Fécondité et pauvreté: une relation ambiguë (150190)
Genève, 15janvier(APIC) Il est généralement admis que l’accroissement démographique est l’une des causes majeures de la pauvreté persistante. Cependant, une enquête du BIT dans les campagnes très peuplées d’Asie méridionale, publiée par le bulletin de décembre d’»Informations OIT» (Organisation Internationale du Travail), montre qu’il n’existe guère de preuves
tangibles pour étayer une telle assertion.
Selon les auteurs de cette enquête, la principale difficulté réside
peut-être dans la diversité et la complexité des relations entre économie
et démographie. L’accroissement de la population est à la fois une cause et
une conséquence de la pauvreté: prétendre démêler de tels liens est une gageure. Une fécondité élevée est souvent une adaptation à la pauvreté. D’une
façon plus générale, de nombreux phénomènes démographiques fondamentaux
sont liés à une situation économique, ils s’expliquent par l’inégalité ou
la misère. Inversement, la pauvreté découle de facteurs sociaux qui conditionnent également la structure démographique.
Ces observations de caractère général figurent dans une étude récemment
publiée sur la situation au Bangladesh, en Inde, au Népal et au Pakistan.
Deux constatations majeures s’imposent.
En premier lieu, les effets indirects de l’accroissement démographique
sur la pauvreté sont aussi importants – sinon plus – que les effets directs. L’augmentation de la population affecte l’équilibre économique, social et technologique de diverses façons. Elle peut modifier la structure
de la distribution des terres et de la main-d’oeuvre. Elle peut également
encourager la transformation des systèmes de production et la diffusion de
la technologie. Au niveau des ménages, elle peut être à l’origine de différences considérables dans le comportement économique, la consommation et le
bien-être.
En second lieu, la pauvreté est une phénomène à dimensions multiples qui
affecte non seulement les niveaux de consommation, mais aussi des éléments
tels que les biens, la santé, l’éducation. En conséqunce, la relation entre
accroissement démographique et pauvreté n’est pas simple. L’insécurité sociale peut être réduite par une fécondité élevée, mais celle-ci peut être
responsable de niveaux de vie plus bas.
Familles nombreuses, chances supplémentaires?
L’étude n’a trouvé aucun élément prouvant que la pauvreté engendre une
fécondité élevée. En fait, certains indices suggèrent une relation inverse.
Les taux de natalité de la population pauvre tendent souvent à être inférieurs à ceux des groupes à revenu moyen. Cette situation peut s’expliquer,
entre autres, par le manque de terres, de formation et de possibilités
d’emploi ou de moyens d’organiser la migration des membres de la famille,
ainsi que par les effets directs de la pauvreté sur la fécondité. Par ailleurs, les taux de mortalité parmi les enfants de la population pauvre, les
paysans sans terres par exemple, peuvent être quatre fois plus élevés que
dans les familles des grands propriétaires fonciers. Il en résulte que les
ménages pauvres comptent relativement peu de membres.
Globalement, il semble que les familles les plus nombreuses ont une
meilleure chance d’acquérir des actifs productifs et d’aider leurs enfants
à trouver du travail. En outre, la pression démographique aggrave la pauvreté dans les zones rurales, puisqu’elle conduit non seulement à une réduction de la taille moyenne des exploitations, mais aussi à la privatisation
des terres. (apic/ioit/pr)