Un décret accueilli avec méfiance par les prêtres vaudous
Haïti: Le gouvernement reconnaît le vaudou comme religion
Port-au-prince, 11 avril 2003 (Apic) Bien que saluée par la quasi-totalité de la population, la décision du Chef de l’Etat Jean-Bertrand Aristide de légaliser le vaudou comme religion à Haïti ne suscite des réserves dans le clergé vaudou . Ce dernier espère que cette décision ne procède pas tout simplement d’une logique politicienne.
Dans un décret signé la semaine dernière, le président Aristide invite les adeptes et organisations vaudous à se faire enregistrer auprès du ministre des affaires religieuses. Ils seront donc désormais légalement aptes à officier lors des cérémonies, tels les mariages, baptêmes, etc.
Jean-Bertrand Aristide avoue qu’il reconnaît le vaudou comme n’importe quelle autre religion. Il en veut pour preuve l’écharpe présidentielle qui lui a été remise en 1991 par une prêtresse vaudou à la prestation de serment de son premier mandat. Pour le chef de l’Etat haïtien, le vaudou en tant que religion ancestrale est une partie essentielle de l’identité nationale et ses institutions représentent une part considérable des 8,3 millions d’habitants.
Assimilé à la magie noire
Les adeptes de cette religion, tout en louant cette décision, estiment tout de même qu’il reste beaucoup à faire pour effacer le ridicule et la persécution dont ils ont été victimes aux Caraïbes et ailleurs. Cette réserve est également partagée par le prêtre vaudou Philippe Castera. Il espère que ce décret n’est pas qu’un subterfuge pour s’attirer la sympathie des populations par ces temps d’instabilités politico-économiques. Car, en dépit de leur contribution à la culture haïtienne, les adeptes vaudous demeurent incompris et méprisés.
Malgré la réforme constitutionnelle de 1987 qui a reconnu l’égalité religieuse, le vaudou reste encore assimilé à la magie noire basée sur les sacrifices humains et animaliers pour invoquer les mauvais esprits. C’est d’ailleurs dans ce sens qu’en 1940 l’Eglise catholique a initié la destruction des temples et des objets sacrés vaudous. Philippe Castera estime donc pour ce faire, qu’il faudra plus qu’un décret présidentiel pour mettre fin à cette conception du vaudou qu’il qualifie de malveillante.
Le vaudou a vu le jour aux Caraïbes. Il est le produit du contact entre les cultures des esclaves ouest- africains et le catholicisme. (apic/ap/jv)