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Homélie

Homélie du 5 décembre 2021 (Lc 3, 1-6)

Chanoine Claude Ducarroz – Cathédrale de Fribourg

Ouf ! Enfin quelqu’un qui nous donne la main et nous propose un programme dynamique, pour aller de l’avant dans notre vie et la vie du monde ! Voilà qui nous change des jérémiades de l’impuissance et de la rancœur.

Mais attention ! L’ami qui nous veut du bien est un peu spécial, et même plutôt marginal. On le décrit ailleurs comme vêtu de poils de chameau, un pagne de peau autour des reins et, pour compléter le menu, friand de sauterelles et de miel sauvage.

Voilà qui peut rendre sympathique, à certains et certaines d’entre vous, ce prophète très écologique. Mais je conseille surtout d’écouter attentivement son message et de mettre en pratique, au moins en partie, ses précieuses recommandations.

Jean-Baptiste n’est pas à son compte, comme s’il devait faire du chiffre avec ses disciples regroupés en fan club. Il est envoyé par un autre, bien plus grand que lui, et il prépare justement la venue de cet autre dans la conscience et le cœur des gens. C’est pourquoi on l’appelle le précurseur.

Jésus le Christ, l’un de nous mais venu entièrement de Dieu

 Alors, qui sera là dans la rencontre décisive qu’il annonce et prépare ? Le texte dit : « Tout être verra le salut de Dieu ».

 En réalité c’est encore mieux que cela. Plus que le salut : le sauveur Jésus le Christ, un sauveur en personne, à la fois totalement divin et pleinement humain, l’un de nous mais venu entièrement de Dieu. Oui, pour nous sauver à 100%, tels que nous sommes, mélange improbable et merveilleux de corps, de cœur, d’esprit. Tout de nous, tout nous.

Sauver, salut ! Pouvons-nous encore prononcer ces mots étranges, devenus presque étrangers à notre culture ? Bien sûr, chacun de nous voudrait être sauvé de quelque chose, tant il y a une distance, parfois insurmontable, entre ce que nous souhaitons pour nous-mêmes et pour les autres, et ce que nous éprouvons concrètement dans les évènements qui nous réjouissent, mais aussi souvent nous blessent et même nous désespèrent.

De la demande, il y a. Mais de là à imaginer une réponse qui vienne d’ailleurs que de nous-mêmes, par un autre qui nous l’offrirait, même gratuitement : c’est une autre histoire.

Je crois que notre société, le plus souvent, nous renvoie au salut par nous-mêmes en ce monde, ou alors elle nous incite à assumer, plus ou moins vaillamment, le non-sens de l’échec total et final de notre humanité sans dieu.

On cherche encore des Jean-Baptiste

Cependant, il y a mieux. Aujourd’hui comme hier, au point où nous en sommes de nos vies mortelles, nous pouvons encore attendre le meilleur, mais en collaborant à en préparer la venue.

En somme, on cherche encore des Jean-Baptiste.

Chacun dans sa vie personnelle, mais aussi dans ses relations sociales, et jusque dans la construction d’un vaste dessein collectif. Oui, une humanité en route pour le Royaume de Dieu, mais aussi une humaine convivialité ici-bas, enfin fraternelle, comme Dieu la veut pour nous, mais pas sans nous, puisque nous sommes tous des invités de choix au festin de la liberté.

Quand on a un peu compris le projet de Dieu pour ses enfants -que nous sommes-, quand on a écouté l’évangile de l’amour vainqueur, tel que Jésus de Nazareth l’a proposé et le propose encore par son l’Eglise, alors on entre, tantôt avec enthousiasme tantôt avec courage, dans le programme de Jean-Baptiste.

Un certain bonheur

Et ça peut même devenir un certain bonheur :                          
*rendre plus droits les sentiers de nos relations avec les autres, déjà en famille,                                                                                
*combler les ravins de méfiance ou de préjugés à l’égard d’autres humains qui ont seulement le tort de ne pas être, penser ou vivre comme nous,                                                                               
*redresser les passages tortueux de nos réactions épidermiques qui peuvent tellement blesser,                                                       
*aplanir les chemins rocailleux qui risquent de faire tomber les plus faibles ou les plus sensibles.

Et tout cela, grâce à une nouvelle manière -plus divine et donc plus humaine-, de voir et de vivre nos avoirs, nos savoirs, nos pouvoirs, notre sexualité, notre relation à la création elle-même.

Jean-Baptiste ne craint pas d’appeler cela d’un nom qui peut rendre perplexes : des conversions.

 Une chose est certaine : il ne s’agit pas de goger dans une petite morale bien-pensante. Non. C’est le beau labeur de celui ou celle qui veut préparer le retour du Christ en notre monde, tout en appréciant de pouvoir vivre déjà en symbiose avec lui, par exemple
*en écoutant sa parole,
*en accueillant ses signes sacramentels,
*en participant à la vie de l’Eglise,
* en soulevant la pâte humaine par des levains de justice, de solidarité et de paix.

La morale, c’est seulement se préparer à mieux aimer, un peu comme Dieu nous aime.
Et ça, c’est plus que de la simple morale. C’est une communion de vie, c’est Noël avant l’heure, c’est déjà un rayon de la Pâque éternelle vers laquelle nous marchons, même en boitant.

2e DIMANCHE DE L’AVENT
Lectures bibliques : Baruch 5, 1-9; Psaume 125, 1-2ab.2cd-3.4-5.6; Philippiens 1, 4-6.8-11; Luc 3, 1-6

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5 décembre 2021 | 09:35
Temps de lecture: env. 4 min.
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