Un succès mérité pour un programme très varié
Genève: Agapé 2e Festival de musique et d’art sacré (170594)
Genève, 17mai(APIC) Le Festival Agapé de musique et d’art sacré, organisé
pour la deuxième fois par les frères de la communauté St-Jean, s’est achevé
dimanche à Genève. Pendant quatre jours, des artistes prestigieux se sont
produit pour des concerts de musique instrumentale et vocale ainsi que pour
des spectacles de théatre, de poésie et de danse. Une exposition de tableaux, une conférence et une table-ronde complétaient le programme. Les organisateurs ne peuvent que se féliciter du succès obtenu et de la fréquentation d’un nombreux public.
Mais pourquoi donc un festival d’art sacré à Genève? Les frères de StJean sont convaincus que «dans un monde largement déchristianisé, l’art demeure une voie privilégiée pour faire redécouvrir à l’homme la spiritualité
de son existence». Le nom donné au Festival n’est pas fortuit. ’Agapé’ signifie dans la révélation biblique l’amour que l’homme reçoit de Dieu. Plus
que la promotion l’art en général, Agapé a pour but de favoriser autour du
prieuré St-Jean un milieu spirituel et humain, tant il est vrai qu’une convivialité et une communion exceptionnelles se sont tissées entre participants et organisateurs durant ces quatre jours forts en émotion. Les artistes, ainsi plongés dans un milieu exceptionnel ont pu donner le meilleur
d’eux-mêmes et de leur art et faire partager leur quête spirituelle de la
beauté.
Les festivités ont été ouvertes jeudi par un concert de l’Ascension donné par la maîtrise de Colmar, sous la direction d’Arlette Steyer. Le soir
les sept chanteurs du groupe «A Filetta» proposèrent des pièces religieuses
et traditionnelles corses. Ces chants, tels un souffle, viennent à travers
ces voix chaudes et profondes toucher l’auditeur au creux de l’âme.
La journée de vendredi s’est ouverte avec un spectacle poétique intitulé
«la femme en exil» par l’Ecole Sagesse et Art Chrétien, installée en Bourgogne. Sur le thème de la femme, mystère et chef d’oeuvre de la création,
ce spectacle montre que d’Eve à Marie, toute femme est en exil plongée dans
les tribulations de l’hiver terrestre. Les jeunes artistes allient au quotidien le langage poétique et le langage mystique à travers une vie commune
intense, une recherche partagée de la vérité et un climat de prière.
L’ensemble Gilles Binchois, qui tire son nom de celui d’un artiste médiéval, composé de six chanteurs et dirigé par Dominique Vellard a présenté
ses chants grégoriens. Entièrement voué à la découverte et à l’interprétation des musiques du Moyen-Age, sans aucune concession aux modes, cet ensemble plonge l’auditeur dans un univers hautement mystique.
Samedi, Catherine Salviat et André Falcon, tous les deux comédiens ont
interprété «La Vierge à midi» autour de textes de Valéry, Dostoïevski,
Montherlant, Racine, Claudel… Dans l’après-midi la place fut faite à la
tragédie grecque avec Antigone de Sophocle, présenté par la compagnie Jean
David. Pour laisser la place à l’intensité du texte, le choix de la mise en
scène s’est porté sur un décor neutre de rideaux noirs et de colonnes stylisées. Cette tragédie a été suivie d’une conférence du Père Marie-Dominique Philippe, fondateur de la communauté St-Jean, sur le thème du tragique
dans l’art. La tragédie grecque est la source de l’expression du tragique
dans l’art, et, par conséquent du sentiment religieux dans l’art puisque
ces deux sentiments ont en commun la recherche de l’absolu. Dans ce sens
les Grecs sont les précurseurs du christianisme, souligne-t-il. Au delà de
la tragédie grecque, l’art sous toutes ses facettes, y compris l’art chrétien, ne cesse d’exprimer le tragique de la condition humaine.
Kenneth Gilbert a offert dans la soirée un récital de clavecin autour de
pièces de Couperin, Rameau, Froberger et Duphly, expressions de la grandeur
et du raffinement d’un des grands siècles de la musique française.
Le même Kenneth Gilbert a ensuite pris part à une table-ronde en compagnie du Père Philippe et du comédien Jean Davy sur le thème de l’interprétation dans l’art. Les artistes ont livré leur expérience personnelle sur
leurs rapports avec le texte ou la partition.
Il faut relever encore la présence d’une jeune danseuse de talent, Sylvie Cavier, dont le spectacle intitulé «Source inépuisable d’amour» a été
un grand succès et un moment de beauté inoubliable. Danser dans une église,
voilà qui relève d’une démarche originale. Sylvie Cavier, qui possède une
formation tant classique que contemporaine, ne craint pas de sortir des
chemins battus par cette démarche au service de la foi. Elle a prouvé que
la danse, art du corps par excellence, pouvait se ’dématérialiser’ jusqu’à
s’identifier à l’esprit. Une manière pour la jeune artiste de redonner paradoxalement un visage humain à la danse.
Le Festival s’est clôturé par le concert d’Hesperion XX dirigé par le
désormais célèbre Jordi Savall, créateur notamment des musiques des films
«Tous les matins du monde» et «Jeanne la pucelle». Cet ensemble de
musiciens, ainsi que la voix limpide et translucide de la soprano Monserrat
Figueras, ont su redonner vie à la musique si dansante, si recueillie de
l’Espagne du XVe siècle.
Le Père Réginald Pycke a consacré ses huiles et ses aquarelles au mystère de la croix. Cette exposition complètait parfaitement la palette artistique de ce festival. On ne saurait oublier la célébration quotidienne de
l’office religieux qui, dans un contexte d’une telle spiritualité, s’imposait très naturellement. Le seul souhait que l’on puisse faire est que le
Festival Agapé continue sur sa lancée. (apic/cg/mp)