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apic/Congar/Décédé à 91 ans/Grand théologien de l’Eglise catholique

Paris: Décès du grand théologien français Yves Congar(220695)

Le cardinal Congar fut le théologien du renouveau ecclésiologique

Un grand théologien du mystère de l’Eglise

Paris, 22juin(APIC) Le cardinal français Yves Congar, l’un des grands

théologiens catholiques de ce siècle, est décédé jeudi matin à l’Hospice

des Invalides. C’est là qu’était soigné depuis une dizaine d’années le célèbre dominicain âgé de 91 ans qui aurait dû être créé cardinal par le pape

Jean Paul II le 26 novembre 1994.

En raison de son état de santé, Yves Congar n’avait pu faire le déplacement de Rome pour y recevoir des mains du pape les insignes de cardinal. Il

reçut la barette des mains du cardinal Johannes Willebrands, camerlingue du

Collège cardinalice, le 8 décembre 1994, en la chapelle des Invalides.

Longtemps peu en odeur de sainteté dans l’Eglise catholique, Yves Congar

fut réhabilité par le pape Jean XXIII et joua comme expert un rôle important au Concile Vatican II. A noter que le cardinal Congar ne fut jamais

ordonné évêque.

Par son oeuvre théologique centrée spécialement sur le mystère de

l’Eglise – et aussi sur l’oecuménisme – le Père Congar est mondialement

connu. Malgré un moment de défiance de la part du Saint-Office – ancienne

appellation de la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi -, il

gardera une fidélité aimante à l’Eglise. Pleinement réhabilité par Jean

XXIII, il sera un des experts qui a marqué de son empreinte le Concile Vatican II.

Né le 13 avril 1904 à Sedan, dans les Ardennes, il passe deux ans au Séminaire universitaire des Carmes à Paris et avant d’entrer en 1925 au noviciat des dominicains. Durant son scholasticat au Saulchoir, en Belgique, il

a pour maître le Père Marie-Dominique Chenu qui aura une grande influence

sur lui. Ordonné prêtre en 1930, lecteur en théologie en 1931, il doit remplacer au pied levé le Père Chenu pour le cours d’»Introduction à la théologie».

Pour un oecuménisme catholique

Il suit alors à Paris les cours des grands maîtres de l’époque, Gilson,

Le Bras, Jacques Maritain. C’est chez ce dernier qu’il rencontre Emmanuel

Mounier, le fondateur de la revue «Esprit». Il revient ensuite au Saulchoir

enseigner «l’apologétique» qui devient vite un cours sur l’Eglise.

En 1937, il lance aux éditions du Cerf la collection d’ecclésiologie

«Unam Sanctam» dont le premier volume est de lui: «Chrétiens désunis, principes d’un oecuménisme catholique». Par cet ouvrage, il marque un tournant

important dans l’oecuménisme de son Eglise: au lieu de batailler et de polémiquer contre les autres confessions chrétiennes, il s’engage à chercher

chez les autres chrétiens les éléments de vérité qui s’y trouvent pour les

embrasser.

La deuxième guerre mondiale et cinq ans de captivité (1939-1945) interrompent son travail théologique. Dans son camp en Allemagne (où se trouve

aussi Jean Guitton) il donne de nombreuses conférences et lutte à sa manière contre l’idéologie nazie. A son retour en France, il collabore régulièrement à l’hebdomadaire «Témoignage Chrétien» nés de prêtres et de laïcs

engagés dans la Résistance. Dès 1948, il vit davantage retranché dans un

travail intellectuel intense. Deux grands livres en sortiront: «Vraie et

fausse réforme dans l’Eglise» et «Jalons pour une théologie du laïcat».

Persécuté par sa propre Eglise, réhabilité par Jean XXIII

Durant cette période cependant, les dénonciations contre sa théologie comme contre celle d’autres confrères dominicains – ne cessent d’être envoyées à Rome. En 1954, dans une période de raidissement doctrinal, inaugurée par l’encyclique «Humani generis» de Pie XII, ses supérieurs l’envoyent

en «exil»: Terre Sainte, Rome, Cambridge, Strasbourg. Sa fidélité répond à

la méfiance qu’on exerce contre lui. Avec le pape Jean XXIII arrive enfin

l’heure de la réhabilitation.

Désigné comme expert au Concile Vatican II (1962-1965), le Père Congar y

joua un rôle important et fut membre d’un groupe «pour une Eglise servante

et pauvre», avec d’autres théologiens renommés comme le Père Chenu, Dom

Helder Camara et Mgr Ancel. Après le Concile, il poursuivra sa recherche

théologique, malgré l’âge et les difficultés de santé. Il publiera en particulier une revue sur l’Esprit-Saint; outre ses travaux sur l’EspritSaint, il poursuivra sa recherche théologique sur les chantiers de l’oecuménisme et du laïcat.

Dans une interview accordée il y a 2 ans au mensuel italien «Trenta

Giorni», le théologien français estimait que tout, dans l’Eglise catholique

ne doit pas être soumis au pape. Il proposait à cette occasion un certain

nombre de pistes pour donner plus de poids à la collégialité des évêques,

qualifiant la collégialité d’»acquis majeur du Concile» et relevant que «le

pouvoir du pape n’est pas absolu». «Il est évidemment lié à l’Ecriture, aux

Conciles oecuméniques et aux éléments immuables de la tradition». Yves

Congar avait réfuté dans cette interview le qualificatif de «progressiste»

qui lui était souvent accolé: «C’est absurde. Je suis en même temps très

conservateur. Je suis totalement pour la tradition: je lui ai consacré

trois livres». (apic/theo/be)

22 juin 1995 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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