Jésus guérit l'aveugle-né/©evangile-et-peinture.org
Homélie

Homélie du 27 octobre 2024 (Mc 10, 46-52)

Marc-Olivier Girard, diacre – Eglise Saint-Joseph, Lausanne


« Dans l’abîme de mes souffrances… je n’ai jamais cessé d’aimer chacun, je n’ai exclu personne de mon cœur », disait le Cardinal François-Xavier Van Thuân. Cet homme fut emprisonné 13 ans par les autorités communistes du Vietnam. Malgré toutes les souffrances endurées, au soir de sa vie, le Cardinal affirmait encore son amour pour chacun : « je pars avec sérénité, disait-il, et je n’éprouve de haine pour personne ». Nous pouvons en être certain, Mgr Van Thuân marchait de près sur les traces du Christ. Oui, car Jésus n’exclut personne. Au contraire, il attire tout à lui. Il attire, et il guérit.

Le Seigneur nous attire tous à lui


Le Seigneur nous fait tous revenir à lui. Tous ! Nous l’avons entendu dans la bouche du prophète Jérémie : il attire l’aveugle et le boiteux, la femme enceinte comme la jeune accouchée. Des confins de la terre, tous seront réunis dans la louange pour la plus grande gloire de Dieu.
Jésus vient accomplir cette promesse lorsqu’il guérit l’aveugle Bartimée mendiant au bord du chemin. Malgré la foule qui entoure, presse et veut emporter Jésus, le Sauveur s’arrête. Il y a un aveugle sur le bord du chemin : il implore la guérison, et Jésus guérit. En guérissant Bartimée, c’est en fait toute cette foule des pécheurs que Jésus guérit de son aveuglement, de son emportement.

Confiance, il t’appelle !


Arrêtons-nous encore sur l’Évangile.
Bartimée appelle le Fils de David, mais il se fait rabrouer par la foule. Jésus, lui, s’arrête. Quel contraste avec l’égoïsme de la foule en marche. Jésus, lui, a le temps. Il entend le cri de Bartimée, il se soucie de sa détresse. La supplication de l’aveugle mendiant touche son cœur de pasteur. C’était pour souffrir sa Passion que Jésus montait à Jérusalem, mais Jésus offre toute son attention à Bartimée. Il s’arrête et le fait appeler.
Jésus, la foule… quel contraste, oui ! Mais à présent, quel retournement ! Les disciples et la foule relayent l’appel. Ils offrent à l’aveugle mendiant cet encouragement enthousiaste : Confiance, lève-toi, il t’appelle. Confiance. Souvenez-vous : c’est le même mot que Jésus adressait à ses disciples apeurés qui le confondaient avec un fantôme tandis qu’il marchait sur les eaux. Lève-toi : c’est le vocabulaire par excellence de la guérison et de la résurrection. Il t’appelle. Oui, Jésus appelle Bartimée comme il a appelé les Douze pour leur enseigner à être les serviteurs de tous. En fait, Jésus n’appelle pas seulement Bartimée : Jésus permet aux disciples et à la foule d’ouvrir également leur cœur à son exemple. Confiance, lève-toi, il t’appelle, ces mots scellent la réconciliation de la foule avec l’aveugle. Ces paroles du Christ deviennent les vôtres, celles de la communauté chrétienne. Chers frères et sœurs, le Christ nous rend capables de nous réconcilier, de vivre ensemble et d’être uni, d’évangéliser. Voilà en quoi consiste le mystère de l’Église ! Voilà l’image prophétique du peuple saint qui loue les merveilles de Dieu annoncé par le prophète Jérémie !

La communauté des croyants naît du côté transpercé du Christ


La communauté des croyants naît du côté transpercé du Christ, de son cœur d’où a jailli le sang et l’eau. C’est ce cœur qui a aimé Bartimée. C’est par ce même cœur que la foule aveuglée s’est réconciliée avec Bartimée. C’est à travers ce même cœur que nous sommes appelés à embrasser tout le genre humain. Faisons nôtre la question du Christ à Bartimée : que veux-tu que je fasse pour toi ? Elle résume à merveille l’idéal de notre vie chrétienne. Bartimée, lui, s’est senti tellement aimé qu’il est devenu un disciple de Jésus. Pour preuve, lorsque le Christ lui dit va, ta foi t’a sauvé, Bartimée se met à le suivre parce que, pour lui, aller signifie suivre le Christ.

Jésus va souffrir sa Passion, et pourtant il arrête une foule hostile pour un aveugle rejeté. Il va accomplir le mystère de la rédemption de toute l’humanité, et pourtant, il offre toute son attention à un marginal. Mais ce qui est extraordinaire, c’est que sa sollicitude pour la foule n’est pas amoindrie ; dans la guérison de Bartimée, la foule trouve son propre salut.

J’ai commencé cette homélie en citant le Cardinal Van Thuân parce que sa vie illustre bien cela. Jeté en prison, il garde toute sa sollicitude d’évêque pour son peuple. Au milieu de l’épreuve, il n’oublie pas son troupeau. Il offre le témoignage d’un cœur qui aime jusqu’au bout ; son cœur est comme celui du Christ. Il attire à lui même ses geôliers. Comme la foule qui fait bloc autour de Jésus, ces gardiens ont le cœur obscurci, endurci, aveuglé. Et pourtant, au contact de Mgr Van Thuân, ils rencontrent Jésus, ils sont touchés, ils sont illuminés. Le Cardinal Van Thuân rayonnait le pouvoir d’attraction de Jésus. En prison, il portait sur lui nuit et jour une petite hostie consacrée. Le Cardinal Van Thuân était si proche du Christ qu’il est allé jusqu’à convertir le cœur de ses gardiens. Ils sont devenus ses amis. Ils l’ont aidé en cachette à fabriquer une croix avec un morceau de bois et du fil électrique. Mgr Van Thuân a toujours porté cette croix autour du cou. Elle lui rappelait l’amour et l’unité donnés par le Christ à tous et en toute circonstance.

Dans la célébration de cette Eucharistie, Jésus vient nous guérir de nos aveuglements. Il vient élargir notre cœur pour le diriger vers toute l’humanité souffrante. Chers frères et sœurs, dans votre cœur résonne une parole, un cri, un appel. C’est Bartimée, c’est la foule, ce sont les disciples, ce sont Mgr Van Thuân et tous les saints du Ciel qui s’exclament : Confiance, lève-toi, il t’appelle.

30e dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Jérémie 31, 7-9; Psaume 125; Hébreux 5, 1-6; Marc 10, 46-52

Jésus guérit l'aveugle-né/©evangile-et-peinture.org
27 octobre 2024 | 09:35
Temps de lecture : env. 4  min.
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