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apic/Lausanne/Drogue
Lausanne: Drogue aux portes de l’église St-Laurent (290994)
La paroisse de St-Laurent invite au dialogue
témoins et acteurs de la «scène ouverte» lausannoise
Lausanne, 29septembre(APIC) Les marches menant à l’église St-Laurent, à
Lausanne, sont devenues un lieu d’échange et de ralliement pour la population toxicomane lausannoise. St-Laurent n’a rien cependant de comparable
avec le Letten: une quinzaine de toxicomanes en moyenne s’y retrouvent chaque jour, mais beaucoup plus gravitent régulièrement autour de cet endroit.
Néanmoins cette présence visible au coeur des rues marchandes créé un
malaise. Des commerçants ont fait circuler des pétitions demandant notamment d’interdire par des barrières l’accès aux marches de l’église. Certains paroissiens de leur coté se plaignent de la saleté aux abords du lieu
de culte. D’autres habitants du quartier se préoccupent des effets incitatifs de cette «scène ouverte de la drogue» sur les mineurs. On craint aussi
les agressions et les actes de violence qui pourraient se développer. C’est
dans ce climat que la paroisse de St-Laurent a pris l’initiative, soutenue
par la municipalité, d’organiser une rencontre destinée à dédramatiser la
situation, mais surtout à permettre d’instaurer un dialogue entre autorités, témoins et acteurs. Cette rencontre a eu lieu lundi soir dans l’église
même.
L’ampleur du problème de la drogue dépasse largement les escaliers de
Saint-Laurent et le conseil de la paroisse du centre ville – favorable à
une époque à une solution de «nettoyage» – en a pris conscience. «Il faut
faire avec, estime Henri Chabloz, diacre à Saint-Laurent, et lutter contre
toute forme d’exclusion.» Pour ses «paroissiens des marches», mais aussi
pour d’autres démunis du quartier, l’église de St-Laurent a mis sur pied,
avec l’appui d’un certain nombre de commerçants, une distribution de nourriture qui a lieu tous les mercredis soirs. L’église se veut ouverte, sans
barrière, et dans cette optique, des moments de prières ont lieu cinq fois
par semaine.
Une politique communale plus claire
Le phénomène de la drogue est un problème de société, plusieurs intervenants, au nombre desquels la syndique de Lausanne Mme Yvette Jaggi, l’ont
rappelé. Sur le plan local, trois motions sont pendantes, demandant à la
municipalité une définition claire de la politique communale face au problème. En ce qui concerne le site de St-Laurent, la volonté des autorités
est de diminuer son attractivité. La police municipale, qui a du reste renforcé sa présence, opère selon deux axes: prévention auprès des mineurs,
dans les écoles et sur le terrain, et répression lorsqu’une infraction est
constatée, a expliqué Gérald Hugenlocher, commandant de la police lausannoise.
4 000 toxicomanes sont recensés dans le canton. L’an dernier, la police
vaudoise a saisi 44 kg de cannabis, 16 kilos d’héroïne et 600 grammes de
cocaïne, ce qui représenterait, selon le commandant de la police vaudoise,
5% des produits consommés dans le canton. La région zurichoise demeure le
principal pourvoyeur de produits.
Un certain desarroi dans la volonté d’aller plus loin
L’église bondée lundi soir et le débat parfois virulent témoignaient du
degré de préoccupation, mais aussi parfois d’incompréhension entre certains
participants et toxicomanes présents.
Selon Dominique Lehnherr, responsable du centre d’acceuil Bethraïm, il
n’y a pas vraiment eu de dialogue entre toxicomanes et commerçants. Chacun
lancait des cris du coeur mais personne n’écoutait vraiment. On a ressenti
un très grand désarroi, celui des commerçants, puisque les toxicomanes
«nuisent» à leurs affaires, et celui des toxicomanes qui n’ont pas trouvé
de réponse et qui ont poussé la logique de la société jusqu’au bout. Aucune
proposition concrète et réaliste n’a vraiment été avancée, si ce n’est un
pharmacien qui proposait de mettre à disposition un local avec des
seringues. Mettre à disposition des toxicomanes des locaux inoccupés, est
aux yeux du responsable du centre Bethraïm une proposition utopique. Les
toxicomanes ont besoin d’un certain encadrement. «Nous n’avons pas la
volonté de «parquer» les toxicomanes à quelque part, estime une
commerçante, mais il faut que la commune intervienne et mette des fonds à
disposition.» Pour Dominique Lehnherr, la solution serait de créer un petit
comité avec un médiateur qui poserait les bonnes questions et qui oserait
aller jusqu’au bout des choses. Aucune solution miracle n’est apparue, mais
la rencontre aura permis un début de dialogue. L’expérience pourrait
d’ailleurs se renouveler sous une autre forme, en plus petit comité.
Bethraïm est un centre d’acceuil de jour qui offre aux toxicomanes une
occasion de s’enraciner et de reprendre le contact avec la vie. Ce centre
catholique offre des moments de recueillement le matin, le repas de midi et
des activités en atelier l’après-midi.
Quant à mère Sofia, également présente à ce débat, elle est très
heureuse que les mères de familles aient participé à la discussion . C’est
la première fois qu’un dialogue a pu être engagé entre les toxicomanes, les
commerçants, la municipalité et les éducateurs, tous réunis en un même
lieu. Même si, selon elle, cette confrontation était mal préparée et n’a
pas donné les résultats escomptés: » Il n’y avait aucune préparation et
celui qui a présidé le débat ne contrôlait pas la situation et ne
connaissait visiblement pas le problème de la toxicomanie. Ce débat aurait
pu être extrêmement constructif, c’était merveilleux d’avoir le peuple, la
municipalité et les toxicomanes, ça ne s’est jamais vu, c’est inédit» .
Mère Sofia demande à la commune de Lausanne la mise sur pied d’un centre
d’acceuil, ouvert 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, pour les toxicomanes
avec une équipe pluridisciplinaire, un lieu où «les personnes toxicomanes
peuvent être entendues, écoutées, orientées». Mais, selon les représentants
politiques locaux présents, ce soir là, il n’y a pas d’argent.
(apic/spp/eb)