«Festi'Joie» : Théâtre burlesque et Evangile font bon ménage

La petite cité de Poligny, dans le Jura francais a vécu les 1er et 2 juillet 2017 le premier festival international de théâtre religieux burlesque «Festi’Joie». Des troupes venues de Suisse romande, de Belgique et de France ont donné à rire pour faire réfléchir, tant il est vrai que théâtre et religion peuvent faire bon ménage.

Pour ce premier «Festi’Joie», organisé par le diocèse français de Saint-Claude, dans le Jura, seul le temps était maussade et pluvieux. Mais il n’a en rien freiné l’enthousiasme et la joie des participants. Franche rigolade, intense émotion et prière ont alterné durant les deux jours de rassemblement, à la maison du diocèse de Saint-Claude, à Poligny. La sentence qui veut que le théâtre n’est pas le vrai, mais qu’il dit le vrai s’est amplement vérifiée à travers les divers spectacles et animations. La salle des fêtes, dans le quartier historique de la petite cité, était bien petite pour accueillir les 350 festivaliers. Un public de choix, passant du rire, aux larmes en une fraction de seconde, huant ou encourageant les personnages.

«Allo Noé? Noé à l’eau!»

La compagnie du canton de Vaud «A fleur de ciel» a livré une vision décalée de l’histoire biblique de l’arche de Noé entouré des flots du déluge durant 40 jours. Noé en capitaine de croisière, accompagné de sa femme de ses fils et de ses belles-filles, est hilarant. «Poussez pas, y pas le feu au lac!, se plaint une Vaudoise au moment d’embarquer. Mais si la croisière s’amuse, au bout de quelques jours, tout le monde sent mauvais et la soupe n’est plus très appétissante. Et quand Noé découvre deux passagers clandestins cachés dans la cale, le spectateur est projeté d’un coup en pleine actualité du drame des migrants perdus en Méditerranée. Lorsque toute la croisière s’écrie. «On n’en veut pas!» le message passe dans toute sa brutalité. Heureusement, sur l’arche, il y a la colombe qui apporte le rameau de la paix. «Vienne, vienne la colombe…» chante toute l’assemblée à mi-voix.

«Telle mère, tel fils»

«Don Bosco telle mère tel fils», joué par la troupe interdiocésaine belge «Catécado» emmène le spectateur dans les quartiers pauvres de Turin au milieu du XIXe siècle, avec ses enfants des rues, ses patrons exploiteurs, ses prostituées, ses voleurs. Sous ses airs de jeune prêtre naïf, très attaché à sa ›mamma’, Don Bosco est assez roué pour faire marcher son petit monde. Grâce au soutien très actif de ›maman Marguerite’, chaque garçon de l’oratoire reçoit l’amour qui lui manque. Là aussi, actualiser le message aux enfants des rues de Manille, Kinshasa ou Sao Paulo se fait de manière très directe. Et lorsque «maman Marguerite» meurt, tout le monde à la larme à l’œil.

«Cœur brûlant»

En arbordant le récit des disciples d’Emmaüs, la «Compagnie de l’Etoile» du diocèse local de Saint-Claude prenait un gros risque. Comment respecter l’intimité de cette rencontre entre le Christ et les pèlerins d’Emmaüs, sans tomber dans la miévrerie? Là aussi les grandes louches de burlesque ont fait merveille. Dans l’auberge ›chez Emma’ à Us on revit les scènes de ›rabbi Jacob’. Mais après la rencontre avec Jésus, on en ressort avec un cœur tout brûlant.

Extravagance et démesure

«Par son extravagance et sa démesure, le burlesque souligne ce qu’il y a de plus profond et de plus tragique pour l’alléger. C’est une victoire de la joie par rapport aux drames humains», commente le diacre belge Luc Aerens. Depuis plus de trente ans, il écrit et monte des pièces qu’il joue souvent lui-même sur scène. Pédagogue, professeur à l’institut Lumen Vitae de Louvain, il est un des spécialistes du théâtre religieux burlesque. Beaucoup de théologiens se sont intéressés au rire, relève-t-il. «Le rire est tellement sérieux qu’il peut rejoindre Dieu et l’Evangile.»

La messe du dimanche, à la collégiale St-Hyppolite, animée par les diverses troupes a concrétisé cette réalité. La franche rigolade a cédé sa place à la danse et à une homélie gestuée, mais toujours pour dire la même chose: la joie de croire. (cath.ch/mp)

14 juillet 2017 | 08:30
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 3 min.
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