saint Matthieu nous dit aussi à travers ces récits la vie même de Jésus.

Quelle joie, quel plaisir pour lui de savoir que ce qu’il fait là, maintenant, en semant le bon grain, son champ produira le froment. Il le sait, il connaît son travail. Il sait aussi qu’il n’est pas seul à travailler pour que tout aille bien. Il a des partenaires de grandes efficacités, l’eau, le vent, le soleil.
Il sait aussi que son champ est préparé pour la semence, un immense travail est déjà fait avant même de voir pousser son blé. La confiance est belle et grande pour lui. Sa joie d’imaginer la récolte habite son cœur et sa vie.
Il sait qu’une fois la semence jetée en terre il doit attendre. Il ne pourra que constater avec étonnement la puissance de la vie qui va apparaître à ses yeux.

Une bonne nouvelle

Le Royaume des Cieux, nous dit l’Evangile de ce jour, est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Voilà la bonne nouvelle et il faut s’en réjouir.

Tout se passe bien jusque à l’arrivée pendant la nuit ..de l’ennemi. C’est souvent comme cela, non seulement pour cet homme et son travail décrit dans la parabole, mais pour tout homme, pour la vie en général surtout lorsque nous essayons de construire le Royaume.

Le contraste est si marqué entre l’activité paisible du jour et l’arrivée soudaine de celle, nocturne, destructrice. Disons plutôt sournoise ; sans bruit, sans être vue, cette activité de semer l’ivraie consiste bien à jeter par-dessus le bon blé et partout dans le champ la semence destructrice.
Elle s’enracine dans la terre et vient s’enchevêtrer avec les racines du bon blé. L’ivraie est une plante de la famille des graminées et ressemble étrangement au blé ; oui, on peut les confondre d’où la crainte de les arracher ensemble.
Remarquons aussi que le fait de semer cette ivraie (anciennement appelée «zizanie») a engendré l’expression qui nous a été transmise « semer la zizanie»  lorsque nous nous trouvons dans des situations conflictuelles où l’ennemi travaille à nos côtés.

Nous pouvons constater à plusieurs reprises dans la vie de Jésus et de ses apôtres qu’il y a une confrontation presque violente des disciples lorsqu’ils voient que certains ne font pas ce que demande le Seigneur. Saint Luc au chapitre 9 de son évangile montre bien que Jacques et Jean déjà avaient voulu commander au feu du ciel de consumer les samaritains inhospitaliers.

La parabole de l’ivraie suppose une tentative identique : « Veux-tu que nous allions l’enlever ?» disent les disciples au Maître. – Non, dit Jésus, de peur qu’en enlevant l’ivraie, vous arrachiez le blé.

Si l’on regarde bien, c’est le salut du bon grain, plus que tout, qui préoccupe le Maître du champ. Il s’oppose à l’initiative de ses serviteurs parce qu’il veut donner toutes ses chances au froment. Les serviteurs sont frappés par l’abondance de l’ivraie. Le maître, lui, par les promesses du bon grain.

La patience de Dieu envers nous

Cette parabole, frères et sœurs, chers auditeurs, doit nous rendre attentifs à la patience que Dieu a envers nous. Rien n’est perdu pour Dieu. Rien n’est perdu pour l’homme.

Elle peut nous dire aussi de prendre patience entre nous lorsqu’il y a des différends.

Alors que nous serions tentés de couper court ou d’éliminer ce qui qui pourrait nous nuire, l’invitation est plutôt celle d’observer une saine relation et de patienter pour une meilleure collaboration.

Nos vies ne sont-elles pas semblables à ce champ où les bons et les mauvais, comme le blé et ivraie sont contraints de pousser ensemble ? Il y a une telle puissance de vie en nous qu’il serait dommage de la casser, de la briser si nous décidions subitement et rapidement d’arracher le mauvais. Notre propre équilibre pourrait être mis à parti.

La parabole nous invite donc à la patience des agriculteurs et des jardiniers. Laissons le temps faire son travail pour que maturité se fasse en nous. Laissons le blé se fortifier en nous pour qu’il ne soit plus mis en danger par l’ivraie. Laissons-nous aimer et regarder par le Semeur qui veut notre bien afin que tout notre être atteigne une telle stature, celle qui est semblable au Christ et qui est bien plus forte que les laideurs qui nous habitent.

Gardons confiance et osons miser sur le Christ ressuscité, il sera plus fort que toutes les puissances nuisibles et destructrices qui œuvrent en nous. Même la mort n’aura pas le dessus ; elle sera dominée. A vous tous ici sur la montagne, à vous qui êtes dans cette église si belle dont les fresques nous élèvent encore plus haut et à vous qui nous écoutez en plaine ou ailleurs, sachez que, même s’il n’y a pas de champ de blé à cette altitude, il y a la Grâce de Dieu qui généreusement nous atteint tous et fait de nous la moisson que Dieu aime et chérit avec patience, beaucoup de patience.  AMEN

16e dimanche du Temps ordinaire
Lectures bibliques :
Sagesse 12, 13-16 ; Psaume 85 ; Romains 8, 26-27; Matthieu 13, 24-43

© Berna – Evangile & peinture
23 juillet 2023 | 09:35
Temps de lecture : env. 4  min.
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