Le visage du protestantisme
Genève: Les nouvelles communautés évangéliques pentecôtistes fleurissent
genevois prend des couleurs exotiques
Genève, 23 juillet 1999 (APIC) Depuis une dizaine d’années, une trentaine de nouvelles Eglises protestantes à caractère ethnique ont vu le jour à Genève. Ces communautés permettent chaque dimanche à des chrétiens des quatre coins du monde de se retrouver un peu sur leur terre natale. Ces protestants de sensibilité pentecôtiste développent aussi une solidarité pratique face aux difficultés rencontrées en Suisse.
«En fréquentant cette Eglise le dimanche après-midi, je me retrouve un peu chez moi». Ziéna est une Erythréenne dans la vingtaine. Cette étudiante à l’Ecole des hautes études internationales fréquente l’Union chrétienne Béthel, une communauté protestante éthiopienne qui se réunit dans une annexe du temple de Plainpalais, au coeur de Genève. Depuis une dizaine d’années, une trentaine de nouvelles Eglises constituées autour d’une identité linguistique ou ethnique ont vu le jour dans la cité de Calvin. Composées à l’origine de groupes familiaux, ces communautés ghanéenne, congolaise, coréenne, brésilienne ou internationales grandissent et réunissent parfois près de 300 personnes au culte dominical.
A Plainpalais, l’Union chrétienne Béthel rassemble une trentaine de personnes d’origine éthiopienne ou érythréenne. La musique est quasi orientale. Sur un rythme lent, un synthétiseur vous emmène à la découverte d’un univers musical typique du lieu d’origine de ces croyants et de leur langue: l’amharique. «Participer à ces cultes, relève Ziéna, me permet de conserver un pied en Afrique, tout en vivant pleinement en Europe». Là, le temps ne compte plus. Les chants tournent à l’incantation. Pendant quinze minutes, les participants psalmodient les mêmes paroles.
Solidarité
Pratiquer sa foi dans sa langue et vivre dans un cadre de références culturelles communes ne sont pas les seules raisons qui poussent à l’éclosion de ces communautés. Des problèmes semblables de vie quotidienne incitent aussi ces chrétiens à développer une solidarité forte. Dans une Eglise fréquentée par plus d’une centaine de latino-américains, plus de 80% sont des femmes en situation irrégulière en Suisse. Les responsables de cette Eglise ont fort à faire en matière d’aide sociale. Ils passent du temps après la rencontre dominicale à écouter des femmes dépouillées de tous leurs droits fondamentaux. Une d’entre elles explique, dans un français très approximatif, qu’elle a intenté un procès à un employeur qui la battait, suite au conseil et à l’appui d’un des responsables de cette Eglise.
Une ouverture sur la dimension universelle
La plupart de ces Eglises ethniques véhiculent une spiritualité de type pentecôtiste, beaucoup plus exubérante que celle qui prévaut dans nombre d’Eglises romandes. Leur théologie se rattache aussi au courant évangélique. Pasteur de l’Eglise nationale protestante de Genève (ENPG), Olivier Labarthe, ne cache pas que cela exige de la part des réformés romands un effort pour entrer en relation. Un effort qui ne doit pas s’effaroucher de différences qui touchent davantage à la forme qu’au fond. Au lieu de s’étendre sur une heure, le culte durera près du double. «Il y a là une manière de faire qui permet à la communauté de se construire au travers de rencontres plus intenses», souligne le pasteur genevois.
Occasion de s’enrichir
Pour Christian Bussy, pasteur de l’Eglise évangélique apostolique de Genève, promouvoir le dialogue avec ces Eglises est très important. Selon ce pentecôtiste, toutes les Eglises romandes trouvent là une occasion de s’enrichir de l’enthousiasme propre aux communautés étrangères. Toutefois, le dialogue est aussi capital pour permettre à ces nouvelles Eglises d’avoir un authentique vis-à-vis. Certaines peuvent en effet souffrir d’un excès d’indépendance. «Il est possible qu’un responsable devienne un leader intouchable, relève-t-il. Ce glissement entraîne alors des dérapages dommageables à la vie de la communauté». La multiplication des Eglises ethniques est un phénomène perceptible ailleurs en Suisse, notamment dans de grands centres comme Berne, Zurich ou Lausanne. (apic/spp/sc/pr)