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Homélie

Homélie du 8 mars 2020 (Mt 17, 1-9)

Fr. Michel Fontaine OP – Eglise St-Paul, Cologny, GE

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Thème : À qui irions-nous, Seigneur ? Tu as les Paroles de la Vie éternelle (Jn 6,68) – Transfigurés avec Jésus, l’expérience de la Vie éternelle au quotidien

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Ce temps de Carême, tel un chemin proposé, nous rejoint dans le quotidien de nos vies. Ce chemin nous l’avons placé sous le souffle de cette parole de l’apôtre Pierre « Seigneur, à qui irions-nous, c’est toi qui a les Paroles de la Vie éternelle » et nous cherchons chaque dimanche au travers de l’Evangile, à en découvrir le sens.

Avec Jésus nous étions dimanche dernier au désert, reconnus « enfants d’un même Père », confiants dans la puissance de sa Parole qui ne nous trompe jamais.

L’expérience de la vie éternelle

Aujourd’hui, nous sommes appelés dans chacune de nos histoires de vie, à faire l’expérience, d’une manière ou d’une autre, de quelque chose de l’éternité… osons dire, de la vie éternelle…

Langage ésotérique, étranger à notre quotidien, réservé à quelques privilégiés… Non, car la Bonne Nouvelle se révèle dans les choses simples, évidentes à entreprendre. Ces choses de la vie qui engagent notre humanité au plus profond d’elle-même : pouvoir dépasser nos peurs, nos préjugés, nos craintes, avancer, construire, croire en l’autre, faire confiance…

Il me vient un exemple tout récent communiqué par l’un de nos frères actuellement en Irak : des chrétiens et des musulmans se mettent ensemble pour reconstruire à Mossoul la Mosquée et le Couvent des Dominicains, détruits par la guerre… N’y a-t-il pas là, l’expérience de la vie plus forte que la mort, donc de quelque chose de l’éternité.

Entrons davantage dans l’évangile entendu.

Un récit d’évangile tellement déconnecté de ce que nous vivons…Et pourtant !

Trois hommes, Pierre, Jacques et Jean sont mis à part et conduits par Jésus sur une montagne fort élevée. Là, Jésus devient lumineux s’entretenant avec deux hommes morts depuis des centaines d’années. Aussitôt, une nuée les entoure et une voix se fait entendre : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui j’ai mis tout mon amour ; écoutez-le ». Alors ils redescendent de la montagne et Jésus les oblige au silence.

Comment entendre ce récit aujourd’hui ? Que dit-il ? Son étrangeté nous fait-elle passer à côté de l’essentiel ?

L’expérience est initiatrice, transformatrice

Une chose est sûre, quelque chose s’est passée, de l’ordre de l’expérience et c’est peut-être cela, l’essentiel. Faire une expérience. Savons-nous profiter de nos expériences ?… Vous savez, celle qui recourt au sens et qui fait apparaître des liens dans une vie. Celle qui tout d’un coup réorganise l’existence. Un engagement, un nouveau départ, une rencontre, une prise de conscience que nous n’aurions jamais imaginé faire, au nom de la vérité avec soi-même… Nous ne sommes pas dans la légende, la fable, l’illusion mais dans ce qui nourrit notre quête de sens. L’expérience est toujours initiatrice, elle nous éprouve. Elle nous fait « traverser », c’est d’ailleurs le sens premier de ce mot. Elle explore le réel, nourrit la connaissance. En un mot l’expérience est transformatrice…

Ici nous sommes au cœur de l’expérience de la foi qui transforme celui qui la vit selon des rythmes qui nous échappent. Un autre exemple, me vient à l’esprit… celui du pèlerinage, quelque soit sa forme, sa durée, creuse en celui qui s’y engage un chemin de transformation, une ouverture, un avenir, un dépassement, une paix profonde… Nous ne sommes plus les mêmes après l’expérience d’un pèlerinage (St Jacques de Compostelle, Lourdes…).

Revenons aux textes que nous venons d’entendre :

Matthieu cherche les mots pour exprimer le mieux possible l’indicible. Le temps n’existe plus ni pour Jésus, ni pour Pierre, Jacques et Jean. C’est pour nous inimaginable et cependant, ces hommes l’ont vécu…

Accueillir le projet de Dieu

Paul d’une autre manière, dans sa lettre à Timothée nous propose un chemin pour nous aider à comprendre ce qui se passe. Ecoutons-le : « … Dieu nous a donné une vocation sainte non pas à cause de nos propres actes, mais à cause de son projet à lui et de sa grâce. Cette grâce nous avait été donnée dans le Christ Jésus avant tous les siècles… devenue visible à nos yeux car… le Christ s’est manifesté en détruisant la mort… ».

Il s’agit d’un don qui nous est donné à chacune et chacun, qui que nous soyons, indépendamment de nos fragilités, de nos doutes et de nos chutes possibles. Dieu relève autant de fois qu’il le faut… A nous d’accueillir cette « vocation sainte », à savoir le projet de Dieu et de sa grâce. En l’accueillant nous vivons quelque chose de cette expérience de la vie éternelle…

Oui, l’évangile d’aujourd’hui nous renvoie à intérioriser ce moment « impensable » de la transfiguration. Nous comprenons que ce n’est pas un spectacle mais une exigence qui nous est rappelée de devenir enfin Celui qui nous apprend à aimer. 

Pierre, Jacques et Jean ainsi retirés sur la montagne du Thabor comme pour faire une retraite, ont compris quelque chose de la Parole de Dieu : ils ont vécu l’incarnation de la Parole dans leur chair, car la Parole s’est faite chair. Ils ont été transformés/transfigurés eux aussi. C’est leur expérience.

Alors ce Temps de Carême, que nous avons commencé ensemble, n’est-il pas ce chemin ?

A nous de chercher à vivre simplement dans notre quotidien ces expériences de foi, d’humanité profonde, de rencontres vraies, comme des moments de transformation… peut-être des instants de transfiguration !

Alors là, j’en suis sûr, avec Jésus, nous faisons l’expérience de quelque chose de la vie éternelle…

Amen

2ème dimanche de Carême, Année A
Lectures bibliques :
Genèse 12, 1-4a; Psaume 32, 4-5, 18-19, 20.22; 2 Timothée 1, 8b-10; Matthieu 17, 1-9

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8 mars 2020 | 09:45
Temps de lecture: env. 4 min.
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