Rome: Les polémiques divisent la communauté juive en Italie à propos du Vatican
En cause: les libéraux seraient trop proches de l’Eglise catholique
Tel Aviv/Rome, 21 mai 2014 (Apic) Présente à Rome depuis 22 siècles, la communauté juive d’Italie est aujourd’hui divisée. «Libéraux» et «conservateurs» s’affrontent à propos des relations à entretenir avec l’Eglise catholique et le Vatican. Alors que le pape s’apprête à visiter la Terre Sainte en compagnie de deux de ses amis argentins, le rabbin Abraham Skorka et le responsable musulman Omar Abboud, une polémique secoue l’Union des Communautés juives d’Italie (UCEI).
L’Italie compte quelque 35’000 juifs enregistrés au sein de l’»Unione delle Comunità Ebraiche Italiane» (UCEI), l’organisation faîtière nationale. La plupart sont concentrés dans les deux plus grandes villes du pays, Rome, qui compte près de 40% des membres de l’ UCEI, et Milan, 20%. Un certain nombre de juifs vivant en Italie ne sont pas membres de cette organisation, la plus représentative et la seule reconnue formellement par le gouvernement italien, mais sont rattachés à d’autres associations, notamment au judaïsme réformé ou à celles de la mouvance du mouvement Chabad-Lubavitch.
Un prétexte masquant une lutte pour le pouvoir
La communauté juive en Italie comprend tant des juifs laïcs que des juifs religieux, des Ashkénazes et des Sépharades, des orthodoxes modernes et des ultra-orthodoxes, des juifs assimilés et d’autres plus communautaires, des familles présentes dans le pays depuis des siècles et d’autres qui viennent d’arriver d’Israël, ainsi que des immigrants de la seconde génération venant d’Afrique du Nord et du Levant. Pendant des décennies, ces différents courants ont coexisté pacifiquement, écrit le quotidien israélien «Haaretz» dans son édition du 21 mai 2014, mais ces dernières années, des divergences se font entendre entre ceux qui se veulent ouverts aux autres et ceux qui réclament un repli communautaire.
Au centre de l’actuelle polémique qui échauffe les esprits au sein de la communauté, Renzo Gattegna, actuel président de l’UCEI, à qui les «conservateurs» reprochent d’être en trop bons termes avec les institutions catholiques. En bref, note «Haaretz», certains des membres les plus conservateurs de la communauté juive italienne reprochent aux «libéraux» de trop bien s’entendre avec l’Eglise catholique. Pour certains juifs progressistes italiens, il s’agit par contre d’un prétexte masquant une lutte pour le pouvoir.
Démissions en cascade au sein du conseil de l’UCEI
Le mois dernier, rapporte le journal israélien, sept membres du conseil de l’UCEI, tous de Rome et appartenant à son aile conservatrice, ont donné leur démission dans ce qui apparaît être un grave désaccord avec Renzo Gattegna, qui serait trop «centriste». Parmi les démissionnaires, on note la présence du charismatique président de la communauté juive de Rome, Riccardo Pacifici, et de la doctoresse Elvira Di Cave.
Cette dernière a justifié son retrait, sur un forum juif en ligne, en affirmant que c’était une réaction à une couverture excessive par les «Pagine Ebraiche», le journal de l’UCEI, des nouvelles catholiques. Elle reproche au directeur de la publication Guido Vitale de porter «à nos dépens» une trop grande attention à l’»Osservatore Romano», le quotidien officieux du Vatican.
Le président de l’UCEI accusé d’être «trop proche du Vatican»
En même temps, «Shalom» le magazine officiel de la communauté juive de Rome, qui soutient traditionnellement le camp conservateur, a publié un éditorial accusant Renzo Gattegna de ne pas être assez engagé dans la défense d’Israël et de dépenser de l’argent en promouvant une stratégie de communication «trop proche du Vatican». A l’instar de la doctoresse Di Cave, Giacomo Kahn, directeur du mensuel «Shalom», qui a signé l’article, est fâché de voir de fréquents articles de la presse catholique publiés par «Pagine Ebraiche».
En janvier 2010, lors de la visite du pape à la grande synagogue de Rome, s’adressant à Benoît XVI, Renzo Gattegna l’a salué au nom des 21 communautés juives d’Italie. Il a formulé à cette occasion le vœu d’une coopération entre juifs et catholiques pour la défense des droits de l’homme, en collaboration avec les musulmans, afin que le monde connaisse «une ère de paix». (apic/haar/be)