La pièce musicale "L'homme armé: une messe pour la paix", a été écrite en 1999 | © DR
Suisse

Fribourg: pas de prière musulmane à l’église

La pièce musicale intitulée L’homme armé: une messe pour la Paix, jouée prochainement dans des églises catholiques de Siviriez et Bulle (FR), a été amputée d’un passage contenant un appel musulman à la prière. Des plaintes et une polémique en France sont à l’origine de cette décision.

L’homme armé: une messe pour la Paix est une œuvre musicale réalisée par le compositeur britannique Karl Jenkins en 1999, en pleine guerre du Kosovo, raison pour laquelle un «appel à la prière» musulman a été ajouté. Karl Jenkins voulait signifier qu’au-delà des différences, les religions veulent toutes ensemble proclamer la paix sur terre.

L’œuvre sera interprétée les 2, 3 et 4 février 2024 dans les églises de Siviriez et de Saint-Pierre-aux-Liens à Bulle par le Corps de musique de la ville de Bulle et huit chœurs de la région. Mais l’appel à la prière musulmane fera place à deux minutes de silence, précédées de quelques explications à destination du public, rapporte le 20 janvier le quotidien La Liberté.

Polémique en France

Le compromis a été décidé d’un commun accord par les représentants de l’évêché de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF), des paroisses et des musiciens. Il s’agit de permettre à l’œuvre d’être jouée sans perturbations. Des personnes opposées à l’idée qu’un appel à la prière islamique résonne entre les murs d’une église auraient notamment menacé de venir manifester leur désaccord.

La polémique autour de l’œuvre se serait enflammée le 11 novembre 2023 après une représentation à l’église de la Sainte-Trinité, à Paris. La fronde a été relayée par le site internet français Riposte catholique, proche des milieux traditionalistes. La plateforme mentionne aussi les concerts prévus dans le canton de Fribourg. En 2007, le doyen de la cathédrale anglicane de Nelson, en Nouvelle-Zélande, avait déjà interdit la pièce musicale, sous prétexte qu’elle contenait des éléments non chrétiens.

Eviter que le fond du propos soit «mangé»

Céline Ruffieux, représentante de l’évêque pour la partie francophone de la région diocésaine de Fribourg, a confirmé à La Liberté avoir reçu plusieurs messages de personnes s’offusquant qu’un appel à la prière musulmane puisse être récité dans une église, dont certains étaient agressifs. Des échos venus de membres de la communauté musulmane laissent à penser que cette interprétation d’un texte religieux islamique dans un lieu chrétien pouvait leur poser problème à eux aussi, a-t-elle ajouté.

La décision de ne pas interpréter le deuxième mouvement de l’œuvre de Karl Jenkins permettra, selon Céline Ruffieux, d’éviter que la polémique en cours ne vienne «manger» le fond du propos, qui est d’abord une invitation à la paix universelle. L’œuvre avait déjà été interprétée en 2012 à l’église de Siviriez, sans que cela ne fasse polémique. «Nous sommes dans une période plus clivante, il faut en prendre acte», déplore l’agente pastorale.

Présidente du Corps de musique de la ville de Bulle, la conseillère aux Etats fribourgeoise Johanna Gapany a aussi regretté cette polémique. «Nous parlons d’une œuvre qui réunit les religions et qui en parle, c’est un fait. Et si la question est de savoir si l’Eglise chrétienne est le bon endroit pour défendre les valeurs de l’humanisme, la paix, alors ma réponse est oui». (cath.ch/laliberte/arch/rz)

La pièce musicale «L'homme armé: une messe pour la paix», a été écrite en 1999 | © DR
22 janvier 2024 | 12:19
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture: env. 2 min.
Céline Ruffieux (13), Chants (31), Musique (64), musulman (10), Siviriez (9)
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