Amérique latine: les dominicains et le 5e centenaire de l’évangélisation

«Ceux-là ne sont-ils pas des êtres humains?»

Mexico, 7août(APIC) «Ceux-là ne sont-ils pas des êtres humains?» Ce cri

lancé voici quelque 500 ans par Frère Antonio Montesinos, au vu des traitements infligés aux Indiens, retentit encore aujourd’hui . C’est à partir de

cette interrogation que les dominicains du monde entier, réunis en chapitre

général à Mexico, ont mené leur réflexion sur le 500e anniversaire de la

«découverte» de l’Amérique. L’ordre des dominicains fut en effet intimement

lié à l’histoire de l’évangélisation du continent américain. Dans un texte

de 7 pages, qu’ils viennent de publier, les dominicains font un examen critique du passé et s’interrogent sur l’engagement actuel des chrétiens aux

côtés des opprimés.

1492 est en effet le départ d’un processus historique qui se poursuit de

nos jours. Ce processus dès l’origine dépasse largement les intentions individuelles. Il dépasse aussi largement l’Espagne, constatent les dominicains. Si les intentions de la conquête ont été diverses, découverte, exploration, recherche de pouvoir et de gloire, développement commercial ou

évangélisation, c’est sans doute l’intérêt de l’enrichissement qui a structuré le système. La conquête a été «le commencement de la structuration du

monde comme nouvel espace unifié, ayant pour centre l’Europe, et la mise en

place d’une relation coloniale, c’est-à-dire d’un système de dépendance au

profit de l’Europe».

Dans ce contexte, l’oeuvre d’évangélisation elle-même a été ambiguë. Les

dominicains ont été divisés. Certains ont été le soutien sans critique de

la colonisation, d’autres à la suite de Pedro de Cordoda, Montesinos ou Las

Casas ont pris courageusement le contrepied des pratiques et des opinions

quasi évidentes. Ils ont posé la question fondamentale: «ceux-là ne sontils pas des êtres humains, ne sont-ils donc pas nos fères?» jetant déjà par

cette interrogation les fondements des droits de l’homme et des peuples et

de la morale internationale. La majorité des communautés se sont malheureusement peu à peu installées dans le système colonial, reconnaissent les

frères prêcheurs.

500 ans après

Aujourd’hui sur tous les continents, des hommes, des femmes et des enfants souffrent de la violence et de l’injsutice. Relire l’histoire de la

colonisation c’est aussi se poser des questions rappellent les dominicains.

Les fondements de l’ordre politique et économique mondial actuel ont été

posés aux 15e et 16e siècles. Ce système est fondé sur l’inégalité et l’exploitation. Comment ne pas mettre en cause un tel système? Sommes-nous

prêts aujourd’hui à écouter les prophètes qui dénoncent nos propres aveuglements eux aussi peut-être porteurs d’effets de mort? Sommes-nous prêts à

lutter pour garantir aux Indiens leurs droits pour une vie dans la dignité?

«Nos communautés dominicaines sont-elles prêtes à supporter la contradiction publique que provoque le choix évangélique de solidarité avec les

opprimés (…) Sommes-nous prêts à de véritables inculturations, en nous

laissant dépouiller de nos évidences traditionnelles?» «Aujourdhui plus que

jamais nous sommes convaincus que seule une vie solidaire avec les pauvres,

par notre action et notre parole, peut faire que l’Evangile de Jésus Christ

soit reçu comme une Bonne Nouvelle de libération et de salut», ajoutent les

dominicains (apic/mp)

7 août 1992 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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