L’Eglise protestante allemande passe à la caisse

Allemagne: Eglise et travailleurs forcés sous le nazisme

Bielefeld, 21 juillet 2000 (APIC) L’Eglise évangélique d’Allemagne (EKD) et la principale organisation protestante d’entraide ont décidé de verser dix millions de deutsche marks (4,7 millions de dollars) au fonds d’indemnisation en faveur des travailleurs forcés sous le nazisme, créé cette semaine.

Dans une déclaration annonçant leur décision, l’EKD et Diakonisches Werk ont admis que les paroisses et les institutions sociales, comme les hôpitaux gérés par les Eglises, avaient employé des travailleurs forcés.

L’Eglise catholique d’Allemagne a elle aussi reconnu avoir eu recours au travail forcé pendant la période nazie. Il faudra en revanche attendre pour savoir si, à l’instar des protestants, elle passera à la caisse. Les évêques décideront le 28 août si ils apporteront leur contribution au fonds d’indemnisation des victimes. «Des recherches dans plusieurs organisations religieuses ont apporté des premières preuves de l’utilisation de travailleurs forcés», a déclaré le porte-parole de la Conférence des évêques, Rudolf Hammerschmidt.

Le fonds d’indemnisation a été mis en place par le gouvernement et les entreprises allemandes après 18 mois de négociations et de menaces de procès lancées par des avocats américains. Environ 1,5 million de victimes survivantes recevront de 5’000 à 15’000 deutsche marks chacune mais les personnes qui sont à leur charge ne recevront rien.

L’Eglise catholique d’Allemagne avait dans un premier temps refusé de contribuer à ce fonds en expliquant qu’il n’y avait aucune preuve que des travailleurs forcés aient été engagés dans des institutions catholiques. Une émission de télévision allemande, Monitor, s’apprête à présenter un reportage selon lequel des travailleurs forcés de Pologne et d’Ukraine auraient servi dans le monastère catholique d’Ettal et le séminaire théologique de Paderborn, et que des prisonniers d’un camp de concentration étaient forcés de travailler dans une institution religieuse.

10 millions de travailleurs forcés

Le régime nazi aurait utilisé plus de 10 millions de travailleurs forcés – civils et prisonniers de guerre étrangers -, dont beaucoup sont morts dans des conditions épouvantables. Les premiers travailleurs forcés ont été amenés de Pologne aussitôt après l’éclatement de la guerre en 1939. Dés 1942, des travailleurs ont été amenés des régions occupées par les Allemands, d’Europe occidentale et orientale, et forcés de travailler dans des fermes, des entreprises et institutions publiques.

Par ailleurs, il a été révélé que 26 paroisses protestantes et deux paroisses catholiques de Berlin avaient ouvert un camp de travail en 1943 avec au moins 100 travailleurs forcés. Selon un communiqué de presse publié par l’Eglise évangélique de Berlin-Brandenbourg, les dossiers montrent que les conditions de vie de ces travailleurs forcés étaient horribles.

«Il est triste d’apprendre que des paroisses utilisaient systématiquement des travailleurs forcés pour combler les besoins engendrés par la guerre», a déclaré Wolfgang Huber, évêque protestant de Berlin-Brandenbourg, à l’agence de nouvelles protestante EPD. «L’Eglise, a-t-il déclaré, s’est compromise avec le régime nazi».

Selon Michael Hausler, historien travaillant dans les archives et la bibliothèque de l’organisme Diakonisches Werk» de l’EKD à Berlin, «Nous ne savons pas encore combien de travailleurs forcés se trouvaient dans les paroisses et institutions religieuses allemandes». Il a précisé que l’EKD avait commencé seulement en décembre dernier à faire des recherches pour éclaircir ce point.

Un fonds de dix milliards de marks – un peu plus de 7 milliards de francs – a été récemment créé par le gouvernement allemand pour indemniser les victimes. (apic/eni/pr)

21 juillet 2000 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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