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Homélie

Homélie du 28 novembre 2021 (Lc 21,25-36)

Chanoine Claude Ducarroz – Cathédrale de Fribourg

Bonjour l’ambiance ! On croirait lire l’un de nos quotidiens romands, à l’heure d’une nouvelle vague du Covid, des désastres liées au réchauffement climatique ou de la crise des réfugiés en détresse.

 Les ressemblances sont frappantes, et les différences anecdotiques. Jugez plutôt : des signes dans le ciel, des peuples affolés, des gens qui meurent dans la peur. Et nous sommes avertis : tous les habitants de la terre sont impliqués dans ce grand cataclysme.

C’est ça, une bonne nouvelle ? me direz-vous. C’est donc ça, votre évangile ? Et bientôt, vous oserez encore chanter : « Gloire à Dieu dans le ciel, paix sur la terre aux hommes que Dieu aime ».

Inutile de botter en touche…mystique. Il nous faut bien reconnaître les contextes dramatiques dans lesquels notre humanité creuse actuellement son destin sur les chemins de l’histoire. Même si, pour être vraiment réalistes, il nous faut aussi recueillir avec reconnaissance les dividendes de nombreux progrès scientifiques, écologiques, économiques, politiques et humanitaires.

Il ne s’agit pas de tomber dans le puits sans fond d’un catastrophisme fatal. Ni de nier la part de responsabilité que nous devons tous assumer dans les heurs et malheurs que nous subissons ou déplorons. Il y a aussi beaucoup d’humain dans ce qui ne va pas !

Le christianisme : l’opium d’un peuple ?

Jusques là, rien de bien nouveau sous notre soleil, ou dans nos brouillards tenaces. Et la question revient en force :  le christianisme ne serait-il que l’opium d’un peuple qui chercherait dans la religion de quoi se consoler à bon compte ou, pire encore, s’endormir éternellement dans une mort annoncée ?

Alors là, je vous invite à une lecture plus attentive. Lisez peut-être entre les lignes, et vous aurez enfin l’entier du message de Jésus.

Certes, comme le font remarquer les spécialistes, le style est bel et bien apocalyptique, avec des expressions connues dans la culture juive, qui insiste sur les calamités cosmiques et écologiques. Mais portons nos regards sur ce fameux Fils de l’homme, qui est le personnage principal de cette mise en scène plutôt sombre.

Tenir debout devant le Fils de l’homme

Le Fils de l’homme vient ou plutôt revient. Il est en route, il est proche, à notre porte. Il vient avec puissance et grande gloire. Pas pour condamner ou anéantir, mais pour nous permettre de nous redresser et de relever la tête. Grâce à lui, nous échapperons au pire et nous pourrons enfin tenir debout devant sa face.

On le sent bien : l’évangéliste Luc joue sur deux tableaux, et nous sommes en chemin inconfortable entre deux réalités, entre un déjà et un pas encore.

 Le déjà est acquis, une fois pour toutes ; c’est la résurrection de Jésus, la victoire définitive du Christ sur la mort et tout autre mal, dans la lumière encore discrète de sa pâque.

Et le pas encore, c’est la promesse certaine que nous allons tous, nous les humains et le cosmos avec nous, partager cette victoire et nous relever devant le ressuscité dans sa gloire qui deviendra aussi la nôtre.

A cause de la Pâque de Jésus de Nazareth, et grâce à son ADN pascal qu’il a inoculé en nous, notamment par le baptême, notre avenir n’est pas dans le triomphe de la mort et de tout ce qui lui ressemble ou y conduit, mais dans la grâce d’une vie qu’on peut espérer heureuse et éternelle. Puisque nous serons avec Jésus, là où il se trouve dans la gloire de son Père et notre Père.

Je vous vois venir : tout ça, c’est bien joli, mais c’est pour plus tard, demain et même après demain, une pure espérance. En attendant, là où nous sommes, tels que nous sommes, qu’est-ce qu’on fait, qui puisse nous mener sans trop de tracas jusqu’au seuil de cette éternité bienheureuse ?

Vous aurez noté que cet évangile nous dit aussi ce qu’il ne faut surtout pas faire : s’alourdir dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie, ce qui est faire preuve de réalisme, y compris par nos temps qui courent.

 La société de consommation, avec ses tentacules, n’est jamais très loin, aujourd’hui comme jadis.

Pour rester debout : veiller et prier

 Mais insistons plutôt sur des attitudes plus positives. Deux petits mots suffisent pour exorciser la peur et nous permettre de rester debout : veiller et prier.

Rester éveillé, autrement dit, en attendant le retour du Christ, être ou redevenir des humains qui assument vaillamment leurs responsabilités à l’égard d’eux-mêmes et au service des autres, à commencer par les plus fragiles, douloureux, désemparés ou exclus. Des woke, des réveillés évangéliques !

Et prier, c’est-à-dire retrouver la paix du silence intérieur, la remise de nos vies dans les mains de Dieu et la contemplation pleine de louange pour tout ce que le Seigneur nous donne déjà, à nous qui sommes si souvent des privilégiés, sans même le reconnaître.

Programme d’avent, peut-être à rebours de ce qu’on cherche ou cherchera à nous vendre pour nous gaver, voire flatter notre égoïsme consommateur ou entretenir notre indifférence si commode.

C’est l’Avent, nous marchons vers Noël. Donc allumons déjà des étoiles d’espérance et de solidarité.

1er DIMANCHE DE L’AVENT (année C)
Lectures bibliques : Jérémie 33, 14-16; Psaume 24, 4-5ab, 8-9, 10.14; Thessaloniciens 3, 12–4, 2; Luc 21, 25-28.34-36

bougie, flamme, lumière, cierge | © Maurice Page
28 novembre 2021 | 09:39
Temps de lecture: env. 4 min.
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