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Homélie

Homélie du 7 décembre 2025 (Mt 3, 1-12)

Philippe Becquart – Eglise du Sacré-Cœur, Lausanne

L’Avent est le temps de l’Espérance

Un rameau jaillira… d’une souche…
Quel jardinier n’a jamais espérer faire cette expérience ? Celle d’un arbre que l’on croit mort – le tronc fendu, les branches desséchées, nues et tordues. Il faut se résigner. C’est la fin. Et pourtant, au printemps, un mince rameau, une pousse verte apparaît, fragile, timide. D’où vient-il ? Tiendra-t-il ? Ce rameau ressemble à notre vie : combien de fois avons-nous cru que tout était perdu ? Combien de fois avons-nous vu nos rêves s’effondrer, nos forces s’épuiser ? Combien de fois avons-nous pensé que tout était mort ? Est-ce que ce rameau ne pourrait pas être la clé de notre Avent ?
Alors même qu’autour de nous tout peut sembler stérile, insignifiant, inquiétant, la vie de Dieu cherche un passage et fait naître l’espérance là où tout peut paraître mort.

Dieu promet une vie nouvelle

Cette image est d’ailleurs celle qu’utilise le prophète Isaïe : « Un rameau sortira de la souche de Jessé » (Is 11,1). Au cœur d’un peuple brisé, Dieu promet une vie nouvelle.
Rien de spectaculaire : un simple rameau, une pousse de tige, un commencement presque invisible. Mais c’est précisément là que la puissance de Dieu se révèle : dans l’humilité.
Ce rameau, c’est le Christ. C’est aussi, mystérieusement, chaque espace de notre vie où nous laissons l’Esprit souffler. C’est ainsi que l’Avent n’est pas l’attente d’un Dieu lointain qui viendrait de l’extérieur ; c’est l’éclosion intérieure d’une présence déjà là, encore discrète, que nous n’avons pas encore découverte ou pleinement accueillie.

Jean-Baptiste : libérer l’espace du cœur


Dans l’Évangile que nous venons d’entendre, Jean-Baptiste nous conduit au désert et lance un cri : « Préparez le chemin du Seigneur !… Convertissez-vous ! » (Mt 3,3). Bien sûr, il y a là comme une menace – « déjà la cognée se trouve à la racine des arbres ». Mais cette parole, plus qu’un avertissement, peut être entendue comme un appel à la liberté.
Mon désert, c’est à chaque fois que je me sens dispersé, encombré, occupé de mille choses qui me coupent de l’essentiel. Le désert est ce lieu où tombent les illusions, où le cœur peut enfin entendre.
Mais comment préparer le chemin du Seigneur ? Comment se préparer ? Car préparer le chemin, ce n’est pas « produire » quelque chose. C’est consentir à ce que Dieu éveille en nous.
Comme ce rameau jailli de l’arbre que l’on croyait mort, il suffit parfois de peu : un geste de pardon, un moment de silence, un souffle de prière. La conversion véritable à laquelle nous invite fortement le baptiste est une ouverture, beaucoup plus qu’une performance. C’est cette ouverture qui rend possible de libérer l’espace de notre cœur à une présence qui est notre véritable espérance.

L’Espérance est ce qui porte le monde


Le psaume 71 chante un roi juste, qui « délivre le pauvre qui appelle ». Là encore, l’image est simple : un roi qui écoute, qui se penche, qui relève. L’espérance biblique n’est pas une idée, mais une relation. Là où quelqu’un est relevé, Dieu se manifeste.
Saint Paul, dans la lettre aux Romains, voit dans cette espérance un lien vivant entre les croyants : « Que Dieu vous donne d’être animés d’un même sentiment… pour que vous glorifiiez Dieu d’un seul cœur » (Rm 15,5-6). Autrement dit : le rameau du Christ devient comme un arbre accueillant quand il nous relie les uns aux autres.
Notre Espérance repose sur ce que signifie justement le temps de l’Avent : nous sommes précédés. Dieu n’attend pas que nous soyons parfaits pour venir ; il vient pour nous apprendre la beauté que nous avons oubliée, le pardon et la consolation à laquelle nous aspirons. Ce que Dieu propose, ce n’est rien moins qu’une naissance, car Il vient.

Une émotion : la douceur qui déplace


Il est difficile d’accueillir cette venue sans émotion. Non pas un sentiment passager, mais ce mouvement intérieur qui surgit quand on comprend que l’on est aimé par avance, sans condition, non pas pour ce que l’on fait, mais pour ce que l’on est. Devant ce rameau qui renaît, beaucoup ont ressenti une forme de paix : la preuve silencieuse que la vie peut revenir, que rien n’est jamais totalement perdu. Cette douceur est peut-être la signature de l’Avent : Dieu ne force pas, il éveille.

Une histoire vraie : la paix née d’un signe fragile


Pour illustrer cette force de l’Espérance qui nous précède et nous guide, je vous partage cette histoire en écho avec l’actualité tragique que nous traversons. Dans une petite communauté du Moyen-Orient, en pleine guerre, un prêtre raconte qu’un jour, trouvant son église détruite, il voit un enfant ramasser un débris de vitrail représentant la crèche. L’enfant murmure : « On peut recoller. Jésus reviendra. » Ce fragment de verre coloré était un rameau. Ils ont reconstruit une petite chapelle, pierre après pierre. Et la paix, un temps, est revenue autour d’eux.
L’Avent ressemble à cette confiance de l’enfant : même dans les ruines, Dieu prépare une naissance. Il nous reste à accueillir le rameau.

Alors, que faire durant cette 2ème semaine de l’Avent ? Peut-être simplement laisser naître ce rameau en nous. Comment ?
– Offrir un pardon.
– Créer un silence pour écouter la Parole.
– Réconcilier un lien blessé.
– Poser un acte d’attention envers le plus fragile.

L’Avent est le temps où nous laissons Dieu faire lever en nous son propre rameau, celui de la douceur, de la justice et de la paix. Que ce rameau fragile soit pour nous la promesse d’une joie authentique : le Seigneur vient, humblement, patiemment, puissamment.
Ouvrons-lui un chemin.

2e Dimanche de l’Avent
Lectures bibliques : Isaïe 11, 1-10 ; Psaume 71 (72) 1-17 ; Romains 15, 4-9 ; Matthieu 3, 1-12

Jean-baptiste/ -evangile-et-peinture-1
7 décembre 2025 | 09:35
Temps de lecture : env. 4  min.
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