«Il est interdit de fumer et de s’amuser le soir dans mon quartier»
Dakar, 23 septembre 2001 (APIC) Le khalif (chef suprême) de la communauté niassène, El hadj Mahamadou Niass, a imposé de nouvelles mesures dans sa «cité religieuse» située dans la ville de Kaolack (à 200 km au sud de Dakar). Il y proscrit la vente et l’usage du tabac, l’organisation de soirées musicales et folkoriques, ainsi que le port d’habits indécents par les filles ou femmes, tels que les jupes courtes et les pantalons moulants. Le Sénégal, connu pour sa cohabitation respectueuse et pacifique des chrétiens et des musulmans, connaît aussi ses dérives islamistes.
Les mesures prises à Kaolack, approuvées par l’administration locale, ont été prises pour se «conformer à la volonté du fondateur de cette cité sainte», a déclaré son porte-parole, en fixant les panneaux portant les inscriptions liées aux interdits. Selon lui, le fondateur de la cité (son père, El hadj Ibrahima Niass, décédé en 1975) avait toujours combattu les forces du mal, en s’opposant à toutes les dérives de la société et aux manifestations sataniques. «L’évolution de la société, et le contact avec la civilisation occidentale ont fait que les jeunes ont maintenant pris des habitudes non conformes à l’islam», a encore souligné le porte-parole du guide religieux.
Les populations du quartier où habite le khalif, concernées au premier chef par cette nouvelle mesures, critiquent en privé cette nouvelle réglementation. Selon des témoins, des hommes ont été chargés de veiller à son application stricte. Une mesure similaire est en vigueur depuis plus de cinquante ans dans le village de Cambérène, un quartier populaire au nord de Dakar. Elle a été décrétée par le khalif des layène, une autre communauté musulmane, composée essentiellement de lébous, les fondateurs de Dakar vers 1546.
Alcool, fumée, tam-tam, habits non islamiques et français interdits
A Médina-Gounass (environ 560 km au sud-est de Dakar), fief d’un autre marabout, il y est formellement interdit de fumer, de consommer l’alcool, ou encore de battre du tam-tam, de porter des habits non acceptés par l’islam. L’enseignement du français à l’école y est également interdit. Le marabout et ses fidèles s’opposent à la construction de salles de classe, estimant que l’école française pousse les enfants à s’écarter de l’islam. La communauté religieuse de Médina-Gounass revendique plus de 600’000 fidèles au Sénégal et dans les pays voisins (Mauritanie, Mali, Guinée-Bissau, Gambie).
Les communautés niassène et layène, ainsi que le marabout de Médina-Gounass font partie de la confrérie des tidjanes, la plus grandes branche famille islamique au Sénégal et en Afrique. La première compte environ cinq cent mille fidèles au Sénégal, en Gambie, au Nigeria et aux Etats-Unis. La seconde quant à elle, a près de trois mille membres.
Enfin Touba, siège de la puissante confrérie mouride, subit également des restrictions depuis la fondation de la localité par le fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba, vers le milieu du siècle dernier. Il y a près de cinq ans, l’Etat a été contraint de fermer des écoles qu’il avait fait construire dans les environs de la cité sainte, sur ordre du marabout. (apic/ibc/bb)