«Des variantes bien européennes de la critique générale face à Israël»
Israël: Utilisation de découvertes archéologiques à des fins politiques
Jérusalem, 15 juin 2012 (Apic) Les récentes découvertes archéologiques des temps bibliques en Israël ont suscité une polémique. Leur interprétation comme «preuve d’historicité» des textes bibliques fait débat non seulement parmi les experts. Israël, blâment ses détracteurs, utilise l’archéologie comme instrument afin de souligner la présence juive en territoire contesté. Pour les représentants des différentes écoles scientifiques, ce reproche global «d’abus politique» est injustifié.
Nonobstant les critiques formulées par certains courants actuels, Israel Finkelstein, professeur d’archéologie à l’Université de Tel Aviv, affirme que les Israéliens comptent parmi les meilleurs archéologues du bassin méditerranéen. Les reproches, dit-il, sont des variantes «bien européennes» de la critique générale face à Israël. En même temps, le professeur constate une «deuxième vague» d’approche archéologique traditionaliste qui consiste à lutter contre une critique de la bible et qui correspond à un phénomène global de mouvements fondamentalistes. «Quelques théories ne sont même pas à la hauteur de la critique de la bible du 17e siècle», constate Finkelstein, qui ne se considère pas comme «minimaliste» mais qui attribue à une interprétation critique de la bible une valeur historique. «Mais il est impossible de prendre un chapitre du livre de Samuel et se promener à Jérusalem afin de trouver des preuves archéologiques!»
Le professeur Josef Garfinkel, archéologue à l’Université Hébraïque de Jérusalem, n’accepte pas les objections de son collègue. Ses résultats, dit-il, se basent sur des méthodes scientifiques comme par exemple les datations radiocarbone. Son intérêt n’est pas de «prouver que la bible a raison». En même temps, pour Garfinkel, il est évident que les découvertes récentes coïncident bien avec les récits bibliques de l’époque des rois. «L’école archéologique dite critique nous propose d’autres explications, qui finalement sont aussi influencées par la tradition biblique, sauf qu’il ne se basent pas sur les traditions principales.» Les découvertes récentes, dit le professeur, ont «réfuté les différentes théories de l’approche minimaliste.»
La plupart des excavations sont complètement apolitiques
Finkelstein en revanche est convaincu que le bon chemin consiste dans un «aperçu moderne de l’histoire», même si aujourd’hui il est «plus facile de vendre le côté conservateur». L’archéologue explique que ce mouvement cherche à prouver la véracité de la bible et à démonter l’archéologie critique avec une certaine nostalgie: «Ce sont plus des questions d’identité que des motifs politiques ou nationalistes!». La politique ou les idées nationalistes, confirme aussi Garfinkel, ne jouent pas un grand rôle dans la recherche archéologique. En plus, souligne Finkelstein, seule une petite partie de toute l’activité archéologique exécutée en Israël est controversée. «La plupart des excavations sont complètement apolitiques»
Reste cette partie qui, d’après les deux scientifiques, est tout de même exposée à certains dangers d’instrumentalisation. Jérusalem, surtout, est un terrain délicat pour les fouilles archéologiques et, comme l’affirme Garfinkel, des cas de manipulation de données existent. L’exemple souvent évoqué est la cité de David dont la gestion a été attribuée à l’organisation Elad. La gestion de ce site par des particuliers avec un agenda politique est problématique aux yeux des professeurs. D’un autre côté, ils apprécient et approuvent la mise en valeur de ce «site intéressant et important» rendu accessible au public. «Si les sponsors ont des intérêts politiques, cela ne veut pas dire que le travail archéologique n’est pas bon!», souligne Israel Finkelstein. Le seul but du travail scientifique de l’archéologue consiste à «mieux comprendre le passé», insiste Josef Garfinkel. «Si d’autres abusent des résultats scientifiques, que peut faire l’archéologue?»
Au-delà de toute divergence scientifique les chercheurs sont d’accord sur le fait que l’existence de David et de Salomon n’est pas remise en question. Et même la preuve explicite de leur non-existence, disent-ils, n’aurait pas de conséquence pour le présent: «Si on trouvait l’inscription ›Moi, le roi David, je n’ai jamais existé’ – est-ce que cela changerait aux avis politiques des fondamentalistes?» ironise Garfinkel. «Cette compétition de ›qui était là comme premier et qui doit quitter le pays’ est extrêmement idiote et ne mène nulle part», lance Israel Finkelstein. Car «l’avenir d’aucun être humain ici ne sera décidé par le passé!». (apic/ak/bb)