Autrichien de naissance, européen de formation et de conviction, le dominicain Christoph Schönborn qui reçoit samedi à Rome le chapeau de cardinal est aussi profondément «fribourgeois». Il a vécu et enseigné dans la ville des bords de la Sarine durant qui

Archevêque de Vienne depuis deux ans, Mgr Schönborn avait déjà acquis dès 1987 une dimension mondiale en devenant le Secrétaire de la Commission de rédaction du Catéchisme de l’Eglise catholique. Un travail gigantesque, effectué ici à Fribourg, témoignent ses deux confrères de l’Albertinum, les Pères Pinckaers et Mehrle. Des milliers de pages de remarques en provenance des épiscopats de toute la planèt ont afflué à Fribourg, qu’il a fallu dépouiller, trier, cataloguer. Tout cela en continuant d’assurer son enseignement en théologie dogmatique à l’Université.

Un parcours de premier de classe

La biographie de Christoph Schönborn est celle d’un premier de classe à qui tout réussit ou presque. De quelqu’un qui est capable de faire valoir sa supériorité intellectuelle sans arrogance, mais avec bienveillance et sérénité. «C’était un confrère serviable et très agréable… un peu irritable, mais avec l’âge ce défaut s’est beaucoup amélioré», rappelle avec un sourire le Père Mehrle. «Attentif aux autres, apprécié de la plupart de ses étudiants, il sait aussi se rendre accessible aux marginaux et aux plus humbles», renchérit le Père Pinckaers.

Christoph von Schönborn est né le 22 janvier 1945, à Skalken, (Skalsko) en Bohème. En septembre de la même année, sa famille qui appartient à la haute aristocratie autrichienne, doit fuir la Tchécoslovaquie pour s’installer en Autriche. Il entre chez les dominicains à l’âge de dix-huit ans et entame ses études à Bonn, puis au Saulchoir, près de Paris entre 1967 et 69. A l’instar de la société française secouée par mai 68, les dominicains vivent eux-aussi une période troublée. Christoph Schönborn tient bon, avec quelques camarades, il insiste pour que l’enseignement de saint Thomas d’Aquin soit maintenu et renforcé.

Après sa licence en théologie, il est ordonné prêtre à Vienne en 1970 puis poursuit sa formation à l’Institut des hautes études, à la Sorbonne et à l’Institut catholique de Paris. Il y est à l’école du Père Yves Congar, un des artisans de Vatican II. La rencontre à la même époque avec Hans Urs von Balthasar compta aussi beaucoup pour lui. Deux théologiens qui furent fait cardinaux peu avant leur mort.

En 1974, le Père Schönborn obtient son doctorat en théologie avec une thèse consacrée à Sophrone de Jérusalem. Les Pères grecs et saint Thomas sont les deux aliments qui nourrissent sa réflexion théologique, explique le Père Mehrle.

A Fribourg dès 1976

Après un passage de deux ans comme aumônier des étudiants à Graz, Christoph Schönborn est appelé en 1976 comme professeur extraordinaire de théologie dogmatique, à l’Université de Fribourg. Face à l’opposition d’une partie des étudiants alémaniques qui le jugent trop conservateur, il fait alors preuve d’un courage certain, estime son confrère le Père Pinckaers. La plupart en fait l’apprécient, comme en témoignent la cinquantaine de thèses de doctorats qu’il a dirigées.

Changement de cap en 1991, avec sa nomination comme évêque auxiliaire de Vienne. Conservateur, sans être réactionnaire ni doctrinaire, à l’inverse de certains de ses confrères autrichiens, il est bien accepté par les Viennois qui reconnaissent son sens du dialogue.

Nouvelle tourmente en 1995 lorsqu’il hérite de la difficile succession du cardinal Hans Hermann Groer obligé de quitter son poste après des accusations d’abus sexuels commis sur des adolescents et des adultes. L’Eglise autrichienne est profondément choquée et divisée, les «pétitions du peuple de Dieu» réclament haut et fort des changements. Mgr Schönborn réagit avec clarté et fermeté, sans refuser le dialogue. Avec un certain succès.

Demain «papabile»

Côté Vatican, le parcours du Père Schönborn est aussi celui du bon élève. Membre de la Commission théologique internationale dès 1981, il est proche du cardinal Joseph Ratzinger qu’il connaît depuis le temps de ses études Dans sa tâche de rédacteur du catéchisme, il noue de nombreux liens à la curie. En 1993, le pape le nomme consulteur du Conseil pontifical pour la culture. Mgr Schönborn est l’homme de confiance du pape Jean Paul II pour les relations avec les orthodoxes, en particulier avec le patriarche de Moscou, Alexis II qu’il rencontre à plusieurs reprises. En 1996, Mgr Schönborn est invité à prêcher la retraite de Carême au Vatican. Il est aujourd’hui cardinal. Demain «papabile» ?  » Nous ne voulons pas jouer les prophètes», répondent en cœœur ses confrères dominicains qui attendaient la question. (apic/mp)

19 avril 2001 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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