Lausanne: Un DVD d’entretiens avec des professeurs de L’EPFL et de l’université

Dialogue entre science et foi

Lausanne, 18 mars 2011, (Apic) Les aumôneries catholiques et réformées de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) ont relancé, intramuros, le dialogue entre science et foi. Un film d’entretiens avec des professeurs de l’université de Lausanne et de l’EPFL a été réalisé à cette occasion. Projeté pour la première fois jeudi 17 mars, il a été suivi d’un débat riche et instructif.

C’est à l’instigation de Maria Zufferey et Christian Vez, aumôniers de l’EPFL, que le projet d’entretiens filmés avec des professeurs sur le dialogue entre science et foi a pu voir le jour. Christian Vez confie que l’idée est venue suite au désarroi de doctorants trouvant que la question de Dieu était malheureusement absente de leurs études. Il n’était d’emblée pas évident d’aborder une telle question «que plus on creuse plus elle devient profonde». Certains professeurs se sont prêtés au jeu, exprimant librement leur point de vue de scientifiques devant la caméra, en répondant à trois question: Y-a-t-il un sens dans l’organisation de l’univers? Qu’est-ce que l’idée de Dieu vous évoque-t-elle? Comment science et foi peuvent-elles être compatibles?

Chercheur en science, chercheur de sens

Rassembler et généraliser les positions des professeurs a semblé une initiative très difficile à réaliser. «Un tel nous dit que l’idée de Dieu n’est pas une idée, ça vit. Un autre prétend que chacun se fait son idée, c’est personnel. Ou encore: La science ne découvre pas Dieu, elle abat les idoles créées par l’homme au cours des siècles.» Afin de clarifier cet ensemble hétéroclite d’opinions, les aumôniers avaient invité le Père Philippe Deterre, prêtre de la mission de France et chercheur au CNRS, spécialisé en immunologie. Il a donné pour règle valable dans nos sociétés marquées du sceau de l’âge scientifique qu’il faut s’attendre à autant d’interprétations des résultats de la science qu’il y a de scientifiques. Toutefois la science travaille – négativement ! – c’est-à-dire qu’elle élimine des interprétations, très souvent à raison et donc définitivement. C’est reconnaître tout de même que le monde n’est pas un chaos, mais une organisation qui se laisse découvrir. D’ailleurs ne faut-il pas au scientifique une certaine foi, une certaine confiance que tout n’est pas chaos, pour s’engager dans une voie de recherche toujours longue et laborieuse? Le chercheur en science devient chercheur de sens; il n’est pas l’ennemi de la foi.

Quant au croyant, le travail de purification des interprétations entrepris par les scientifiques ne l’ébranle pas. Sa foi ne le fait pas adhérer à un scénario. Il ne s’agit concrètement pas de réciter l’agenda de Dieu lors des premiers jours de la création, mais de rendre compte de l’inouï de Dieu.

Les deux contributions succédant à celle du Père Deterre s’en écartaient considérablement. Le professeur Georges Meylan, astrophysicien, était d’avis que la science prononce un discours unique alors que la religion est diverse, culturelle. Il ne faut jamais les mélanger et considérer plutôt que la science ne s’occupe que du «comment», jamais du «pourquoi». Ce qui fait la force de sa méthode repose sur l’abandon de l’idée de Dieu, devenue une hypothèse inutile.

Finalement, le professeur Yann Barrandon, biologiste spécialiste des cellules souches, a raconté son expérience traumatisante vécue à l’Université de Fribourg, lors d’un débat sur le clonage reproductif à partir de cellules souches. Lui, le médecin, manipulateur du vivant, a bien cru finir brûlé en place de Grève, ou plutôt dans le cas présent, dans les flammes du Guintzet. Son contradicteur, Monseigneur Genoud, passait aux yeux du public pour le défenseur du bien, qui devait triompher du démon. Parfois le dialogue entre science et foi semble impossible.

Débats et silence

La réflexion publique s’est poursuivie avec les contributeurs et les professeurs s’étant exprimés dans le film. Entre autres discussions, le professeur Jacques Neirynck avait affirmé que la science a pu naître en occident grâce au monothéisme chrétien: le soleil, la lune, la nature n’étaient dès lors plus considérés comme des divinités intouchables; ces réalités devenaient à la portée de l’entendement humain. Le professeur Meylan contestait ce raisonnement en précisant qu’en astronomie les archives les plus anciennes sont chinoises et que, par-dessus tout, énormément de données historiques sur les sciences précédant le christianisme sont perdues.

Les débats se sont poursuivis entre les onze invités lorsque le professeur Theo Lasser, spécialiste d’optique biomédicale, a égrainé quelques phrases tranchant radicalement dans les discussions: «La science veut comprendre et enseigner, mais la foi se pratique. On peut seulement comprendre la foi si on la pratique.» Un silence complet s’est soudain fait dans l’auditoire CO1 de l’EPFL, pour accueillir ces paroles. Puis lui ont succédé les applaudissements nourris des trois cents personnes présentes dans la salle.

Le Père Philippe Deterre a conclu en affirmant: «Il y a des choses que nous pouvons savoir, mais qu’en tant qu’humain nous n’avons pas besoin de savoir». Ainsi en va-t-il parfois du sexe d’un fœtus que certains se réjouissent de ne découvrir qu’à la naissance.

Note: Le DVD «Science et foi», réalisé par les aumôniers de l’EPFL, ne sera pas diffusé. Il peut cependant être commandé à Maria Zufferey: maria.zufferey@epfl.ch (apic/pf/bb)

18 mars 2011 | 14:47
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture: env. 4 min.
EPFL (5), Lausanne (221)
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