Inde: Un hindouiste porte plainte après avoir agressé un pasteur protestant à la hache

Il l’accuse de prosélytisme

Karnataka, 5 janvier 2011 (Apic) Le révérend Samuel Isaac a été attaqué à la hache, le 2 janvier lors d’une réunion de prière, par un hindouiste qui l’a ensuite accusé de chercher à convertir au christianisme les tribus nomades de la région, rapporte Eglises d’Asie (EDA), l’agence d’information des missions étrangères de Paris (MEP).

Le 2 janvier au soir, alors qu’il priait sous la tente d’une communauté nomade dans le district de Davanagere au Karnataka – district dont il est le coordinateur pour le Global Council of Indian Christians (GCIC) (1) -, le pasteur protestant Samuel Isaac, 40 ans, a été pris à partie par un hindouiste qui l’a accusé de chercher à convertir au christianisme les tribus nomades de la région. Membre du Bajrang Dal (2), le jeune militant, dont le nom serait Basavaraju, se serait alors violemment emporté et aurait essayé de frapper le révérend à la tête avec une hache, rapporte Eglises d’Asie (EDA). Le pasteur a été grièvement blessé, mais ses jours ne seraient pas en danger, selon les dires de Sajan George, président du GCIC, rapportés le 4 janvier par l’agence Ucanews.

Une version déformée des faits

Cependant, cette affaire connaît aujourd’hui un nouveau rebondissement. Les forces de police du district, après avoir annoncé qu’elles allaient interpeller le jeune militant hindouiste, viennent de procéder à l’arrestation des deux assistants du pasteur, Babu et Krishna. Selon une information diffusée le 4 janvier par l’agence Asianews, la police a arrêté les deux chrétiens, à la suite d’une plainte déposée par l’agresseur contre le révérend Isaac, au titre de l’article 153 du code pénal indien (3).

Dénonçant la collusion entre la police locale et les hindouistes du Bharatiya Janata Party (Parti du Peuple indien, BJP) au pouvoir, le président du GCIC s’est indigné du fait que les coupables «se soient arrangés pour faire arrêter les victimes». «C’est une tache indélébile sur notre démocratie laïque», a-t-il déclaré, ajoutant qu’une version déformée des faits était propagée par les hindouistes. Ces derniers prétendent que le pasteur se serait lui-même blessé en fuyant les militants hindous qui l’avaient interrompu alors qu’il évangélisait les nomades.

Multiplication des violences antichrétiennes

Les allégations de prosélytisme accompagnées de violences antichrétiennes se multiplient au Karnataka, depuis l’arrivée au pouvoir en mai 2008 du BJP, vitrine politique du mouvement pro-hindou. Légitimant leurs attaques en invoquant les articles 153 et 295 A (»atteinte aux sentiments religieux») du code pénal indien, les hindouistes obtiennent la plupart du temps le soutien des forces de l’ordre. Une attitude dénoncée par le GCIC, ainsi que par de nombreux mouvements de défense des Droits de l’homme présents dans l’Etat.

Lors des violences antichrétiennes de 2008, l’Etat du Karnataka avait été l’un des plus touchés, avec plus d’une quarantaine de lieux de culte saccagés et de nombreux chrétiens agressés et grièvement blessés. L’inaction, voire la complicité du gouvernement et de la police lors des attaques – des membres des forces de l’ordre ayant été jusqu’à prêter main forte aux agresseurs –, avaient été montrées du doigt, en particulier par Mgr Moras, archevêque de Bangalore. Afin de mieux se défendre face aux extrémistes hindous, les chrétiens du Karnataka, toujours à l’initiative de Mgr Moras, avaient fondé en 2009, un «forum œcuménique», le KUCFHR, regroupant 113 dénominations chrétiennes.

Selon les statistiques nationales de 2001, l’Etat du Karnataka compte près de 53 millions d’habitants, en grande majorité hindous, les musulmans représentant environ 12 % de la population et les chrétiens moins de 2 %.

(1) Le Global Council of Indian Christians (GCIC) est une ONG d’obédience protestante, qui lutte contre les violences antichrétiennes.

(2) Le Bajrang Dal est la branche jeunesse du Vishwa Hindu Parishad (VHP), une organisation nationaliste hindoue réputée pour sa violence.

(3) L’article 153 du code pénal indien sanctionne, entre autres, les «troubles à l’ordre public et les incitations aux affrontements intercommunautaires au nom de la religion», ainsi que «les allégations préjudiciables à l’intégration nationale». (apic/eda/nd)

5 janvier 2011 | 14:30
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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