"Baisse la garde" aborde la reconstruction de Philippe, accueilli au sein de la fraternité Eucharistein | © stage-86.com
Suisse

«Baisse la garde», de Christophe Giordani: la rage de s'en sortir

«Baisse la garde» du réalisateur Christophe Giordani sera diffusé dimanche soir 31 mars 2019 sur RTS Deux. Le film documentaire retrace une année de la vie de Philippe. Un jeune à la dérive qui, grâce à la communauté Eucharistein, amorce une reconstruction personnelle et professionnelle.

Philipe est Brésilien. Adopté à l’âge de cinq ans par une famille valaisanne, il est en proie depuis l’enfance à une violence intérieure qui le conduira en prison. A 24 ans, père d’une petite fille dont la garde lui est interdite, il se retrouve en semi-détention. Il passe ses journées au sein de la Fraternité Eucharistein et retrouve sa cellule pour la nuit. C’est à Philippe et à sa quête de rédemption que le réalisateur Haut-Savoyard Christophe Giordani consacre son premier long-métrage documentaire.

Pour quelles raisons avez-vous suivi Philippe? 
Christophe Giordani: Je cherchais un personnage en réinsertion pour aborder une trajectoire de reconstruction, mais aussi les traits de sa personnalité, son environnement familial, social et culturel. J’ai suivi une personne dont la vie est jalonnée d’obstacles, dont un majeur: la prison. Mais qui cherche à s’en sortir. Cette volonté d’évoluer de manière positive m’intéresse. Je ne veux pas céder à l’ironie, au cynisme ou à la violence gratuite.

Son besoin d’enracinement, sa quête identitaire et ses aspirations psycho-affectives: l’histoire de Philippe nous concerne tous, indépendamment de nos parcours de vie.


Baisse la garde – Extrait


Que cherchez-vous à transmettre à travers ce film? 
Susciter le débat, la réflexion, sans parti pris pour un personnage précis. Laisser le spectateur se forger son opinion. Je suis Philippe, je donne la parole à ceux qui ne sont pas toujours d’accord avec lui, à commencer par les religieux ou ses proches. Il s’agit d’aider le spectateur à s’immerger au cœur du récit. Par moment, je filme de très très près, au cœur de l’intimité des personnages. Tout en prenant aussi du recul parfois, pour permettre une distance propice à la réflexion et pour immerger le spectateur dans les grands espaces des massifs montagneux.

Un documentaire comme celui-ci implique d’aller au fond des choses, mais également une certaine pudeur. De l’autre côté de la caméra, Philippe et ses proches ont eu le courage et l’humilité de se dévoiler, je me devais d’être attentif à cela, nous avons de vraies responsabilités éthiques quand on pratique du cinéma d’immersion dans le réel.

Justement, comment gagner la confiance de vos interlocuteurs? 
La transparence est essentielle. Je passe beaucoup de temps expliquer ce que je fais, à détailler mon intention, à poser un cadre à mon travail avec le plus d’intégrité possible sur tous les aspects pour confronter mon point de vue aux faits. Et puis, je m’intéresse sincèrement au parcours de vie de mes interlocuteurs. J’ai besoin de prendre le temps d’observer avec bienveillance. Et quand vient le moment de tourner, j’emporte un matériel discret.

Vous avez passé de longues heures en immersion au sein de la Fraternité Eucharistein. Quel regard posez-vous sur cette communauté? 
Ils font un travail proche de celui des éducateurs sociaux, avec ceci de particulier qu’ils vivent avec les personnes qu’ils accueillent. C’est une communauté mixte, bien plus ouverte que ce qu’elle en a l’air. A leur contact, on s’interroge sur des questions fondamentales. Par exemple: jusqu’où peut-on aider les autres? Ils ont permis à Philippe de retisser des liens familiaux, de réapprendre les fondamentaux du vivre ensemble, tout lui donnant d’amorcer une nouvelle formation professionnelle. Cette capacité d’être à la fois dans le social et le spirituel est très originale, selon moi. Eucharistein intègre ces deux dimensions. Je voulais les filmer du point de vue d’une personne accueillie, c’est ce qui fait l’originalité de ma démarche. (cath.ch/pp)


Christophe Giordani, réalisateur, est originaire de Haute-Savoie. Diplômé en Bachelor Réalisation à l’ECAL et en Master Scénario à l’ECAL, il signe avec «Baisse la garde» son premier long-métrage documentaire.

«Baisse la garde» aborde la reconstruction de Philippe, accueilli au sein de la fraternité Eucharistein | © stage-86.com
31 mars 2019 | 09:14
par Pierre Pistoletti
Temps de lecture: env. 3 min.
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