Fribourg: Pour avoir offert l’hospitalité à des sans papiers sans en faire mystère
Le député et ex-rédacteur de l’Apic Bernard Bavaud condamné
Ou quand l’application stricte de la loi l’emporte sur l’humanitaire
Fribourg, 12 janvier 2004 (Apic) La justice fribourgeoise a condamné lundi le député socialiste de Fribourg Bernard Bavaud à 300 francs d’amende. Sa faute? Avoir offert l’hospitalité à des sans-papiers. Le tribunal de la Sarine a tranché. En interprétant à l’aveugle et à la lettre la stricte loi fédérale en la matière, au détriment de l’aspect humanitaire, et en triplant une première amende. La faisant passer de 100 à 300 francs. Le député a confirmé à l’Apic qu’il allait recourir au Tribunal cantonal.
Ancien responsable de Frères sans frontières – l’actuel E-Changer -, ancien rédacteur à l’Apic, aumônier à l’Hôpital cantonal de Fribourg avant sa retraite, il y a peu, Bernard Bavaud n’a jamais fait mystère des causes qu’il a à coeur de défendre. Pas d’avantage qu’il n’avait pas caché avoir hébergé deux mois durant deux clandestins kurdes en été 2002, au même titre que d’autres du collectif fribourgeois de soutien aux sans papiers.
Son tort aux yeux de la justice fribourgeoise? Avoir violé la loi fédérale sur le séjour des étrangers. Ce qui lui a valu dans un premier temps une amende de 100 francs + les frais – en décembre 2003, que le député a refusé de payer. «Ce n’est pas le montant de l’amende qui pose problème, devait du reste commenter samedi dernier Bernard Bavaud au quotidien «La Liberté», mais bien le principe».
Les faits? Bernard Bavaud et sept autres membres du collectif ont été cités à comparaître comme témoins de la défense lors d’un autre procès du même genre. Le juge Nicolas Ayer avait refusé d’entendre ces témoins. Délation? Le juge avait en tous cas transmis leurs noms à un juge d’instruction. Ces mêmes témoins furent entendus plus tard par la police. «Ou quand dame justice refuse d’enlever son bandeau sur les yeux», a-t-on entendu lundi à la sortie de l’audience.
Le défenseur de M. Bavaud, le conseiller national Erwin Jutzet, et le député socialiste ont d’ores et déjà décidé de faire appel au tribunal cantonal contre cette condamnation, en attendant d’autres procès de ce type. Les autres témoins jamais entendus par le juge Ayer viennent à leur tour de recevoir leurs amendes. Et s’apprêtent eux aussi à recourir.
Indignation: deux poids et deux mesures
Le sentiment dans le public au terme de l’audience était à l’indignation et à la colère. Dans le canton de Vaud, par exemple, dans une affaire semblable, la justice s’était prononcée pour l’acquittement. Dans un autre cas, fribourgeois également, le juge avait choisi de ramener l’amende de 800 à 200 francs. Le juge André Waeber, qui officiait lundi au Tribunal de la Sarine a préféré le chemin inverse. Faisant passer de 100 francs l’amende initiale à 300 francs. Sans parler des frais de procédure, d’un montant de 200 francs. Deux poids et deux mesures!
Ces dernières années, comme de nombreux sans-papiers, toutes ces personnes avaient choisi de sortir de l’ombre à la suite du mouvement en faveur de la légalisation des clandestins en Suisse. Le mouvement avait connu de nombreux moments forts, dont l’occupation de l’église St-Paul, à Fribourg, en été 2001. (apic/pr)