Messages du 16 septembre 2018 (I R 17, 2-11 ; Jn 6, 5-13)
Célébration oecuménique à l’église de la Visitation à Meyrin, à l’occasion des 30 ans de l’AGORA (Aumônerie Genevoise Œcuménique auprès des Requérants d’Asile et des réfugiés)
Pasteur Etienne Sommer, président de l’AGORA
Le désert… Elie est seul : les corbeaux le nourrissent. Pour saint François d’Assise, rien de plus normal, les oiseaux sont nos frères ! Le désert. Une foule affamée. Les disciples sont tendus. La peur ! La peur commence là où il n’y a plus de foi, disait George Muller. Quand il n’avait pas un sou vaillant pour faire tourner ses orphelinats, cet homme se mettait à genoux et il priait.
Nous nous sommes esclaves des cours monétaires et des plans financiers. Alors, sur Wall Street ou à la place Bel-Air, les oiseaux de saint François se sont tus.
Refuser le diktat du réalisme
Nous, nous faisons des séances. Et encore des séances. Puis nous renonçons. Nous renonçons d’accueillir, parce que c’est trop cher. Faut être réaliste! Ainsi est-on aspiré dans une spirale anxiogène et immunisé contre la souffrance, l’existence même de l’autre . Ce récit nous dit : Cessez d’invoquer sans cesse la réalité. La réalité, ça n’existe pas. Les disciples disent : c’est impossible ! Mais l’enfant offre ce qu’il a, tout ce qu’il a. Face à ce qu’on appelle parfois « la dure réalité » – comme pour s’excuser d’avance de ne rien faire – il y a, d’un côté, les gens sérieux et responsables. Ils disent comme les disciples : C’est impossible! Et c’est ainsi que l’espérance finit par mourir, au bord du chemin ou dans un rafiot surchargé de la Méditerranée. Mais de l’autre côté, il y a celles et ceux qui refusent le diktat du réalisme.
Invités à partager
On connaît ce texte biblique sous le titre de la multiplication des pains ! Mais qu’est-ce que ce Jésus de pacotille qui fait sortir de son chapeau des centaines de kilos de pain? En fait, il n’a rien fait d’autre que de les inviter à rester plutôt que les renvoyer chez eux. Alors, imitant le gamin, tous ont ouvert leur sac et se sont mis à partager. Et à la fin, il y avait du rab! Alors, oui, elle est où, la réalité?
Certains pensent qu’il faut trouver un juste milieu ! Mais Jésus n’aimait pas le juste milieu. Il aimait les extrêmes. Il prônait la disette, le manque, le Jeûne… fédéral mais aussi l’abondance et la multiplication des liens de solidarité.
Chers amis, il y a plusieurs bonnes raisons de nourrir ces milliers de gens comme d’accueillir les réfugiés. Mais Jésus n’en invoque aucune. C’est seulement qu’il ne peut laisser le moindre de ses frères, de ses soeurs mourir de désespoir ou de faim. AMEN
Ghada Haodiche, déléguée catholique à l’AGORA
Si vous étiez invités à manger chez mes parents le repas commencerait comme cela : Jésus notre Seigneur, nous te rendons grâce pour nos assiettes si bien remplies. Permets, nous t’en prions, que chacun puisse là où il se trouve avoir aussi nourriture et amour. AMEN.
Voilà ce que cet évangile m’a rappelé en tout premier lieu…
Pour moi, il résonne fort surtout lorsque je regarde l’état du monde …
La panique devant tant de besoins
Permettez-moi quelques questions : Est-ce que comme moi vous sentez la panique de Philippe et André, confrontés à la demande de Jésus ?
« Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? »
Et cette panique, n’est-elle pas celle qui s’empare de nous, responsables confrontés à l’arrivée de personnes migrantes et réfugiées ?
Raisonnablement, logiquement, « helvétiquement », c’est impossible. Nos calculs savants le disent.
« Le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun reçoive un peu de pain. »
C’est vrai ! Mais tout est possible à Dieu, non ? Alors pourquoi l’oublions-nous parfois ? Il y a plus de 2000 ans André est désemparé. Il dit à Jésus « il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ! » pourtant, c’est ce jeune garçon-là, qui va permettre à Jésus de nourrir la foule.
Aujourd’hui, en 2018, j’ai envie de vous demander : Où est-il ce jeune garçon qui est si petit avec si peu de choses entre les mains et qui rend possible l’ouvrage de Dieu ?
Ces personnes qui arrivent nous bousculent.
Revenir à la Bonne Nouvelle de l’Evangile
Cette foule avide de pain aux céréales mais surtout de pain de Vie, nous demande à nous chrétiens de revenir à la Bonne Nouvelle de l’Evangile.
Ne soyons pas de ces disciples qui jugent rapidement sans faire confiance, qui se persuadent que rien n’est possible.
Oh, Jésus, combien est grande Ta patience ! Nous sommes si lents à apprendre la confiance !
Pardonnes-nous les jugements muets, les regards sombres et fatalistes que nous portons parfois sur ces personnes éprouvées qui ont tant de besoins. Peut-être que nous leur en voulons de nous rappeler notre impuissance : sans Toi Seigneur nous ne pouvons rien !
Découvrir ensemble les prés d’herbe fraîche
Tu as dit « Faites asseoir les gens. » Il y avait beaucoup d’herbe à cet endroit …
Aide-nous à découvrir ensemble les prés d’herbe fraîche sur lesquels enfin ils pourront se reposer, s’installer peut-être.
Ta lumière éclaire nos actes et comme le dit si bien un proverbe malien : chaque fois que nous allons vers la lumière notre ombre est derrière nous.
« Alors Jésus prit les pains et, après avoir rendu grâce, il les distribua aux convives ; il leur donna aussi du poisson, autant qu’ils en voulaient. »
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