Homélie du 26 octobre 2014
Prédicateur : Père Jean-Claude Pariat
Date : 26 octobre 2014
Lieu : Ecole des Missions, St-Gingolph
Type : radio
« Soyez dans la joie, vous qui cherchez Dieu ».
« Joie dans sa vie! » C’est le désir de nous tous. Avons-nous rencontré des personnes qui nous ont donné de la joie, cette joie à la fois discrète et pacifiante ? Comment se procurer la joie de vivre ? Où trouver cette « joie » ?
Le Pape François témoigne de cette joie de l’Evangile. Il nous interpelle car nombreux sont des chrétiens « ressemblant à un carême sans Pâques ». Peut-on vivre de l’Amour de Dieu et pratiquer l’amour du prochain sans goûter au don de la joie ?
La joie de l’Evangile, c’est la joie de Jésus-Christ. Il la donne généreusement à toutes les personnes qui la désirent : « Que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite » (Jn 15,11)
Dernièrement, nous recevions une encyclique du Pape François : « La joie de l’Evangile». Mettons en contraste cette joie avec les romans de trois écrivains : en 1936, Jean Giono publie ce roman : «Que ma joie demeure’ ». En 1954, une écrivaine âgée de 17 ans, Françoise Sagan, publie son premier roman : « Bonjour Tristesse ». Enfin en 1985, Dominique Lapierre publie: « La Cité de la joie ». Trois romanciers en quête de vie, en quête de joie. Trois contextes sociaux troublés et mortifiants. Pour Françoise Sagan, c’est la présence d’une tristesse sociale accablante, sans joie véritable, triste à en mourir ; Giono et Lapierre décrivent une étonnante présence de la joie, l’un dans la vie d’un paysan de Haute Provence, et l’autre dans un bidonville de Calcutta. Chaque romancier a laissé parler l’inspiration de son cœur, son intériorité à partir d’événements historiques.
La joie de l’Evangile invite tous les fidèles à se détacher des tristesses pour chercher et s’attacher à la joie. Au revoir tristesse, bonjour la joie !
Aucun apport mondain, aucun discours séducteur ne donnent vraiment de la joie. Nous sentons quelle est précieuse sans que nous soyons capables d’allumer son feu. Cette joie ne s’achète pas. Ne la cherchons pas à l’extérieur de nous-même mais à l’intérieur de soi. C’est un trésor enfoui dans notre cœur. Ce trésor m’appelle à le reconnaître. Il m’appelle à le faire mûrir. Car la joie reçue peut sculpter ma vie. Je deviens sculpteur de ma vie. C’est un travail quotidien et permanent trouvant sa force dans la méditation de la Bonne Nouvelle, la joie de l’Evangile. C’est un travail d’intériorisation. La commercialisation de faux-bonheur ou de fausses croyances paralysent la croissance de cette joie intérieure, intime, spirituelle.
Une parabole pourrait illustrer ce travail de la joie de l’Evangile.
Imaginons un village de montagne habité par des familles vivant de leur élevage de moutons. L’aménagement du village est harmonieux sauf ce rocher au centre de la rue du village. Il sort du sol. Il est plus petit qu’une voiture ›Smart’ sans toit. Il impose son contournement. Les responsables locaux décident un jour de le supprimer. Alors, intervient le tailleur de pierre du village voisin. Il leur propose de sculpter le rocher pour en faire un petit monument qui honorerait les villageois et leurs hôtes. Accueillant cette proposition, ils laissent le tailleur réaliser une œuvre. Une tenture de protection est mise autour du rocher. Et le sculpteur commence son travail. Pendant des semaines, les villageois entendent les coups de marteau sur le burin. Un garçon s’intéresse au travail du sculpteur et lui demande : qu’est-ce que tu veux faire de ce rocher ? Il lui répond : je ne sais pas encore exactement, mais chaque jour, je découvre ce que deviendra ce rocher.
Les coups de marteau continuent à résonner dans le village. Parfois la frappe est forte ; d’autres fois, plus douce. Enfin, le sculpteur achève son œuvre. La tenture fut enlevée. Les villageois, éleveurs de moutons, découvrent un chef d’œuvre : le rocher est devenu une brebis allaitant son agneau. Tous sont dans l’admiration. Le garçon s’approche à nouveau de l’artiste et lui demande : Comment savais-tu qu’il y avait une brebis et son agneau à l’intérieur du rocher ?
Comment savons-nous qu’il y a la présence de la joie de Dieu dans l’intime de notre vie ?
Le rocher, c’est la vie de chacun d’entre nous. C’est l’image que le miroir nous reflète, ce corps visible, assoiffé de besoins et de désirs, vibrant d’affections et d’émotions.
Le rocher brut, c’est mon cœur de pierre, mon cœur de Carême. Sans référence à l’amour de Dieu. Je ne sais pas encore qu’il peut grandir en un cœur de chair, un cœur de Pâques.
Les villageois cherchent l’embellissement de leur village, un embellissement extérieur à leur vie intime.
Le garçon, c’est vous, c’est moi, face à mon cœur de pierre, ignorant ce qu’il contient.
Le sculpteur, c’est vous, c’est moi. L’inspiration lui est donnée par l’Esprit-Saint. Il se laisse guider par elle ; il la travaille et découvre patiemment la joie intime qui l’habite, cet embellissement intérieur de sa vie.
Les épreuves vécues sont les coups de marteau répétés qui taillent le rocher en éliminant ce qui cache le trésor. Ce travail élimine les multiples artifices mondains qui défigurent la dignité humaine. Je deviens responsable de l’image de ma vie. Je sculpte la joie de ma vie en me détachant du paraître mondain fait d’artifices, de faux bien-être, de fausses beautés, de piercings, de tatou.
Ce travail spirituel de la joie de l’Evangile humanise le cœur. En laissant l’Evangile buriner notre cœur de pierre, le Christ ressuscité ouvre le chemin de l’amour. Il nous introduit dans la joie de Dieu. Empreint de cette joie, nous traversons la tristesse décrite par Sagan, la peste de Giono ou la vie du bidonville de Lapierre. Par l’accueil de cette joie de l’Evangile, l’amour de Dieu et du prochain devient actif.»
30e dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Exode 22, 20-26; Psaume 17; 1 Thessaloniciens 1, 5c-10; Matthieu 22, 34-40
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