Amnesty International envoie un observateur

Etats-Unis: audience préliminaire pour John Walker Lindh, arrêté en Afghanistan

Londres, 15 juillet 2002. Un observateur d’Amnesty International (AI) assistera à l’audience préliminaire prévue lundi dans l’affaire de John Walker Lindh, citoyen des Etats-Unis arrêté en Afghanistan et inculpé dans son pays pour «complot avec intention de donner la mort» à des ressortissants des Etats-Unis, de soutien à Al Qaida et aux talibans.

La Cour fédérale de district d’Alexandria, en Virginie, examinera une requête demandant que les déclarations faites par John Walker Lindh pendant sa détention par les Etats-Unis en Afghanistan ne soient pas retenues à titre de preuve dans son futur procès, au motif qu’elles ont été obtenues dans des «conditions proches de la torture» et qu’elles n’étaient donc pas librement consenties. Pendant son interrogatoire dans une base de soldats des Etats-Unis près de Kandahar, en décembre dernier, l’accusé aurait en effet été enchaîné nu et les yeux bandés dans un conteneur métallique destiné au transport maritime. En outre, pendant toute la période où il a été interrogé en Afghanistan, cet homme n’a jamais été autorisé à consulter un avocat.

Aux yeux d’Amnesty International, les traitements que J. W. Lindh affirme avoir subis sont profondément choquants et soulèvent de graves questions au regard du droit des Etats-Unis et du droit international. Le droit international stipule que les informations arrachées sous la torture, les mauvais traitements ou la contrainte ne doivent pas être retenues à titre de preuve par un tribunal. En outre, les magistrats du parquet devraient refuser toute preuve ainsi entachée de suspicion. Amnesty International entend ainsi examiner avec soin les éléments de preuve présentés par les deux parties dans cette affaire.

L’observateur envoyé par AI sur place est David Marshall, ressortissant canadien, membre des barreaux de Londres, de New York, de la Cour fédérale de district du nord du Texas, et de la Cour suprême des Etats-Unis. De février 2000 à août 2001, il a dirigé le service de supervision du système judiciaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), dans le cadre de la mission des Nations Unies au Kosovo. David Marshall rendra compte de ses observations au Secrétariat international d’Amnesty International, à Londres.

Procès fixé au 28 août

John Walker Lindh fait semble-t-il partie des talibans qui se sont rendus au Front islamique uni pour le salut de l’Afghanistan (Front uni, généralement connu sous le nom d’Alliance du Nord) à Kunduz, en Afghanistan, en novembre 2001. Il a alors été incarcéré au fort de Qala-i- Janghi, à la périphérie de Mazar-e Sharif.

Fin novembre 2001, un soulèvement aurait éclaté dans cette prison, entraînant le massacre de centaines de détenus. Amnesty International a appelé les forces alliées à mener une enquête exhaustive sur cette affaire. Peu avant ces événements, la télévision avait montré des images de John Walker Lindh, les mains liées derrière le dos, en train d’être interrogé dans l’enceinte du fort par deux agents des Etats-Unis, dont l’un a été tué pendant le soulèvement. Lindh se serait caché pendant plusieurs jours dans un sous-sol du fort de Qala-i-Janghi, où de nombreux détenus se seraient retrouvés pris au piège et seraient morts bombardés de grenades et de roquettes et aspergés de carburant enflammé et d’eau glacée par les troupes de l’Alliance du Nord. Sorti blessé des décombres le 1er décembre, avec d’autres survivants, John Walker Lindh a été remis aux troupes des Etats- Unis.

Le prisonnier a ensuite été renvoyé aux Etats-Unis en janvier 2002 et a été inculpé de 10 chefs d’accusation, dont ceux de complot avec intention de donner la mort à des ressortissants américains, de soutien matériel et autre à Al Qaida et aux talibans, et d’usage d’armes à feu dans des crimes violents. Il est passible de la réclusion à perpétuité. Son procès doit s’ouvrir le 26 août 2002.

Les préoccupations générales d’Amnesty International sur le traitement des prisonniers détenus par les Etats-Unis en Afghanistan et sur la base de Guantánamo Bay – dont beaucoup ont été privés des garanties élémentaires prévues par le droit international – sont décrites dans un rapport publié en avril dernier. A ce jour, Washington n’a tenu aucun compte de cette note. Il est également resté sourd aux demandes d’Amnesty International de se rendre à Guantánamo Bay, où plus de 500 ressortissants de pays autres que les Etats-Unis sont détenus dans des circonstances incertaines, sans pouvoir consulter d’avocat et sans que leur statut n’ait été déterminé par un tribunal compétent, comme l’exige le droit international. (apic/com/pr)

15 juillet 2002 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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