Les évêques du Kenya et du Cameroun contre le parti unique

Afrique: L’Eglise demande l’instauration du multipartisme (230790)

Nairobi/Yaoundé, 23juillet(APIC) L’Eglise catholique du Cameroun, ainsi

que les Eglises chrétiennes (anglicane et catholique) du Kenya mettent en

garde les autorités contre les dangers du parti unique et viennent de lancer un appel en faveur du multipartisme.

Le cardinal Christian Tumi, archevêque de Garoua, au Cameroun, a déclaré

au cours d’une conférence de presse que son pays a besoin d’un système multipartiste avec un parti d’opposition officiellement reconnu «pour éviter

la corruption, le vol et les injustices qui sont actuellement en train de

ronger la société camerounaise».

Dans le même temps les évêques du Kenya, dans une lettre pastorale rendue publique à Nairobi, critiquent sévèrement le régime du président Arap

Moi. 17 archevêques et évêques, dont le cardinal Maurice Michael Otunga,

archevêque de Nairobi, ont signé ce document qui dénonce le processus au

nom duquel le parti unique «Kanu» s’identifie toujours plus, depuis trois

ans, au gouvernement. «Donner une autorité illimitée au parti conduit à ces

abus de pouvoir dont ont parlé à plusieurs reprises les quotidiens», affirment les prélats signataires, qui craignent, si la situation ne change pas,

des assassinats politiques, des détentions arbitraires, la torture, voire

l’apparition d’escadrons de la mort échappant au contrôle des forces de

l’ordre.

Pas le monopole de la vérité

L’Eglise du Cameroun lance un appel pour l’instauration du multipartisme

en Afrique «afin de permettre à la société locale d’éviter plusieurs maux

tels que la dilapidation des deniers publics et la pratique de l’injustice». «Aucun parti unique ne peut prétendre détenir seul le monopole de la

vérité», a estime le cardinal Christian Tumi, déclarant que l’Eglise a pris

position parce que «le peuple ne voit pas clairement où il va et surtout

commence à désespérer».

Le prélat camerounais observe que la Constitution ne rejette pas le multipartisme, mais en réalité seul le «Mouvement démocratique du Peuple camerounais» (MPDC) a un statut légal. Il relève aussi que le MDPC avec 800’000

membres sur une population de dix millions de personnes est un parti minoritaire. Il invite le président de la République, Paul Biya, à préciser les

conditions requises pour la formation d’un parti politique et à organiser

un référendum à ce propos. Rappelons que le 26 mai dernier, une

manifestation de l’opposition en faveur des réformes démocratiques avait

dégénéré en bataille rangée et la troupe avait ouvert le feu sur les manifestants, tuant six personnes.

Au cours de cette conférence de presse, le cardinal a aussi critiqué le

programme gouvernemental d’ajustement monétaire imposé par le Fonds Monétaire International (FMI) qui est cause de la misère, de la pauvreté et de

la montée du chômage. Il a également lancé un appel à l’annulation de la

dette extérieure du Cameroun.

Pas une voix isolée

Le cardinal Tumi n’est pas une voix isolée au sein de la Conférence

épiscopale camerounaise. Celle-ci a, le mois dernier, nettement pris position au milieu de la crise politique et sociale qui secoue le pays. Une

lettre pastorale des évêques camerounais a été rendue publique alors que le

pays était agité par un mouvement de contestation réclamant notamment la

démocratie. De longs développements de cette lettre sont consacrés à la

crise économique, tandis que l’analyse politique est sans concessions.

(apic/dia/fides/gar)

23 juillet 1990 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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