Allemagne: Le Père Werenfried van Straaten fête son 90ème anniversaire
Hommage au fameux «Père au lard» à la cathédrale de Limbourg
Königstein, 8 janvier 2003 (APIC) Le Père Werenfried van Straaten, fondateur de l’oeuvre catholique internationale «Aide à l’Eglise en Détresse», fête son 90 anniversaire le 17 janvier. Une cérémonie en hommage au fameux «Père au lard» aura lieu ce jour-là à la cathédrale de Limbourg, dans le land de Hesse, en Allemagne.
Pendant des décennies, dans le climat de la «guerre froide» entre «le monde libre» et les pays «de derrière le rideau de fer», le religieux prémontré hollandais va incarner la solidarité avec les chrétiens opprimés par les régimes communistes. En 1947, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, dans une Europe en ruines qui n’a pas fini de panser les plaies profondes engendrées par la folie nazie, il fonde l’oeuvre d’entraide «Ostpriesterhilfe» (Aide aux prêtres des pays de l’Est), mieux connue aujourd’hui sous le nom d’»Aide à l’Eglise en Détresse» (AED).
Sans craindre le rejet de ses compatriotes, au lendemain d’une guerre cruelle qui avait fait des dizaines de millions de morts, Werenfried van Straaten n’hésite pas à prêcher à l’Ouest la réconciliation entre les ennemis de hier. Il sollicite de l’aide en Hollande et en Belgique pour les réfugiés allemands, notamment ceux qui avaient été chassés des territoires de l’Est. La récolte de centaines de tonnes de lard dans les fermes du Plat pays – les paysans flamands n’avaient pas d’argent à lui offrir – , lui vaudra le surnom de «Père au lard» avec lequel il devient une figure très populaire. A son initiative, une noria de pétaradantes» chapelles roulantes», en fait de petites églises mobiles, sillonneront la moitié de l’Europe, tandis que des «prêtres sac au dos» seront bientôt envoyés pour relancer le travail pastoral dans les zones dévastées. Puis il fonde l’ordre des compagnons-bâtisseurs, pour venir en aide aux populations qui se relevaient des ruines de la guerre.
Le «plus grand mendiant du siècle»
Rapidement, ce prêtre intrépide qui porte l’habit blanc de saint Norbert, développe les activités de l’»Aide à l’Eglise en Détresse» en direction des chrétiens opprimés d’Europe de l’Est. Dans les années 60 déjà, le pape Jean XXIII indique à l’AED le chemin de l’Amérique latine, un continent en plein ébullition. Plus tard, l’oeuvre étend ses activités à l’Afrique et à l’Asie, continents où elle actuellement très présente.
Durant des décennies, le prédicateur inlassable que fut le Père Werenfried van Straaten se postait invariablement à la sortie de l’église avec son» chapeau à millions» noir, un vieux galurin tout fripé destiné à recevoir l’obole de l’auditoire conquis! Il venait, avec un clin d’oeil, de préciser que son vieux chapeau mou était plein de trous et qu’il valait mieux y mettre des billets, les pièces de monnaie risquant de passer à travers… Le truc marchait à chaque coup ! Durant sa longue vie de prêtre prédicateur, celui que l’on appelle aussi» le plus grand mendiant du siècle» doit bien avoir récolté, lors de messes et de prédications, près de 2 milliards d’euros en faveur de l’AED.
L’oeuvre fondée par le Père Werenfried est implantée désormais dans 16 pays. La centrale internationale basée à Königstein, dans la région du Taunus, non loin de Francfort, traite chaque année quelque 10’000 dossiers de demandes de projets venant de prêtres, religieux et évêques de plus de 130 pays. En tant qu’oeuvre d’entraide pastorale, l’AED apporte surtout son soutien dans le domaine de la formation de base et de la formation continue de séminaristes et prêtres. Elle finance également la construction et la rénovation de centres de formation et d’églises, la traduction et l’édition de la bible et de littérature religieuse et la production et la diffusion d’émission de programmes religieux de radio et de télévision. JB
Encadré
Une oeuvre féconde
Werenfried van Straaten naît en 1913 à Mijdrecht aux Pays-Bas. En 1934, le jeune Néerlandais entre dans l’Abbaye des Prémontrés de Tongerlo, où il est ordonné prêtre à l’âge de 27 ans. Lors des congrès annuels de l’oeuvre qu’il a fondée, l’»Aide à l’Eglise en Détresse», le Père van Straaten attire l’attention du public sur l’Eglise persécutée en Europe de l’Est. Des années 60 à aujourd’hui, le religieux n’a cessé d’accorder une aide toute particulière à l’Eglise gréco-catholique ukrainienne rattachée à Rome, qui fut cruellement persécutée jusqu’à la chute du communisme.
En complément aux initiatives prises par d’autres oeuvres d’entraide dans le domaine de l’aide caritative et de l’aide au développement, l’AED trouve sa spécificité et sa mission propre dans le soutien au travail pastoral de l’Eglise menacée partout dans le monde. En 1966, à Bukavu, dans l’ancien Zaïre, le Père Werenfried fonde en compagnie d’une religieuse flamande, Mère Hadewych, la communauté religieuse des «Filles de la Résurrection», aujourd’hui encore en activité en Afrique centrale.
Depuis la chute du communisme, à la demande du pape Jean Paul II, l’AED fait parvenir à l’Eglise orthodoxe russe, qui a été décimée sous le régime soviétique, des aides matérielles très ciblées. Malgré les tensions entre catholiques et orthodoxes, qui accusent les premiers de «prosélytisme», l’AED poursuit ses projets oecuméniques. Le Père Werenfried estime que «par des signes d’amour désintéressé», les deux Eglises soeurs doivent s’engager sur le chemin de la réconciliation. Actuellement, l’AED finance en Russie des «églises flottantes» voguant sur la Volga et sur le Don, qui permettent aux prêtres orthodoxes de rejoindre des fidèles dispersés. JB
Encadré
Dans la tourmente des révolutions latino-américaines
Dans les années 60, alors que fleurissent les mouvements révolutionnaires latino-américains inspirés de la révolution castriste à Cuba, le Père Werenfried se rend aux pieds de la gigantesque statue du Christ du Corcovado, surplombant la baie de Rio de Janeiro. Là, il dénonce la promiscuité d’une misère noire et d’une fabuleuse richesse. Cette inégalité sociale et l’iniquité de la faim imposée aux masses misérables est à l’origine d’un «grand réveil». Et le Père Werenfried d’écrire dans son ouvrage «Où Dieu pleure», qu’il a entendu «gronder la révolution dans les réserves de famine du Nordeste brésilien, dans les plantations de café de Colombie, dans les mines d’étain boliviennes et dans toutes les universités de ce continent en fermentation.» Cette révolution est équitable, écrit-il encore, «car elle se dresse contre la pauvreté, l’analphabétisme, les injustices sociales et le désespoir des hommes. Ici se développe un processus que nous ne pouvons freiner. Il nous faut tenter avec sagesse et courage de le conduire à bon terme».
Aujourd’hui, le soutien de l’Eglise menacée par la misère et l’oppression dans le tiers monde n’a pas moins d’importance pour l’AED que l’aide à l’Eglise persécutée et qui se relève péniblement des ruines matérielles et morales laissées par la chute du communisme et des décennies d’athéisme imposé par la force aux populations. JB
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