Homélie du 30 juin 2013
Prédicateur : Eric Monneron, diacre
Date : 30 juin 2013
Lieu : Chapelle Saint-Michel, Begnins
Type : radio
Voici donc un Evangile surprenant, voire même choquant. D’habitude, lorsque Luc évoque Jésus, il nous le montre, la plupart du temps, comme un homme qui parle et agit en témoin de la miséricorde.
Or voilà, qu’aujourd’hui, Luc nous rapporte trois dialogues caractérisés par une certaine concision dans les répliques du Seigneur. On pourrait même y voir une certaine dureté.
Pourquoi donc une telle attitude de la part de Jésus ? Pourquoi donc une pareille dureté ?
Pour répondre à cette question, il faut peut-être envisager la première phrase de cet extrait d’Evangile : « Comme le temps approchait où Jésus allait être enlevé de ce monde, il prit avec courage la route de Jérusalem ».
Voici donc le début de la dernière et ultime étape, étape décisive, de la vie de Jésus.
Il quitte la Galilée qui lui a été si propice et il s’engage sur le chemin de la Judée en direction de la capitale, Jérusalem. Et c’est dans cette cité qu’il livrera la grande bataille qui le confrontera à ses ennemis.
Et vous l’avez peut-être remarqué, Luc dit que c’est avec courage qu’il prend la route. Le texte nous dit littéralement qu’il « durcit son visage ».
Durcir son visage, dans le cas de Jésus, cela signifie qu’il rassemble toute son énergie pour surmonter sa peur, afin d’accomplir ce qu’il doit accomplir.
A ce moment-là, on peut considérer que Jésus commence son agonie : il entre en lutte, d’abord avec lui-même, mais il entre en lutte aussi avec Satan dans un combat qui, nous le savons, sera triomphal et permettra d’assurer le règne définitif de l’amour miséricordieux du Père.
L’heure est arrivée où il va accomplir le plan divin, où il va se donner complètement, faisant preuve du plus grand amour en souffrant et mourant sur une croix, et cela pour le salut de tous les hommes.
Le moment est donc grave et c’est donc sur un ton d’une très grande gravité qu’il va s’entretenir avec ces trois hommes qui sont disposés à la suivre.
A noter ici que les disciples de Jésus, Jacques et Jean, ont également besoin d’entendre les propos percutants de Jésus, eux qui sont furieux devant le refus des Samaritains d’accueillir leur Maître. Ils sont prêts d’ailleurs à leur envoyer la destruction par le feu tombant du ciel. Voilà, vous en conviendrez, une attitude fort peu évangélique.
Et oui : tout au long de l’histoire humaine – et cela continue hélas ! – on a tellement cherché à détruire et à exterminer…
A la lecture de ce morceau d’Evangile, nous nous trouvons à un moment quasi historique, et cela peut expliquer l’attitude de Jésus à l’égard de ces trois personnages.
Si vous voulez me suivre, leur dit-il, il ne faut pas vous faire d’illusions : il faut me préférer à tout autre, il faut adhérer totalement et inconditionnellement à ma personne et à mon message.
Et c’est ainsi que Luc veut nous faire comprendre très fort les exigences qui sont au cœur du message.
Reprenons attentivement chacune des déclarations prononcées par le Christ, en considérant qu’elles sont la Bonne Nouvelle qui nous est adressée, une Bonne Nouvelle qui est celle de l’indépendance, de la vie renouvelée et de notre propre consécration au Royaume de Dieu que nous avons mission de bâtir.
La Bonne Nouvelle de l’indépendance se trouve dans la métaphore des renards et des oiseaux : « Les renards ont des tanières, affirme Jésus, les oiseaux du ciel ont des nids, mais le Fils de l’Homme n’a pas d’endroit où reposer sa tête ».
Nous ne pouvons suivre Jésus si nous voulons auparavant programmer notre destin. Pour suivre Jésus, il faut être entièrement disponible.
Mais il faut le reconnaître : c’est très difficile, car, jaloux de notre indépendance, nous voulons être en quelque sorte « le seul maître à bord », même si nous sommes de bonne volonté pour suivre Jésus.
Oui, c’est bien difficile d’intégrer notre propre indépendance dans celle du Seigneur, d’accepter, en quelque sorte de lui signer un chèque en blanc.
La Bonne Nouvelle de la vie renouvelée, nous la trouvons dans les propos que Jésus adresse à son deuxième interlocuteur : « Laisse les morts enterrer leurs morts. »
Entendons-nous bien : Jésus n’a pas l’intention de supprimer le commandement qui nous enjoint de donner une digne sépulture à nos défunts.
Mais il veut que nous regardions au-delà de l’humain; il veut que nous nous situions dans un autre ordre qui est celui du surnaturel, c’est-à-dire du spirituel.
Pour lui, celui qui ne veut pas entrer dans cet ordre est un mort. « Laisse les morts enterrer leurs morts ». C’est-à-dire : Laisse ceux qui ne peuvent dépasser l’ordre matériel , qui ne peuvent pas se lier à moi, enterrer leurs défunts.
En nous attachant au Christ, nous naissons à une vie nouvelle, à une vie surnaturelle, spirituelle, une vie qui doit s’enrichir chaque jour davantage.
Voilà ce que Jésus souligne : il n’y a pas d’obligation humaine à prioriser si on veut s’attacher à Lui. « Je suis la Vie », nous dit-il. « Je suis venu pour que vous l’ayez, et que vous l’ayez en surabondance. »
Et voici le troisième volet de cette Bonne Nouvelle : notre propre consécration au Royaume de Dieu que nous avons mission de bâtir.
Il nous faut en effet mettre la main à la charrue, sans nous retourner pour regarder en arrière.
Bien sûr, nous croyons au Christ et nous essayons de le suivre.
Mais quant à nous donner totalement à Lui, car c’est ce qu’Il attend de nous, il y a parfois loin de la coupe aux lèvres…
Nous sommes attachés à tant de choses; parfois nous y sommes même asservis dans la mesure où nous ne pouvons nous en passer.
Nous ne voulons pas quitter ce qu’il faudrait quitter, nous n’avons pas le courage de dénouer tous ces liens qui nous retiennent prisonniers…
Mais Jésus nous parle aujourd’hui avec une sorte de hâte pour nous énoncer les conditions nécessaires pour que nous puissions le suivre.
Chers Amis,
Il y a une chose qu’il ne faut jamais oublier : là où nous sommes et avec ce que nous sommes, nous avons pour mission de bâtir le Royaume; c’est cela la grande aventure de la sainteté !
Et en plus, nous devons aussi aider nos frères et sœurs à participer à cette construction.
Et cette tâche ne souffre aucun délai…
Jésus brûle d’un autre feu que celui dont parlaient tout à l’heure Jacques et Jean : il s’agit du feu de son amour dont il a un immense désir de le voir s’allumer et brûler sur toute la terre, dans tous les cœurs.
Et lorsqu’on parle de dureté de Jésus dans le texte que nous venons d’entendre, il faut considérer que cette dureté est celle d’un amour qui donne tout et aussi exige tout.
Par ces propos, Jésus nous annonce ce que son amour attend de nous: Il nous demande de L’aimer et de nous aimer les uns les autres, et cela dans la plus grande des libertés.
Puisse la Vierge Marie, notre Mère, nous aider à donner une réponse sans réticences, sans regrets, totale, joyeuse et généreuse à l’image de celle de son Fils…
Amen.
13e dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : 1 Rois 19, 16b.19-21; Galates 5, 1.13-18; Luc 9, 51-62
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