Fribourg: Le grand chantier actuel du diocèse est la planification pastorale
«Nous ne pourrons plus occuper tout le terrain»
Bernard Bovigny, de l’agence APIC
Fribourg, 22 novembre 2002 (APIC) Baisse du nombre de prêtres et d’agents pastoraux laïcs, manque de finances dans certains cantons, structures lourdes, société en constante mutation, crise d’identité du prêtre. Cette réalité n’est pas nouvelle pour le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg. Mais depuis deux ans, l’évêché a pris des mesures en créant une commission de planification pastorale. Résultat: pas de nominations en 2003 et application des nouvelles décisions en 2004.
«Les nominations devenaient de plus en plus difficiles. Il n’était plus possible de transférer les prêtres d’une paroisse à l’autre ou d’un canton à l’autre sans déterminer dans quelle direction aller. Nous avons donc décidé, en juin 2001, de mettre en place une commission de planification pastorale», commente Mgr Rémy Berchier, vicaire général du diocèse et président de ladite commission.
Les effets ne se font pas attendre. En 2003, il n’y aura pas de déplacements dans les postes pastoraux, «sauf pour des situations d’urgence», précise Mgr Berchier. Dès 2004, la nouvelle planification se mettra en place dans l’ensemble du diocèse. «La commission s’est réunie deux fois, en septembre et octobre. Nous en sommes au début. Il appartiendra aux paroisses et aux agents pastoraux, prêtres et laïcs, de prendre leur destin en mains», indique le vicaire général. Celui-ci ne cache cependant pas que deux conclusions s’imposent d’entrée: les paroisses devront se regrouper en secteurs confiés à des équipes pastorales et, vu la baisse du nombre de prêtres et d’assistants pastoraux, l’Eglise ne pourra plus assumer tout ce qu’elle accomplissait jusqu’à maintenant. «Nous ne pourrons plus occuper tout le terrain», lâche Rémy Berchier. «Mais il ne revient pas à l’évêché de déterminer ce qui doit être abandonné. Les paroisses et les agents pastoraux auront leur mot à dire.»
Regroupements de paroisses déjà effectifs
Quels changements concrets attendent les paroisses? «Ils seront différents dans chaque canton. A Genève, par exemple, la réduction des postes est déjà dictée par des impératifs financiers. L’Eglise n’a plus assez d’argent pour conserver toutes ses activités», soutient Mgr Berchier. Pour ce qui touche les regroupements de paroisses confiées à des équipes pastorales, la plupart des cantons n’ont pas attendu la commission de planification pour les mettre en place. «Il n’y a plus que la partie alémanique du canton de Fribourg et quelques autres régions, sur Fribourg et Vaud, qui ont un curé à demeure dans la paroisse. Ailleurs, nous fonctionnons déjà en régions». Avec une exception pour les grandes paroisses urbaines, qui ont déjà la taille d’un secteur.
Ces données de départ, tout comme l’ensemble de l’analyse faite par la commission de planification épiscopale, ont été approuvées dans les grandes lignes le 14 novembre par le conseil presbytéral (le «sénat» des prêtres du diocèse) et le conseil pastoral diocésain, qui regroupe 24 délégués des cantons, des mouvements et du diocèse. Le document présenté par la commission de planification, formée de douze membres, prévoit 9 objectifs pastoraux: créer des ensembles de paroisses confiées à des équipes pastorales, développer une évangélisation assumée par des laïcs, promouvoir la pastorale des jeunes, former des petites communautés pour l’écoute de la Parole de Dieu, mettre en place des formes de prière diversifiées, organiser l’information religieuse et être présents dans les médias, donner des cahiers des charges raisonnables aux agents pastoraux et revoir l’articulation des ministères, coordonner les activités des paroisses avec celles des missions linguistiques, créer des lieux de rayonnement spirituel.
Ces objectifs n’ont pas été imaginés de toutes pièces par la commission de planification. «Notre travail est la suite logique des réflexions faites dans le cadre d’Horizon 2000 par le conseil presbytéral et par AD 2000 dans l’ensemble du diocèse. Nous en sommes à la phase de réalisation concrète», souligne Mgr Berchier.
Une autre initiative proposée par la commission et approuvée par Mgr Bernard Genoud, évêque du diocèse, sera de consacrer les 12 mois compris entre mai 2004 et mai 2005 à une «année des vocations». Mais pas seulement pour promouvoir les différentes formes d’engagement au service de l’Eglise. «Ce sera l’occasion de poser les vraies questions sur l’identité des prêtres, des religieuses et religieux, et des agents pastoraux laïcs», relève Rémy Berchier. «Si les 20 dernières années ont été marquées par la crise d’identité des assistants pastoraux et leur collaboration avec les prêtres, nous assistons actuellement à une crise d’identité des prêtres par rapport aux laïcs».
Le plus grand chantier de cette décennie
La commission de planification ne pourra pas éviter certaines questions posées actuellement à l’Eglise catholique. «Il est clair que nos conclusions seront limitées par les directives de l’Eglise universelle. Mais si l’ordination d’hommes mariés nous est proposée, ce qui a d’ailleurs été le cas dans le cadre de AD 2000, nous transmettrons le message au Vatican comme participation à la réflexion», soutient le vicaire général du diocèse. De même, la présidence de célébrations dominicales par les laïcs constituera un thème de réflexion, du fait que le vicariat épiscopal de Fribourg a constitué une commission pour aborder cette question d’actualité. Quatre assistants pastoraux de ce canton sont à la tête de paroisses, sans pour autant animer régulièrement des célébrations de la Parole.
«Cette planification sera le principal chantier de notre diocèse durant les 10 prochaines années», conclue Mgr Berchier. «Avec le risque de voir les éléments d’analyse dépassés par une réalité qui évolue très rapidement.» BB
Encadré
Les fusions, une question fribourgeoise
Le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg compte une population de 675’644 catholiques, selon les statistiques paroissiales établies entre 1998 et 2000. Le canton de Vaud compte 243’732 catholiques (36%), celui de Genève 195’246 (29%), Fribourg 172’716 (25,5%) et Neuchâtel 63’950 (9,5%).
Une première mesure pour alléger le travail des curés consisterait à fusionner des paroisses, afin de limiter le nombre de séances en conseils de tous genres. «Un problème essentiellement fribourgeois», estime Mgr Berchier. Le canton compte effectivement 145 paroisses, sur les 259 réparties dans les quatre cantons.
320 prêtres sont incardinés dans le diocèse, selon l’annuaire 2001-2002. Il convient d’ajouter 65 autres provenant d’ailleurs et 120 religieux actifs en pastorale. Ces chiffres à l’état brut tendent à démontrer que l’Eglise ne manque pas de forces vives dans l’ouest de la Suisse. Mais selon la statistique du clergé, 83 prêtres incardinés sont âgée de 76 ans ou plus, et 79 autres sont compris dans la tranche 66 – 75 ans. Seuls 5 prêtres ont moins de 31 ans. (apic/bb)