Albanie: Une vie entière consacrée à la lutte contre la vengeance par le sang
Le Père Dionis Maka tente de faire échec à la loi du «Kanun»
Bucarest, 22 juillet 2002 (APIC) La loi du «Kanun», qui prévoit de venger le sang par le sang, conditionne encore la vie de nombreux Albanais, surtout dans les montagnes du nord de l’Albanie. Le Père Dionis Maka, un franciscain âgé de 92 ans, a consacré toute sa vie à négocier avec les habitants de la région pour tenter d’éviter les drames qu’entraîne cette terrible loi du talion. Grâce à ses interventions, 117 «réconciliations» ont pu sa faire. Soit autant de mises à mort en moins.
Selon le «code des montagnes», dans les régions comprises entre Scutari, Dukagjini et Lezhe «le sang ne reste jamais sans vengeance» et l’homicide fait partie des cas vengés par le sang.
C’est en 1939 que le Père Dionis Maka a sauvé sa première vie. Depuis, il est à l’origine de 116 «réconciliations», par des moyens ingénieux permettant de contourner la loi du Kanun et profitant de certaines garanties établies par cette même loi.
L’article 4 de ce code, par exemple, dit que «la personne du curé est inviolable» et que «le prêtre n’est pas soumis à la loi du sang». Pour éviter les vengeances, le Père Maka a parfois recours à des compensations matérielles comme par exemple le don de têtes de bétail pour réconcilier les familles, mais aussi au message d’amour de l’Evangile.
«Dans ce triangle du «Kanun», explique-t-il, il faut toujours se mouvoir avec beaucoup de discrétion pour ne pas choquer les mentalités». Le père franciscain précise notamment qu’avant d’aborder les familles pour tenter de les réconcilier après un homicide, il essaie de mieux les connaître et de savoir qui sont leurs amis. «Je les contacte un par un et je leur demande s’ils sont disposés à m’aider. Je frappe à la porte de leurs maisons. Dieu merci, on ne m’a jamais rejeté».
Selon la loi du «Kanun», la réconciliation est possible si l’homme qui a tué va demander pardon et si les personnes offensées acceptent son offre: douze boeufs pour une personne assassinée. Mais dans la pratique cela n’arrive que rarement car la personne qui a tué a souvent beaucoup de mal à vaincre son orgueil. D’où le travail d’approche du religieux, en vue de parvenir à une «réconciliation», et mettre en échec la loi du «Kanun», encore et toujours d’actualité. (apic/zn/pr)