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apic/Cantique des Cantique(Saint-Maurice

signes.

Saint-Maurice: Semaine romande de musique et de liturgie

Création du «Cantique des Cantiques» de Gelineau

Le chant le plus mystique et le plus érotique de la Bible

Par Marie-José Portmann, pour l’Agence APIC

Saint-Maurice, 19juillet(APIC) «Vivez, sentez, admirez, renouvelez votre perception de chaque partie du corps du bien-aimé».

Ce conseil, le compositeur Joseph Gelineau l’a donné aux 180 choristes de la Semaine romande de musique et de liturgie (SRML) en

train de préparer son «Cantique des Cantiques». Les participants

à la création mondiale de cette oeuvre musicale à Saint-Maurice,

sous la direction du chanoine Jean Scarcella, n’oublieront pas de

sitôt l’événement vécu en cette mi-juillet.

Comme chaque année, la SRML offre des cours de chant, de solfège, d’initation musicale, de direction chorale, de connaissance

historique et liturgique, d’orgue et autres instruments. La SRML

de juillet 1996 a vécu tout cela, et plus encore… avec la création du «Cantique des Cantiques» de Gélineau.

Dans une basilique pleine à craquer, aux voûtes transformées

en arcs arabisants, la soprano Haïda Housseini (la bien-aimée),

de Fribourg, et le ténor Christian Reichen (le bien-aimé), de

Neuchâtel, ont eux aussi été traversés par cette musique «écrite

avec la plume du Saint-Esprit». Une partition inédite qui donne

sa vraie dimension au chant le plus mystique et le plus érotique

de la Bible.

Rien n’est laissé au hasard dans l’écriture diaphane de cette

oeuvre modale, explique le chef Jean Scarcella, chanoine de

Saint-Maurice et curé de Bex (VD). L’aspect auditif permet de visualiser les grands symboles du poèmes, les montagnes, les cités,

les arbres, les eaux, les animaux, les plantes et les deux figures centrales: Elle et Lui. Les répons chorals sont conçus comme

des mises en scènes. C’est extraordinaire d’être parvenus à monter l’oeuvre en cinq jours et d’avoir ainsi pu donner une voix à

Dieu pour dire son amour, reconnaît le président des SRML, l’abbé

Jean-Jacques Martin, curé de Romont.

Les mots du désir humain

Depuis la traduction des psaumes en français, avant le Concile

Vatican II, je n’avais jamais senti aussi bien mon rôle d’instrument de quelque chose qui me dépasse, ajoute Joseph Gelineau, jésuite, actuellement curé de plusieurs petites paroisses du côté

de fontainebleau (France). Le climat homogène, soutenu, la continuité et l’intériorité du travail musical ont permis de coudre

ensemble tous les morceaux du Cantique. Quelques imperfections

n’ont pas entaché l’écoute exceptionnelle de l’assemblée et la

qualité de son silence, observe le compositeur qui a vu à quel

point le peuple de Dieu soulevé par la Parole pouvait se mettre

en Dieu.

Les chanteurs, organistes, chefs de choeur et prêtres de la

«Semaine romande» (parmi lesquels un pasteur neuchâtelois et plusieurs réformés) sont venus lui dire qu’entrer dans cette oeuvre

était une révélation spirituelle. Certains n’avaient même jamais

lu le Cantique. Ils ont été bouleversés par les mots les plus

simples et les plus profonds du désir humain.

Besoin d’amour

Au moyen-âge, la spiritualité se nourrissait du mystère de la

Passion du Christ. Le renouveau liturgique a mis en lumière la

Croix du Vivant qui nous sauve. Aujourd’hui se révèle entre la

Genèse et l’Apocalypse le mystère nuptial, balançant entre quête

et extase. Selon le Père spirituel de la réforme liturgique, on a

besoin de l’amour, de la joie, de la paix et de l’infini respect

des autres et de soi qui ressortent de ces textes inépuisables.

Pour dépasser les images de souffrances omniprésentes de notre

époque et nourrir notre façon de vivre et d’aimer.

Joseph Gelineau n’a jamais rêvé de faire une grande oeuvre de

musique sacrée. Après Vatican II, il a répondu à d’innombrables

commandes de paroisses ou de communautés religieuses. Il n’y a

guère que son Requiem «Qu’ils reposent» pour choeur et orchestre

qui ait été écrit «en toute gratuité». «Une musique oecuménique

acceptable pour tout homme de bonne volonté, apportant la clarté

et la paix indispensables lors de funérailles». Une pièce issue

d’une nécessité intérieure, comme le «Cantique des Cantiques».

Rejoindre les plus éloignés

Le Père Gelineau ne se reconnaît pas dans l’expression «compositeur de musique liturgique». Il a composé des hymnes et des

centaines voire des milliers d’antiennes ajustées à la langue

française. Créer toutes les expressions du dialogue avec Dieu,

voilà le travail de sa vie. A Saint-Ignace, à Paris, chez les Pères jésuites, il disposait d’une chorale, de l’orgue. Un luxe de

moyens qu’il n’a plus depuis qu’il est curé de petites paroisses

dans les forêts de Fontainebleau. Il y trouve cependant encore

plus de gaîté. Il a dû retourner radicalement aux sources de

l’expression liturgique pour rejoindre à la fois jeunes et vieux,

pratiquants réguliers ou paroissiens éloignés de l’Eglise. (apicmjp/pr)

ENCADRE

Le baiser de Dieu

Si Dieu n’est pas nommé dans le «Cantique des Cantiques», il

faut savoir lire entre les lignes. Certains mystiques n’y voient

qu’une allégorie de l’amour de Dieu pour son Eglise. D’autres

n’entendent qu’une chanson d’amour. Pourquoi mettre d’un côté la

manière et de l’autre Dieu? demande Joseph Gelineau.

Le «Cantique des Cantiques» n’a pas d’autres objet que l’amour

d’un homme et d’une femme qui passe par le corps, la bouche, le

parfum, l’étreinte. En insérant ces chansons d’amour dans la Bible, on a voulu montrer qu’on a un seul coeur pour aimer sa femme, ses amis et Dieu.

Le texte veut bien dire ce qu’il veut dire et en même temps

illustre l’amour de Dieu pour les hommes. Comme les psaumes ont

un sens premier et une signification dans le Christ, précise le

jésuite, auteur de la première traduction liturgique du Cantique.

La composition musicale fait ressortir l’aspect sacramentel: «Je

suis traversé, je touche Dieu et Dieu me touche». Aucune union

humaine n’est aussi profonde et intime. C’est le baiser de Dieu».

(apic/mjp/pr)

ENCADRE

Les enfants de la Semaine romande à la Pelouse

Parallèlement à la SRML de Saint-Maurice, à l’instigation de

Jean-Pierre Cap et de Anne-Françoise Andenmatten, une Semaine de

musique et de liturgie a réuni 13 enfants à l’Institut de La Pelouse, à Bex (VD). Trois animatrices ont pris en charge les ateliers du matin – initiation musicale, préparation de célébrations

et aspects visuels – et trois accompagnants les activités de détente de l’après-midi. Les enfants de 7 à 11 ans ont par exemple

rencontré Nicolas Buttet, l’ermite de Notre-Dame du Scex. Ils ont

pris part à la célébration eucharistique avec enfants de Joseph

Gelineau, le mercredi soit à la basilique de Saint-Maurice, qui a

mis un terme à la journée consacrée aux prêtres de Romandie et

qui a réuni 60 d’entre-eux, deux évêques, des vicaires généraux

et épiscopaux.

Les enfants ont en outre pu assister à la création du «Cantique des Cantiques» et partager le repas de clôture de la SRML au

collège Saint-Maurice. Ils ont également offert deux veillées à

leurs parents et amis le mercredi et samedi soir, leur présentant

une quinzaine de chansons orchestrées et de prières accompagnées

de gestes. (apic/mjp/pr)

Des photos de la création du «Cantique des cantiques» ainsi

que des portraits de Joseph Gelineau, du chef d’orchestre Jean

Scarcella et des deux solistes Haïda Housseini et Christian Reichen peuvent être obtenues à l’Agence CIRIC, à Lausanne.

19 juillet 1996 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 5  min.
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