Wolfgang Huber accusé d’encourager la polarisation
Allemagne: Le maire de Berlin s’en prend à un évêque après le référendum
Berlin, 28 avril 2009 (Apic) Le maire de Berlin a accusé l’évêque Wolfgang Huber, président de l’Eglise évangélique d’Allemagne (EKD), responsable protestant le plus haut placé du pays, d’avoir encouragé la polarisation des citoyens lors d’une campagne pour un référendum municipal visant à mettre les cours de religion sur un pied d’égalité avec ceux d’éthique dans les écoles.
Le référendum du 26 avril à Berlin sur la réintroduction de l’instruction religieuse dans les écoles publiques a été rejeté.
L’idée de réintroduire l’instruction religieuse dans les programmes scolaires a été promue par l’organisation Pro Reli, soutenue par les Eglises catholique romaine et protestantes, le Conseil central des juifs, une organisation musulmane turque, des organisations communautaires, le Parti libéral-démocrate (FDP) et le Parti démocrate chrétien (CDU).
Dans une interview donnée le 27 avril sur une radio allemande, le maire de Berlin Klaus Wowereit, membre du Parti social-démocrate (SPD), s’est félicité du résultat, affirmant qu’il renforçait l’intégration, mais il a toutefois critiqué l’évêque Huber. «Les Eglises elles-mêmes devraient avoir un débat pour savoir si la voie de la polarisation, empruntée notamment par l’évêque Huber de l’Eglise évangélique de Berlin, était opportune», a déclaré Klaus Wowereit sur la radio nationale publique Deutschlandfunk. «Je crois que cela a causé du tort aux Eglises dans leur ensemble. Quand on voit que seuls 14 % des électeurs ont voté oui, cela ne représente qu’une fraction des membres de l’Eglise évangélique de Berlin».
Dans la plupart des 16 länder allemands, la religion est une matière obligatoire à l’école. Les écoliers reçoivent une instruction séparément selon leur confession – catholique, protestante, juive ou musulmane. Ceux qui n’appartiennent à aucun groupe religieux peuvent choisir de suivre le cours d’éthique, une matière égale à la religion. Berlin et Brême sont les deux exceptions à la règle depuis l’époque de la République de Weimar, de 1919 à 1933. Jusqu’en 2006, la religion et l’éthique étaient enseignés sur un pied d’égalité dans les écoles berlinoises.
En 2006, l’éthique laïque est devenue une matière obligatoire à Berlin de la 7e à la 10e (de 12 à 16 ans environ) suite à une coalition entre le SPD et le parti de gauche Die Linke au sein du gouvernement régional, dont un grand nombre de représentants sont d’anciens Allemands de l’Est. La religion devint alors une matière facultative.
Perdu mais positif
Un porte-parole de l’évêque Huber n’a pas commenté les propos du maire, mais a déclaré à l’Agence ENI que l’Eglise s’efforcerait d’approfondir la collaboration entre les professeurs d’éthique et de religion. L’évêque Huber a par la suite publié un communiqué indiquant : «L’énorme différence des votes entre les parties orientale et occidentale de la ville montre que cette ville reste divisée. Nous avons tous pour responsabilité de surmonter cette division».
Le président de la Conférence épiscopale d’Allemagne, Mgr Robert Zollitsch, a déclaré dans un communiqué que bien que le référendum ait été perdu, il a également ses aspects positifs: «Jamais auparavant les croyances et la religion n’avaient été si explicitement présentes dans la rue et dans les débats de cette ville. La coopération entre chrétiens, juifs et musulmans a permis d’attirer l’attention du pays tout entier et a prouvé que l’entente mutuelle et l’action politique commune sont possibles», a estimé Mgr Zollitsch.
Berlin abrite les plus grosses communautés musulmane et juive d’Allemagne et entretient une longue tradition de laïcité. Environ 40 % des enfants inscrits dans les écoles berlinoises seraient issus de l’immigration. Au plus fort de la campagne, les partisans de l’éthique en tant que matière obligatoire ont affirmé que permettre aux enfants de choisir entre les cours d’éthique ou de religion diviserait les classes, entraînant une intégration moindre.
L’organisation musulmane turque faisant partie de la campagne de Pro Reli avait en revanche affirmé qu’un enseignement plus poussé de l’islam aurait permis d’éviter que des jeunes musulmans ne deviennent des fanatiques religieux, car l’instruction aurait été ouverte et contrôlée, et ne se serait pas faite derrière des portes closes ou dans des arrière-cours. (apic/eni/pr)